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Le triomphe de la vérité

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Editorial:La guerre des magistrats


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Si on n’en est pas encore là, on n’en est pas loin non plus. Les magistrats ont choisi d’affronter leur ministre de tutelle. Hier encore, leur syndicat, l’UNAMAB, a réclamé ni plus ni moins la démission du Garde des Sceaux, Marie-Elise Gbèdo. C’est elle en effet qui a eu le toupet de lever le lièvre de sa tanière en clamant clairement que la Maison Justice n’est pas propre, qu’elle est même proche de la porcherie la plus immonde.

Le ministre de la justice a en effet laissé entendre, à l’occasion de la célébration de la sixième édition de la journée nationale de lutte contre la corruption, que le corps de la magistrature est corrompu. C’est à peine si elle n’a pas dit que la magistrature est composée en réalité de chiens galeux, de véritables hyènes puantes qui ne feraient qu’accroitre les chiffres de la corruption au Bénin. Il y a donc quelque chose de pourri, de très pourri même dans la justice béninoise.

L’évidence même

Rappelant ceci aux acteurs, le Président de la Cour Suprême lors de la très solennelle rentrée judiciaire, n’a pas manqué de revenir récemment sur quelques affaires célèbres dont la boue n’a fait qu’éclabousser la magistrature : affaire Hamani Tidjani, affaire ICC-Services, affaire des frais de justice criminelle…Pour qui se rappelle encore ces grands déballages-là, ce furent des moments de souillure où la toge a été piétinée, salie, mise en pièces.

Marie-Elise Gbèdo croyait donc bien faire en revêtant ses habits d’avocate et de membre ardent de la société civile, lorsqu’elle a pu faire les récriminations qu’on a entendues. Mais ses admonestations auraient pu paraître authentiques si le ministre de la justice qu’elle est, n’était pas en réalité la personne la moins indiquée pour jeter la pierre aux magistrats aujourd’hui. D’autant qu’elle a les armes nécessaires pour mettre fin à la déliquescence qu’elle conspue de toutes ses forces. Parce qu’en l’espèce, nul mieux qu’elle ne peut trouver les moyens de lutter contre le phénomène.

C’est le droit que lui confère en tout cas la loi 2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature. Parler comme elle l’a fait, revient en réalité à se dédouaner de l’action que le peuple lui demande avec insistance. Que fait donc l’avocate pour laver une maison dont peu de gens ignorent encore le délabrement et la déliquescence morale ?

Incapacité à régler le problème

Il était inévitable que l’Union Nationale des Magistrats du Bénin (UNAMAB) déterre la hache de guerre pour demander la démission du Garde des Sceaux. Ses réclamations auraient pu soulever l’approbation de tous si elles concouraient à montrer clairement que la ministre elle-même est en réalité la porte d’entrée du mal au sein de la Maison Justice.

 Et que donc lutter contre la vermine qu’elle dénonce, du fait de ses attitudes sujettes à caution, ne pourrait relever que d’une simple vue de l’esprit. Ceci nous renvoie à la lettre ouverte adressée il y a quelques semaines par Ismaël Tidjani-Serpos au Président de la Cour suprême et à d’autres acteurs du Conseil supérieur de la magistrature, correspondance dans laquelle l’ancien député et ancien ministre de la justice lève un (fâcheux) coin de voile sur les dernières nominations opérées par l’actuel Garde des Sceaux.

 Certains magistrats, salis antérieurement dans de sombres affaires, ont été remis en scelle, promus par la ministre qui a ainsi trouvé le moyen d’élever le vice pour mieux tordre le cou à la vertu qu’elle vient réclamer à haute voix devant les médias. Que n’a-t-elle trouvé en ces promotions, sinon l’occasion d’en débarrasser la partie la plus impure de la magistrature, du moins le moment tant rêvé pour asseoir définitivement la vertu au fronton de nos cours et tribunaux.

 Les récriminations qui pleuvent d’un ancien magistrat de la trempe d’Ismaël Tidjani-Serpos, comme de l’UNAMAB, ne sont que la preuve palpable que Marie-Elise Gbèdo qui veut faire la leçon aux autres est loin du modèle souhaité.

Prime à la dérive déontologique, perte de mémoire de l’autorité de nomination ou collusion avec des magistrats, tels étaient les griefs de l’ancien député contre la ministre et le Conseil Supérieur de la Magistrature. La question se pose maintenant de savoir s’il ne faut pas ajouter à cette liste bien sombre une certaine incapacité.

Olivier ALLOCHEME

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