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Le triomphe de la vérité

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Editorial: La fin de la faim ?


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A l’allure où vont les choses, le Bénin peut devenir d’ici peu une puissance agricole. Le bilan de la dernière campagne agricole a montré une montée en flèche de la production céréalière. Le Bénin a produit lors de la campagne dernière environ 1200 000 tonnes de maïs, un record. Assez en tout cas, pour nourrir la population béninoise et pour constituer des réserves à moyen terme. Il y en a même assez pour exporter le surplus vers les pays de l’hinterland. Quant au riz paddy, le Bénin en a produit 150 000 tonnes en 2009-2010. L’excédent de maïs dégagé est évalué à 350 000 tonnes environs et une bonne partie a déjà été exportée vers le Niger, le Burkina Faso et le Mali. Cette embellie a été rendue possible par la mise en place en 2008 du Programme d’urgence d’appui à la sécurité alimentaire (PUASA) et du programme spécial d’insertion des jeunes dans l’agriculture (PSIJA). Ce sont des milliers de jeunes qui ont été appuyés pour faire face à la crise alimentaire d’alors et qui ont bénéficié d’un suivi effectif. Célébrons alors tout ce qui a été mis en place par l’Etat pour offrir une chance à notre agriculture qui, en dépit des nombreuses professions de foi, n’est pas encore chez nous un vecteur de développement mais un signe de sous-développement.

        Jadis, le Bénin jetait par la fenêtre des dizaines de milliards dans la filière coton. Dans la période 2006-2010 seule, environ 50 milliards de FCFA ont été injectés dans cette filière. Pour des miettes. En dehors des fluctuations des prix sur le  marché international, le secteur souffre d’une forte politisation enclenchée depuis 1996, depuis que l’avènement du président Kérékou a permis à un ministre de l’agriculture de faire monter les prix du kilogramme de coton à l’achat, sans que cela ne reflète les réalités du marché. Depuis lors, le coton est devenu un investissement politique.  Et pourtant, selon la Banque Mondiale, le coton a représenté entre 50 et 80% des exportations béninoises, soit environ 10 à 15% du PIB du pays. De sorte que malgré les investissements massifs qui y sont faits, sa production ne cesse de dégringoler. Parce que les facteurs de production (engrais, insecticides, etc) sont de plus en plus chers. Ils constituent une sérieuse menace à l’environnement, polluant les eaux de boisson par-ci, détruisant les sols par là. A l’heure où le coton biologique prend son envol au Burkina et au Mali, le Bénin maintient ces produits phytosanitaires chèrement payés, du fait de l’enrichissement qu’ils procurent à une caste d’hommes d’affaires proches du pouvoir. Les mêmes méthodes utilisées par les grandes firmes agro-alimentaires à travers le monde pour empêcher des innovations nuisibles à leurs chiffres d’affaires, sont utilisées ici. Bien souvent, les commerçants d’ici sont les relais locaux de ces compagnies  internationales. Et la roue du malheur tourne. Et les réformes finissent dans l’impasse. On attend de voir si celles lancées l’année dernière par le ministre Akoffodji permettront de sauver le coton en pleine dérive. En 2008-2010, la production cotonnière n’a enregistré ne s’est élevée qu’à 210 657 tonnes, une pure déception pour le Chef de l’Etat qui en avait pourtant fait un thème structurant de sa vision de développement. Exit le coton. 

        Avec l’embellie des céréales, le Bénin pourrait ancrer désormais un nouvel espoir sur ses résultats agricoles, en quittant à petits coups le cercle infernal du coton. Cela devrait exiger des techniques culturales plus intensives, notamment le  « ré-emboisement », l’embocagement, les plantations de haies, la réalisation de terrasses, le traitement du lit des rivières, etc. Certes, ces travaux sont coûteux, mais ils représentent essentiellement de la main-d’œuvre qui est localement abondante. L’exportation des produits primaires comme base des stratégies de développement ces dernières décennies a montré ses limites. Nous entrons à petits coups dans une politique visant d’abord la satisfaction des besoins alimentaires, mais également l’exportation des vivriers. Mais il reste du chemin.

        L’Etat a consacré à peine 4,7% du budget 2010 à l’agriculture, au lieu des 10 à 15% recommandés par les normes de l’UEMOA. Il s’agit en fin de compte de faire une meilleure place au secteur agricole, notamment en réduisant la place exagérée prise par les cultures de rentes. C’est toute la politique agricole de ces dernières décennies qu’il s’agit de repenser en profondeur.

Olivier ALLOCHEME

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3 thoughts on “Editorial: La fin de la faim ?

  1. Boi Wosso

    Je pense que le Bénin gagnera mieux à penser de cette manière. Que l’oposition au lieu de chercher chaque fois à détruir ce que le pouvoir fait, dans la seule raison de chercher à se faire élire fera mieux aussi d’aider le gouvernement dans le concret du developpement du pays. Cela aide la population. Les choses comme l’agriculture et autres doivent etre la préocupation de l’opposition. On ne voit rien que l’opposition apporte concretement sur le developpement matériel du pays, ce n’est que des mots de destructions du pouvoir qui priment. Le peuple souffre et veut du concret pour améliorer sa vie quotidienne.

  2. Aden

    La surproduction n’entraine pas forcément la fin de la faim. C’est vrai que une fois rassasier, l’homme peut réfléchir.
    Aujourd’hui, on ne parle presque plus des agriculteurs soviétiques. En revanche la France reste et demeure pays producteur du vin.
    En matière d’agriculture, on doit savoir jouer sur la météo. L’importation des produits est à mon avis prématurée. Il faut jouer sur le terrain de la transformation qui est un véritable gage du développement. Les ingénieurs devront eux aussi se mettre au travail car la boisson à base du mile ‘’choukoutou’’ pourrait facilement concurrencer la bière ‘’la béninoise’’ avec un prix à la porté du béninois moyen. Nous devons aussi miser sur la culture du palmier susceptible du fournir la matière première de ‘’sodabi’’. La fermentation de la bouillie de maïs aussi produit de la boisson.

  3. HOUNDEGLA

    Nous ne mettons pas en doute la réalité de cette performance de l’agriculture
    béninoise, mais à quel prix !
    Quelle a été la part des intrants dans ce miracle béninois ?
    Si les intrants ne sont pas à des prix compétitifs, le coût de revient de la production des céréales ne serait-il pas excessif pour l’exploitant agricole béninois ?
    En outre, les effets néfastes des intrants à moyen terme sur la qualité productive des sols, ne doivent-ils pas nous inviter à la prudence et au principe de responsabilité proposé par Hans Jonas ?
    Le prix d’achat du maïs pour le consommateur béninois est-il à la baisse ?

    Avant de nous emballer, cher monsieur Allocheme, et de conduire vos compatriotes dans les ténèbres, essayez-vous, s’il vous plaît, à ces interrogations égrènées ci-dessus.

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