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Le triomphe de la vérité

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Editorial : Comme un coup d’épée dans l’eau


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Les députés ont visiblement choisi d’affronter la Cour Constitutionnelle. Le vote de lundi est une manière de défi vis-à-vis des dernières décisions de la Haute Juridiction sur la loi électorale. C’est par un coup de balai instantané que la Cour a congédié les récentes lois électorales en faisant presque injonction aux représentants du peuple de ne pas toucher à la Lépi considérée comme le seul outil électoral fiable des prochaines consultations. Mais le Parlement n’entend pas démordre. Il maintient l’idée d’une « liste électorale ad’hoc » en remplacement de la « liste électorale informatisée sécurisée » proposée dans l’ancienne loi et cassée justement par la Cour dans une décision précédente. La stratégie de la majorité parlementaire est donc claire : imposer l’utilisation des listes manuelles pour 2011 en évitant coûte que coûte    la Lépi. Au passage, la situation actuelle servirait à noircir davantage la Cour vue comme « la Cour de Yayi et de Dossou. »  

Dans le même temps, les députés n’ont pas manqué de reconduire d’anciennes dispositions refusées par la Cour. Il s’agit  notamment de la composition de la CENA qont neuf membres sur onze sont désignés par le parlement, malgré les injonctions faites par les sept sages dans une décision antérieure. On en arrive en réalité au contrôle de la CENA par l’opposition, alors que la position de la Cour préconise un équilibre qui va justement en faveur à l’exécutif. Au cours de tous ces calculs tout à fait légitimes au regard de l’atmosphère délétère de cette période électorale, les parlementaires se sont peu souciés de respecter les dernières décisions qui exigeaient une répartition  sinon égale du moins équitable des sièges entre l’Assemblée et l’exécutif. En s’octroyant neuf membres sur onze, l’Assemblée est dans une velléité de contrôle qu’elle dénie à juste titre au gouvernement. Elle s’autorise un monopole qu’elle refuse au Chef de l’Etat. Et il est presque certain que la Cour cassera à nouveau cette forme de mise en conformité qui n‘est  rien d’autre qu’une résistance à la Haute Juridiction. A moins d’admettre que ses positions devraient évoluer, la Cour ne ferait rien d’autre que de se conformer à ses décisions antérieures. Elle balaiera une fois de plus la formule de contournement de la Lépi par une liste ad’ hoc.  Ce faisant, elle finirait par renvoyer la balle dans le camp des députés.  Que se passera-t-il alors ? Si le pingpong a réellement lieu comme on peut s’y attendre, la stratégie de l’affrontement ne ferait que retarder la mise en place effective des institutions électorales, notamment la CENA. Les allers-retours de la loi entre le parlement et la Cour d’une part et entre l’Assemblée et la présidence d’autre part, risquent de ne connaître leur épilogue que début janvier, dans le meilleur des cas. Et c’est alors seulement que les tractations pour la composition de la CENA pourraient se conclure. Et alors seulement que 2011 n’aura pas le visage hideux que le tour de passe-passe législatif lui prépare. Mais de la coupe aux lèvres, il y a bien un fossé, un énorme fossé qui se creuse de jour en jour.

Les acteurs politiques qui jouent à nous faire peur franchissent ainsi pas à pas les étapes de la contestation inéluctable du vote de l’année prochaine. A ce train en effet, l’opposition ne pourrait pas admettre une liste électorale générée depuis les bases de données de la Lépi. Elle exigerait simplement la mise en place des listes manuelles, ce que la mouvance n’acceptera  pas. Celle-ci pourrait s’accrocher à la seule Lépi, ou, à tout le moins, à une liste générée par les récents recensements. Le tiraillement ne pourrait se résoudre qu’avec les bons offices d’une autorité morale suffisamment représentative. Et c’est le chaînon manquant de la vie politique nationale. Comme naguère en Côte-d’Ivoire…

  Le bras de fer que la majorité parlementaire entend instaurer débouchera ainsi sur une impasse dont on aperçoit  difficilement l’issue. Le vote de lundi apparaît dès lors comme une stratégie d’affrontement marquant le triomphe de l’aile jusqu’au-boutiste de l’opposition. La mouvance quant à elle, en minorité  et malmenée par les vicissitudes du pouvoir, se retrouve dans ses petits souliers, écrasée par la stratégie de la terre brûlée mise en branle  par l’opposition.  

Olivier ALLOCHEME

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