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Le triomphe de la vérité

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LA CHRONIQUE DU PRESIDENT:COMMENT S’AFFIRMER ET APPRENDRE A NOS ENFANTS LE OUI ET LE NON


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Que ce soit savoir refuser, exprimer et défendre son point de vue, gérer des conflits ou négocier, savoir s’affirmer est le moyen de se faire écouter et respecter, et permet de trouver un équilibre dans sa relation avec les autres. S’affirmer, c’est révéler sa valeur !

Entre contraintes et plaisirs, l’affirmation de soi trouve son équilibre dans nos oui et nos non. Comment les exprimer pleinement ? Un apprentissage qui s’acquiert dès l’enfance.

Les parents déplorent souvent les non de leurs enfants. Ils se plaignent de leurs refus. Redoutent que ceux-ci ne mettent en cause leur autorité et révèlent chez leur progéniture une (dangereuse) tendance à refuser les règles. Il est beaucoup plus rare qu’ils s’inquiètent de la trop grande fréquence de leurs oui.

L’enfant qui ne dit jamais non n’est – à l’instar du bébé trop sage – que rarement un objet d’inquiétude et c’est dommage. L’éducation, en effet, devrait permettre aux enfants d’apprendre tout autant le non que le oui car les deux sont absolument nécessaires à leur construction.

Malgré son air modeste et ses trois petites lettres, le oui est un mot bien plus complexe qu’il n’y paraît. Il suppose, en effet, toujours qu’il l’ait précédé :

• Soit une demande : « Tu veux de la salade ? Oui, merci », et, dans ce cas, il peut être l’expression d’un choix, d’une liberté.

• Soit un ordre : « Circulez ! Oui, monsieur l’agent », et il est, alors, le plus souvent un oui non pas de consentement, mais de contrainte. La preuve de l’allégeance faite à une autorité.

Cette seconde dimension est des plus importantes, car la vie avec leurs semblables oblige en permanence les humains à se soumettre aux ordres de la société. A dire oui aux obligations, aux interdits qu’elle impose. Les adultes connaissent bien ces oui qu’ils sont tenus de dire mais qui chaque fois leur coûtent parce qu’ils les contraignent à aller à contre-courant de leurs désirs. Ils vont de l’heure imposée pour le réveil du matin au feu rouge qui, si on le «grillait», ferait gagner un temps fou. En passant par les exigences ‘’imbéciles’’ du chef de service auquel il serait si tentant de dire son fait…

Les enfants ont à faire aussi à ces oui. Aussi souvent que les adultes, mais plus durement, car ils n’ont pas encore acquis l’habitude, et surtout la compréhension, des règles qui pourraient leur permettre de supporter les frustrations qu’elles engendrent. Celles-ci, pourtant, les guettent à chaque instant de leur vie comme autant d’obstacles mis par l’éducation au «pulsionnel» qui les habite.

Ils doivent apprendre à dire bonjour, à ne pas crier, à ne pas voler, à ne pas frapper, etc. Il leur faut dire oui à la chambre à ranger, aux dents à laver, aux leçons à apprendre, aux interdits, aux devoirs à faire, aux dimanches chez grand-mère et j’en passe…

Pour l’enfant, le pays du oui est celui des contraintes, des interdits et des lois. Il doit y vivre une grande partie de son temps et y abandonner peu à peu ce que Freud nommait « le principe de plaisir » – je fais ce que je veux, comme je veux, quand je veux… – pour entrer dans la règle commune : « Oui, papa, oui, maman, oui monsieur le professeur » Au secours !

Heureusement, pour fuir cet enfer, il existe un pays du non. Le pays du non, c’est celui de toutes les choses que l’on est en droit de refuser parce qu’elles n’ont rien d’obligatoire. De toutes celles dont on peut décider soi-même. La couleur du vêtement que l’on va mettre le matin (« Non, maman, pas celui-là ! »). Le nombre de tartines que l’on va manger à son petit déjeuner (« Non merci, je n’ai plus faim… »). Ses propres critères de la beauté, le métier que l’on fera plus tard, etc. Le pays du non, c’est le territoire du désir, celui du je, du choix et des opinions libres.

C’est un beau pays mais, que l’on soit adulte ou enfant, il n’est pas toujours facile d’y vivre. D’abord, à cause des autres. Parce que poser son désir implique souvent de s’opposer au leur, surtout, quand, persuadés de savoir mieux que nous où est notre «bien», ils veulent en décider à notre place.

A ce niveau, la tâche est plus dure encore pour l’enfant. Parce qu’il construit toujours sa personnalité «contre» ses parents. Dans les deux sens du mot. C’est-à-dire à la fois en prenant appui sur eux – à la façon dont on s’appuie sur un mur – et en opposant à eux. L’enfant est donc, de ce fait, contraint de leur signifier en permanence qu’il n’est pas l’enfant – imaginaire – dont ces parents avaient rêvé : « Non maman, moi, le piano, ça ne me plaît pas ! »

Cette affirmation de soi, ce refus du désir de l’autre, qui permettent de dessiner peu à peu les contours de son propre désir, ne vont pas sans peur – peur du conflit, peur de décevoir l’autre et de le faire souffrir, peur de perdre son amour, etc. – et sans culpabilité. Cette culpabilité de l’enfance peut persister à l’âge adulte et empoisonner aussi bien la vie privée que la vie sociale.

En fait, pour qu’un adulte ressente la vie aux pays du non comme légère et légitime, il faut qu’il en ait fait très tôt l’apprentissage. C’est-à-dire qu’il ait eu des parents qui non seulement aient accepté ses choix, mais les aient sollicités et encouragés. Même – et surtout – pour les choses apparemment banales du quotidien. Il faut que les parents lui aient demandé son avis pour tout ce qui le concernait et l’aient respecté. Et, de surcroît, lui aient donné le droit de les contredire, d’émettre des avis différents des leurs.

Aujourd’hui beaucoup d’intellectuels, de politiques sont incapables de penser par eux-mêmes. Si ce n’est pas Socrate qui a dit, c’est Senghor, c’est Luther, etc. Rares sont les intellectuels africains capables de dire ‘’je pense que, ‘’mon opinion est que’’ ‘’mon point de vue est que. Les autres doivent nous inspirer mais nous devons avoir notre opinion.

Dans les couples, la non-maîtrise du langage du oui et du non peut être un problème, on accepte à contrecœur des choses qui nous blessent, on subit, on souffre, on se détruit parce que, incapable de s’affirmer, d’exprimer librement notre accord ou notre désaccord.

Soyons des hommes et des femmes de pensées, humbles mais confiants et surtout aidons nos enfants à choisir entre yaourt ou chocolat, entre un pantalon et une culotte, entre une sortie avec les parents et un dessin animé. Aidons-les à choisir mais laissons-les choisir au risque qu’ils deviennent comme nous qui pensons par procuration.

Par Coach Patrick Armand POGNON

Président de l’Association des Coachs d’Afrique

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