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Le triomphe de la vérité

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Interview avec Laurent Mètognon, Secrétaire général de la Fesyntra-Finances:« Je dis haut et fort que le gouvernement est capable de prendre en charge les 26 ministères»


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Laurent Mètognon, «La Cour en déclarant le Décret contraire à la Constitution n’a pas dit de l’abroger»

Le Bénin traverse une situation de crise sociale qui n’augure pas un lendemain meilleur pour le secteur publique. Ainsi faisant le point des différentes négociations engagées avec une commission gouvernementale, Laurent Mètongnon dénonce la façon dont les négociations sont actuellement conduites. Pour lui, aucune proposition n’est jusqu’à ce jour faite par le gouvernement malgré les efforts des travailleurs à sacrifier deux de leurs primes. Fort de son titre de Secrétaire général de la Fédération des syndicats des travailleurs du ministère des finances (Fesyntra-Finances) il pense que le gouvernement dispose des ressources financières pour faire face aux charges. Selon lui, après 51 ans d’indépendance, le Bénin est assez autonome pour décider du traitement à faire de ses travailleurs.

L’Evénement Précis: Depuis deux semaines, vous participez à des négociations sur l’amélioration de la situation salariale des travailleurs du secteur publique. A ce jour que pouvons-nous retenir ?

Laurent Mètongnon: Ce que le peuple béninois peut retenir est que du côté des travailleurs, on sent quand même une certaine volonté de sortie de crise. Cette volonté également d’une façon aussi générale se fait sentir du côté du gouvernement. Mais pourquoi nous n’accordons pas les violons. C’est juste parce que le gouvernement me semble t-il, fait du dilatoire puisque les premiers jours de notre négociation, lorsqu’il a été mis en place un comité pour réfléchir sur les voies d’une sortie de crise, les travailleurs ont consenti quand même à des sacrifices et il revenait au gouvernement de proposer quelque chose.

Les travailleurs à un moment ont dit qu’ils vont sacrifier deux primes que perçoivent tous les travailleurs tout en signifiant qu’à ce stade des négociations, il faut dire que les travailleurs peuvent ne pas être d’accord parce que le montant des deux primes avoisine cinq milliards et demi. Le gouvernement estimait que pour donner tout de suite le point de valorisation de 0,25 à tous les travailleurs, cela faisait une bagatelle somme de 14 milliards de fcfa.

De cette somme, le gouvernement est passé à 16 milliards de fcfa et a demandé qu’à leur niveau que les chiffres soient revus car les chiffres du gouvernement ont été critiqués par les travailleurs parce qu’ils n’arrivaient pas à comprendre comment ces chiffres étaient donnés, en plus, le réel contenu de la masse salariale. Le lendemain lorsque le gouvernement est revenu, logiquement on attendait auprès de lui qu’il accepte le sacrifice fait par les travailleurs pour compléter leurs propositions. Donc les propositions devraient venir du gouvernement pour dire qu’il accorde 1,25 ou 0,25 sur les salaires ou rien.

Mais les débats ont repris tout comme le premier jour. C’est ça déjà l’enlisement puisque le gouvernement ne sortait que des chiffres de 14 milliards de fcfa. On n’est passé à 16 milliards de fcfa et de cette somme on est passé à 22 milliards 500 millions de fcfa. Du côté gouvernement, les travailleurs devront entendre qu’avec ce montant, on ne peut rien. Le gouvernement lui-même estime que les deux primes qu’on devrait supprimer posaient problème.

Donc le dilatoire a continué. A ce stade, il faut dire que de façon constante, le Premier ministre qui avait la police des débats visiblement ne voulait pas prendre une décision sinon ne voulait pas que l’on perçoive clairement l’idée du gouvernement et s’en remettait toujours à un compte rendu au gouvernement. Ceci se comprend parce qu’actuellement, il est le bouc émissaire.

Bouc émissaire parce que d’aucun estime que les négociations qu’il a pu conduire de façon très magistrale et ayant pris en compte la réalité du temps, d’aucun pensait que c’est lui qui a jeté de la merde en accordant l’augmentation de 0,25% aux travailleurs du ministère des finances.

Ne pensez-vous pas que ces fonctionnaires des autres ministères ont raison ?

Ils n’ont aucune raison pour n’avoir pas vécu les conditions dans lesquelles les négociations ont eu lieu avec les secrétaires généraux en Avril 2011. Et ceux-là n’avaient pas le bon sens qu’il fallait accorder à une situation qui non seulement perdurait mais mettrait en mal l’économie de notre pays. Il y a avait une seule décision à prendre. Fallait-il laisser tout le pays couler, aller en cessation de payement ?

Si la grève dépassait le mois d’avril, la possibilité que l’on n’est plus de ressources pour faire face aux dépenses de fonctionnement était claire. C’est pour ça que je dis que les négociations qui ont eu lieu en avril 2011 sous la houlette du ministre d’Etat, Pascal Koupaki étaient les meilleures négociations gouvernement-syndicats. Donc lorsque les débats ont repris, visiblement, on voyait le premier ministre gêné parce que lors des négociations dernières, c’était bien dire qu’on ne pouvait pas donner à tout le monde en 2011, l’augmentation de 0,25, qu’il fallait pour régler une situation donnée aux travailleurs des finances et l’étendre à tous les autres secteurs de façon progressive à partie de 2012.

C’est là ce que nos amis de la Cosynap n’ont pas voulu comprendre ou du moins ne se sont pas rapprochés de leurs chefs fédéraux pour pouvoir mieux assimiler le contenu réel du relevé des conclusions, d’où leur qualificatif de discriminatoire. D’abord c’est le ministère des finances qui a posé le problème et en le faisant a pris en compte les autres secteurs en prenant l’engagement de mobiliser plus de ressources. Donc la discrimination n’existait plus dès lors qu’en ouvrant cette porte, on permettait aussi aux autres travailleurs d’en bénéficier comme les professeurs d’universités et même des magistrats.

