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Le triomphe de la vérité

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EDITORIAL:Usage et mésusage


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C’est probablement de pagaille qu’il s’agit. Pagaille parce que les douaniers béninois ont fini par croire que la seule arme des travailleurs est la grève. Ils en multiplient à profusion depuis le début de l’année, au point d’en faire une banalité. L’exception est devenue la règle. Pour tout et rien, les (faux) disciples de Saint Mathieu prennent le pays en otage, (in)conscients qu’ils sont du poids qu’ils représentent pour l’économie béninoise.

Sont-ils vraiment conscients de ce qu’ils font aux étudiants qui n’ont que leurs allocations pour survivre ou aux communautés villageoises qui ont besoin d’eau potable ou encore aux écoles qui ont besoin de matériels didactiques ? Car pour que l’Etat joue son rôle, il lui faut des ressources fournies par toutes les régies financières dont la douane est un des maillons les plus importants.

Lorsqu’elle rue à intervalles réguliers dans les brancards, comme elle le fait, la douane ne fait de mal ni à Yayi, ni à ses ministres. Elle le fait contre les villages, elle le fait contre les élèves et les étudiants, elle le fait contre le réaménagement des routes… Le Bénin n’a pas d’argent sur un arbre. Il ne peut se construire que du fruit du travail de tous.

L’attitude incompréhensible des douaniers se révèle encore plus singulière lorsque l’on s’attarde sur le mouvement qu’ils projettent pour demain. Ils s’en vont en grève contre une proposition de loi sur les personnels militaires et paramilitaire, proposition portée par des députés, élus du peuple. Ils dénient à ceux-ci le droit d’exercer un mandat venant du peuple, celui de légiférer. Ils vont en grève contre des députés qui n’ont fait que le travail pour lequel ils ont été élus.

 Pour le moment, la proposition de loi n’est pas encore votée à l’assemblée, et déjà ils vont en grève contre le parlement. Après le curieux mouvement organisé pour protester contre la rixe ayant opposé un des leurs à un militaire au port, le débrayage de demain est presque un procès en sorcellerie fait aux députés. Et la machine étant lancée, rien ne pourra l’arrêter. Le goût du débrayage prend ici des allures de revanche sur les contraintes du travail. Le travail…nos douaniers veulent-ils encore travailler ?

Question paradoxale mais question primordiale dans un environnement où le droit de grève a été vidé de son sens pour n’être plus que la latitude que l’on se donne de conspuer le bon sens en toute liberté. La parade trouvée par les députés de la mouvance pour arrêter ce carrousel vertigineux est une forme de désespoir face à l’usage abusif d’un droit permettant à tout travailleur de se faire entendre dans les moments les plus critiques, quand il estime qu’il a épuisé tous les autres moyens de recours.

 Mais ici, les douaniers réclament une liberté absolue qui n’est pas accordée aux autres corps paramilitaires. Comme les gendarmes et les policiers, ils constituent un corps en armes dont l’Etat se doit d’encadrer strictement les mécontentements. Accorder aux douaniers un droit de grève intégral et l’on se voit obligé d’en faire autant pour les gendarmes, les agents des eaux et forêts et les policiers qui sont aussi des corps paramilitaires.

 Or, les gendarmes par exemple subissent pratiquement la même formation militaire que les militaires ordinaires. Au point qu’aucun gendarme ne peut être valablement élevé au grade de général s’il n’a fait une école de guerre. Il est très risqué d’accorder un droit de grève intégral à un tel fonctionnaire, sans faire périr la cité. Dans le même corps paramilitaire que ceux-ci, les douaniers ne peuvent réclamer à être traités comme les simples civils alors qu’ils portent l’uniforme militaire, ont une formation militaire et portent des armes comme tous les corps paramilitaires.

Au surplus, il ne peut en être autrement, lorsqu’on sait que tout fonctionnaire de douane est une cible potentielle pour les contrebandiers parfois armés et dangereux. Ce sont les gendarmes de nos frontières et plus prosaïquement, les policiers de notre économie qu’ils sont chargés de protéger.

L’Etat a le devoir de protéger les citoyens contre de telles dérives qui fragilisent l’économie nationale. Et laisser perdurer une telle chienlit sans réagir serait ouvrir un boulevard au désordre.

Olivier ALLOCHEME

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