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Le triomphe de la vérité

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EDITORIAL:La grève de trop


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La panique s’est réellement installée. Le débrayage organisé cette semaine par les douaniers béninois aura été un véritable coup dur pour l’économie béninoise. Ce n’est donc pas par hasard si les autorités au plus haut niveau se sont mobilisées pour calmer les ardeurs des grévistes mécontents.

Quoi que l’on dise en effet, le contexte économique du Bénin reste marqué par l’aggravation des contreperformances et l’accumulation des signaux négatifs. Les contreperformances des régies financières, et notamment de la douane, avaient déjà occasionné des sorties plaintives du ministre des finances qui a fait le tour des postes frontières pour sensibiliser ses collaborateurs quant à l’impératif d’une amélioration significative de leurs résultats.

Les fossés se sont creusées au fil des mois entre les prévisions et les réalisations du fait de la conjoncture économique nationale mais aussi des débrayages successifs qui pèsent sur l’administration des finances en général et celle des douanes en particulier depuis l’année dernière.

Le cercle infernal de ces débrayages a été aggravé par l’affaire Dangnivo. Pendant huit mois environs, de septembre 2010 à avril 2011, tous les agents du ministère des finances ont mené une action syndicale tout à fait inédite au Bénin : forcer le gouvernement à retrouver leur collègue disparu. Mais l’affaire Dangnivo, malgré toutes les grèves perlées qu’elle a engendrées, n’a pas permis de satisfaire cette curieuse doléance des travailleurs. Elle aura été de toute façon un épisode bien malheureux dans la modernisation de l’administration publique béninoise. Quant aux recettes nationales…

Mais il ne faut pas y mettre toute la charge des contreperformances enregistrées jusqu’ici. Il y a certainement aussi la situation politique nationale, qui influence le climat des investissements. Dans nos fragiles démocraties, les élections sont des moments d’incertitude et de peur qui déteignent sur le climat des affaires. Elles inhibent les ardeurs des investisseurs, locaux ou étrangers et ralentissent l’activité économique.

La période électorale reste surtout marquée par toutes les dépenses qu’elle occasionne alors que les recettes stagnent ou baissent carrément. Avec la crise des inondations et l’affaire ICC, ceci explique les piètres performances de l’économie béninoise pointées du doigt l’année dernière par le FMI. Le Bénin avait été classé au rang des pires économies en cette année 2010.

En 2011 encore, les mêmes frayeurs s’accentuent. Les débrayages successifs ne s’arrêtent pas, occasionnant des pertes sèches aux finances publiques. Nul ne peut dire avec précision l’ampleur des manques-à-gagner. Sauf à constater qu’une seule journée non travaillée, c’est des dizaines de tonnes de marchandises qui ne sont pas dédouanées, c’est aussi du temps perdu aux opérateurs économiques, augmentant du même coup les frais journaliers de stationnement immédiatement répercutés sur les prix aux consommateurs. Sans compter que ce sont de nombreuses entreprises qui s’en trouvent bloquées dans la célérité de leurs activités. Dans un monde de rude concurrence, ces pertes de temps sont parfois impardonnables.

A y voir de près, la grève de cette semaine entre dans la liste déjà longue des débrayages les plus curieux qui frappent l’administration publique béninoise depuis quelques années. Pour obtenir réparation, les douaniers ont pu arracher un communiqué radiotélévisé signé des ministres de la défense et de l’intérieur, en vue de calmer leur courroux et leurs frustrations.

Pour deux douaniers violentés par leurs collègues militaires et un autre ayant échappé, comme d’autres, à des trafiquants furieux, la grève des disciples de St Mathieu vient jeter une nouvelle zone d’ombre sur l’atteinte des objectifs qu’ils se sont fixés en début d’année dans le cadre de la mobilisation des ressources de l’Etat. Ils ne les atteindront certainement pas. Le niveau d’exécution du budget 2011 sera certainement en-dessous des 30% environ enregistrés l’année dernière.

La mise en place d’un collectif budgétaire déguisé au sein des ministères, montre que ces menaces pèsent de plus en plus lourdement sur les finances publiques, sans que les solutions trouvées jusqu’ici ne puissent réellement prospérer. La croissance économique prévue (environ 3%), bien qu’étant déjà parmi les plus faibles du continent africain, ne sera certainement pas atteinte. En un mot, comme en mille, la grève des douaniers est une plaie béante sur l’économie béninoise.

Olivier ALLOCHEME

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