Lorsque le problème s’est posé à leur niveau, c’était discriminatoire mais ils savaient que telles que les choses s’étaient passées, la porte était ouverte pour que tout le monde l’ait. Donc le 1er ministre était véritablement embêté. Faillait-il aller dans le sens des travailleurs pour se voir auprès de ses pairs et même du Président de la République, désavoué ? Puisque dans la situation actuelle, il se voit critiquer par même les signataires du décret de l’augmentation aux travailleurs.

Donc dans sa conclusion, il ne laissait pas entrevoir la perspective logique qu’il fallait avoir même quand on suit le raisonnement du gouvernement. Ce qui a fait que pour conclure, il revenait aux travailleurs réunis au sein de la Cosynap de formuler concrètement ce qu’ils veulent au vu des débats. C’est là où il y a eu la catastrophe car à ce niveau l’inexpérience de négociations de ces secrétaires réunis au sein de la Cosynap et le mépris de leurs responsables syndicaux au niveau des centrales ont fait qu’on s’est séparé dos-à-dos le vendredi dernier.

Il faut dire que les secrétaires généraux leur ont donné la possibilité eux-mêmes d’exprimer leurs doléances parce que ne voulant pas décider à leur place. Comme c’était eux les acteurs du mouvement, ils ne pouvaient pas demander de cesser le mouvement pour dire à leur place ce qu’ils voulaient. Or, la proposition qu’il faillait, existait. C’était de rétablir le ministère de l’économie et des finances pour montrer que leur mouvement n’était pas fait pour qu’on supprime ce qui avait été accordé aux travailleurs du ministère des finances. Du coup, voir la progressivité à eux et le contenu de cette progressivité.

Ils ont laissé cette proposition à une troisième personne qui devrait intervenir. Or les deux premiers qui sont intervenues, sont hors sujet et ont vraiment fait capoter la séance. Je crois que la séance va reprendre parce qu’ils ont pris conscience de ça et ils savent que si les choses doivent pouvoir aller, dans un premier temps, contrairement à ce qu’ils disent, ils devraient féliciter leurs secrétaires généraux des centrales et fédérations qui avaient fait une bonne négociation en avril 2011.

Je leur ai conseillé d’aller d’abord se faire excuser auprès de ces derniers car à la limite, les propos qu’ils ont tenus n’étaient pas des propos à tenir devant le gouvernement. Même si les gens veulent aller créer une centrale, ils sont libres de le faire. Mais devant l’employeur, les employés ne tiennent pas les langages qu’ils ont tenus ce jour-là. Ils reviendront avec de nouvelles propositions.

Alors en tant que fonctionnaires du ministère des finances, pensez-vous que le gouvernement est vraiment capable de satisfaire les travailleurs des 26 ministères ?

Je dis haut et fort que le gouvernement n’est pas incapable de prendre en charge les 26 ministères puisqu’en avril 2011 quand on discutait, l’intégration de ces dépenses dans le cadre des dépenses à coût et à moyens termes avaient déjà été entrevus. Tout est politique et je continue de dire que l’investissement le plus important dans la vie est le capital humain.

Tant que l’homme ne sera pas valorisé on ne peut rien faire. Soit on amène les travailleurs à être les plus corrompus en ne leur donnant pas le minimum qu’il faut. Et le peuple béninois doit savoir que le fonctionnaire béninois le mieux payé dans l’administration béninoise, c’est-à-dire qui a fini 25 ans ou 30 ans de service est à moins de 500 euros ce qui équivaut à 325.000 de fcfa. Or les bailleurs de fonds disent qu’ils n’ont jamais imposé à un gouvernement souverain d’avoir une limite pour la barre salariale.

 Ils n’ont jamais dit cela. Même quand ils réclament l’équilibre financier, ils savent ce qu’ils y mettent. Nous avons démontré au gouvernement que le budget de fonctionnement de notre pays est si opaque que tout ce qu’on nous dire à travers ce budget de fonctionnement n’est pas vrai et que notre gouvernement souverain 51 ans après n’a pas besoin d’aller demander l’autorisation aux bailleurs de fonds ou aux partenaires techniques et financiers pour fonctionner ou payer ses travailleurs. Là, on l’a signifié à ces partenaires. Donc le gouvernement est bien capable même dans l’esprit de la progressivité. Mais il se cache sous les partenaires économiques pour intervenir.

Quelle est la position actuelle de la Fesyntra face à la décision de la Cour constitutionnelle ?

Notre position est claire. Et comme je l’ai dit, ce n’est pas des sages qui ont pris cette décision. La sagesse a prévalu beaucoup plus lors des négociations d’avril dernier. Et si je comprends bien la Cour en déclarant le Décret contraire à la constitution n’a pas dit de l’abroger. C’est le gouvernement qui s’est précipité de l’abroger et jusqu’à l’heure où je vous accorde cette interview, on n’a pas encore le décret.

 Donc, tout ce qui se fait aujourd’hui concernant la faisabilité du salaire du mois de juillet des travailleurs du ministère des finances sur la base et qui ne contiendrait pas le point d’augmentation de 0,25, est illégale au vu des textes qui régissent les finances publiques. Car il n’y a aucun document qui permet de revenir à la situation d’avant la signature du premier décret. Donc voilà comment on gère le pays de façon verbale où un communiqué qui passe à la radio est déjà un support qu’on peut brandir.

Entretien réalisé par

Emmanuel GBETO

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