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Le triomphe de la vérité

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Editorial:La mort des négociations


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Les négociations gouvernement-syndicats n’ont jamais été aussi mal en point. Le communiqué du Conseil des Ministres en dit long. A l’échec des pourparlers, le gouvernement répond désormais par des menaces de défalcation, signe que le bras-de-fer va prendre une nouvelle tournure. Et pourtant, les revendications des enseignants ne souffrent d’aucune ambigüité. Ils doivent bénéficier des mêmes avantages accordés à tous les agents de l’Etat. Au surplus, une décision de la Cour Constitutionnelle, la DCC 11-042 du 21 juin 201, a déjà évacué la question de la généralisation. En principe, elle ne se pose donc plus.

Mais le problème est beaucoup plus sérieux qu’il n’y paraît. Il se livre en deux questions fondamentales : le gouvernement a-t-il le droit de revenir sur un accord auquel il a explicitement souscrit ? A-t-il le droit de passer outre une décision de la Cour Constitutionnelle sans courir le risque de parjure ?

Sur la première considération, il est clair qu’aucun régime sérieux ne saurait renier sa signature, à moins de se clochardiser et de se suicider devant ses partenaires. En la matière, le régime Yayi court de sérieux risques de discrédit, et surtout de discrédit total. Il ne s’agit point ici d’une parole donnée mais bien d’un texte à valeur juridique pris en bonne et due forme par le Président de la République en personne, celui-là même que notre constitution décrit en son article 41 comme « le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité territoriale et du respect de la constitution, des traités et accords internationaux ».

Ce qui se passe donc est très dangereux pour la République tout court. La période choisie pour opérer ce coup de force à la légitimité est plutôt mal pensée. Il y a quelques jours à peine, le Chef de l’Etat en personne a procédé à la signature officielle de la charte de gouvernance pour le développement, dans laquelle les principes d’éthique et de moralité sont cités comme étant les bases du développement. On cherche en vain ces vertus dans l’acte du Chef de l’Etat mettant délibérément les enseignants hors du champ d’application du décret n°2011-505 du 5 août 2011.

A peine signée, la fameuse charte est remise en cause par son signataire même. Qui donc avait bouché la lucidité de Yayi, forcé sa main et mis en veilleuse son intelligence pour qu’il prenne ce décret qu’il renie aujourd’hui ? Non, la question revient même à se demander quels sont les autres actes présidentiels posés dans cet état second qui autorise toutes les inquiétudes.

Et c’est là où la deuxième considération trouve tout son sens. Elle s’éclaire d’un sens tout à fait républicain : à l’heure où nous sommes, rien ni personne ne protège la constitution béninoise.

Mais en restant à la surface de la surenchère juridique, l’on risque de perdre de vue les retombées immédiates de la crise actuelle. Concrètement, le Chef de l’Etat s’est engouffré lui-même dans le piège des syndicats. En acceptant d’accorder les 25% en une période de récession marquée par la rareté des ressources, il devait s’attendre à l’accentuation de la crise budgétaire.

Et c’est précisément ce qui arrive aujourd’hui. Le gouvernement est obligé d’utiliser la manière forte, face à l’impasse de sa ruse qui trouve son point d’achèvement dans les règles les plus élémentaires des finances publiques. On ne peut (et on ne doit jamais) promettre ce qu’on n’a pas.

Il faut bien voir aussi le jeu des syndicats. Ils ne sauraient faire machine arrière. Les menaces du gouvernement vont plus que jamais doper leurs bases. Ils n’auront d’autre choix que de multiplier les débrayages, ne serait-ce que pour maintenir la dragée haute face à l’ostracisme illégal dont ils sont l’objet.

En réalité, les portes de la négociation sont fermées. La conséquence immédiate serait donc l’aggravation du bras de fer et peut-être l’année blanche devenue un spectre dangereux planant sur toutes les têtes depuis quelques années. Dans le meilleur des cas, c’est le décret n°2011-505 du 5 aout 2011 lui-même qui mérite d’être rapporté…

Olivier ALLOCHEME

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