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Le triomphe de la vérité

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L’utilité de la Haute Cour de Justice:Une analyse de Gilles Badet, Juriste, Consultant, Spécialiste en Gouvernance


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La Haute Cour de Justice est l’institution chargée de juger le président de la République et les membres du gouvernement pour haute trahison, complot contre la sureté de l’Etat, outrage à l’Assemblée nationale, atteinte à l’honneur et à la probité et toutes autres infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Elle est l’objet de diverses critiques dans l’état actuel de son organisation.

D’abord, s’agissant de sa composition (Les 6 membres de la Cour constitutionnelle qui ne sont pas président de ladite Cour, le président de la Cour suprême, soit 7 professionnels, auxquels s’ajoutent 6 députés à l’Assemblée nationale). Celle-ci est considérée comme étant trop politisée.

Ensuite, s’agissant des conditions de déclenchement des poursuites devant elle. Il faut d’abord une décision de poursuite à la majorité des 2/3 des députés composant l’Assemblée nationale (soit 56 députés sur 83). L’instruction s’ouvre alors et est conduite par des spécialistes (chambre d’accusation de la Cour d’appel de Cotonou). Si l’instruction débouche sur une demande de mise en accusation, il revient encore aux députés à la même majorité des 2/3, de décider de cette poursuite.

Par ailleurs, les complices des auteurs principaux ne sont justiciables de la Haute Cour de justice qu’en ce qui concerne la seule infraction de « complot contre la sureté de l’Etat ». Pour les autres infractions, ils seraient justiciables des juridictions ordinaires pendant que les auteurs principaux – poursuivis sur la base des mêmes faits- seraient justiciables devant la Haute Cour de justice, d’où des risques élevés de contrariété de justice et des difficultés procédurales diverses.

Enfin, relativement aux infractions susceptibles d’être portées devant elle, la Constitution mentionne la « haute trahison », le « complot contre la sureté de l’Etat », l’ « outrage à l’Assemblée nationale », « toute atteinte à l’honneur et à la probité », ainsi que toutes autres infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Il est précisé que la Haute Cour de Justice est liée par la définition des infractions et la détermination des sanctions résultant des lois pénales en vigueur au moment des faits. Or ces infractions ne sont toujours pas définies et les sanctions pour les réprimer n’existent donc pas.

Pour résoudre ces problèmes, la Commission de relecture de la Constitution n’a rien proposé s’agissant des infractions relevant de la compétence de la Haute Cour de Justice. Par contre, elle a proposé :

– S’agissant de la composition de la haute Cour, de réduire le nombre d’acteurs politiques (députés) à 5 au lieu de 6, d’augmenter de nombres de professionnels à 8 en ajoutant aux 7 précédents, le président de la Cour des comptes. Par ailleurs, toujours dans un souci de meilleure juridicisation, il est proposé que le Président de la Haute Cour de justice soit élu parmi ses membres juristes.

– En ce qui concerne le déclenchement des poursuites, qu’il ne soit plus distingué une décision de mise en accusation différente de celle de poursuite, même si l’expression « mise en accusation » serait maintenue dans la disposition relative à la suspension de leur poste des personnalités qui seraient poursuivies devant la Haute Cour de justice.

Au-delà, la situation du président de la République serait séparée de celle des membres du gouvernement. Pour le premier, les anciennes conditions de déclenchement de la poursuite demeureraient en vigueur, avec une petite nuance. La décision de poursuite de cette personnalité serait votée à la majorité des 2/3 des députés composant l’Assemblée nationale, à l’exclusion – nouveauté- des 5 députés membres de la Haute Cour de Justice (donc, 52 députés sur 78). Par contre, s’agissant des membres du gouvernement, la décision de poursuite serait votée à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale (soit 42 députés sur 83).

Par ailleurs, le procureur général près la Haute Cour de Justice (Procureur général de la Cour suprême) pourrait déclencher de sa propre initiative, la poursuite d’un membre du gouvernement. Il est enfin précisé que la décision de poursuite des complices ou coauteurs non membres du gouvernement ne relève pas de l’Assemblée nationale.

Le Gouvernement n’a rien trouvé à dire sur ces propositions de la Commission de relecture. Elles ont donc été maintenues dans le rapport final de la Commission de relecture. Mais le gouvernement n’a plus fait aucune proposition relative à la Haute Cour de justice dans le projet déposé à l’Assemblée nationale.

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