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Le triomphe de la vérité

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Entretien avec Timothée Adanlin : « Me Robert Dossou était contre la souveraineté de la conférence nationale »


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 La conférence nationale n’a pas encore livre tous ses secrets. vingt ans après l’événement, l’un de ses acteurs principaux, Timothée Adanlin, membre du présidium de la conférence, nous en dévoile un pan, et lequel ? Que Robert Dossou, président du comite préparatoire de la conférence n’était pas  favorable a la souveraineté de la conférence. et qu’elle avait bien prévu la lutte contre la corruption. Il en appelle alors a reprendre la lutte pour assainir la vie politique.

 L’Evénement Précis: Selon vous, quelles sont les raisons fondamentales qui ont poussé le Chef de l’Etat, le Général Mathieu Kérékou à convoquer une conférence nationale en Février 90, ce qui était d’ailleurs une première  même au niveau de l’Afrique ?

 Timothée Adanlin: Je crois qu’on l’a souvent dit et il faut le répéter. C’est l’essoufflement de la Révolution, l’échec à un point tel que les organes dirigeant de l’Etat révolutionnaire ont dû se réunir pour déclarer caduques toutes les lois des  institutions du PRPB. Une reconnaissance au plan institutionnel que la Révolution ne pouvait plus conduire le Bénin, la République populaire du Bénin d’antan. Mais qu’est-ce qui a amené à cela ? Ce sont les conditions économiques et financières nationales. Pendant des mois, les fonctionnaires sont restés sans salaire, l’Etat étant devenu incapable de payer les salaires. Les fonctionnaires en grève illimitée en étaient arrivés à décider que même si le gouvernement leur payait tous leurs arriérés de salaires, ils ne reprendront pas le travail. C’est dans ces conditions que le gouvernement révolutionnaire a décidé de convoquer la Conférence nationale, après s’être engagé dans un Programme d’ajustement structurel (PAS)  avec la Banque mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI).

 D’aucuns ont estimé que c’était un subterfuge utilisé par le Chef de l’Etat pour calmer les révoltes populaires et relancer plus tard sa machine. C’est votre point de vue ?

Je ne crois pas du tout qu’il s’agisse d’un subterfuge. Je pense plutôt qu’il voulait que l’on trouve ensemble une solution aux problèmes du pays. Toutefois, le Chef de l’Etat n’aurait pas été opposé, je crois, à une solution qui lui permettrait de continuer à diriger le pays.

 Vous avez révélé il y a quelques jours sur une chaîne privée que Maître Robert Dossou, comme d’autres, ne voulait pas que la conférence fût souveraine. Pourriez-vous nous repréciser davantage cette situation ?

J’ai été jusqu’à dire et ce n’est pas moi-même qui l’ai inventé, qu’il a été prévu un débat contradictoire sur l’Ortb pour savoir si la souveraineté de la conférence est concevable. Et j’ai précisé que c’est le Professeur Holo qui était du côté de ceux qui pensaient qu’on pouvait défendre la souveraineté de la conférence nationale et Me Robert Dossou était celui qui devrait montrer que ce n’est pas défendable. Me Robert Dossou était, je crois, le porte-parole du comité préparatoire de la conférence et d’une tendance importante du pouvoir révolutionnaire.

 Comment est-ce que cela s’explique  qu’on organise un événement de cette envergure et en même temps qu’on lui dénie un certain pouvoir de décision ?

Ce n’est pas de  dénier un pouvoir de décision à la conférence nationale qu’il s’agit. Il s’agissait de voir si les décisions de la conférence seraient  immédiatement exécutoires, c’est-à-dire sans devoir être soumises à une appréciation du pouvoir révolutionnaire.

 Pensez-vous  que le Chef de l’Etat a été donc contraint à accepter et à faire appliquer les décisions de la conférence ?

Contraint, non ! Ou il accepte ou il n’accepte pas les décisions de la conférence nationale. Et il a accepté, rendant ses décisions immédiatement exécutoires.

 Il y avait certains officiers supérieurs de l’armée béninoise qui étaient contre cette ligne qui a été tracée. Parmi eux, il y a Martin Dohou Azonhiho.

Ce n’est pas une affaire d’Azonhiho seulement. Disons que ceux qui étaient au pouvoir ne voulaient pas quitter le pouvoir.

 Faisons un petit exercice de comparaison historique. 1960-1972, une  démocratie un peu balbutiante ; 1972-1989, une dictature qui s’installe et qui finit dans la banqueroute ;  1990-2010, le renouveau démocratique qui se poursuit. Avez-vous l’impression que cette période de  20 ans traversée a été plus porteuse d’espoir que les deux autres périodes que nous avons vécues ?

Disons qu’il n’y a rien qui soit uniquement mauvais ou bon. N’importe laquelle de ces périodes, comporte ses côtés positifs et ses côtés négatifs. Le Renouveau démocratique a eu ses côtés positifs à savoir ce que la Révolution a ôté au peuple béninois : la liberté. Liberté d’expression, liberté d’association, liberté de presse, liberté syndicale, liberté de constituer des partis politiques… La Déclaration universelle des droits de l’homme est partie intégrante de la Constitution béninoise. Sous le Renouveau démocratique, c’est parce qu’on est libre que nous avons observé tous les dérapages dont on se plaint aujourd’hui. Ces dérapages constituent les insuffisances du Renouveau démocratique.

 Vous arrive-t-il de penser à quelques insuffisances de la conférence parce que les gens estiment qu’elle ne s’est pas prononcée sur le problème de la lutte contre la corruption ?

La conférence nationale a pris une motion sur quelque chose qu’on a appelé la moralisation de la vie publique. Je dirige un parti qui depuis sa naissance a dit qu’il faut lutter pour la moralisation de la vie politique. C’est  notre moralisation de la vie politique que nous sommes allés défendre à la conférence nationale et la conférence l’a élargi à la vie publique. A partir de là, tout ce qui concerne la mauvaise gestion, la mauvaise gouvernance, la corruption, etc. tout est contenu dans la moralisation de la vie publique. Parce que dans cette motion il est dit  que le pouvoir doit être « réorienté de manière à assurer une fonction de service pour le bien commun. Les détenteurs du pouvoir devront se sentir désormais en mission et exercer leurs responsabilités de façon compétente et dans la plus stricte transparence ».  On ne peut donc pas dire que la conférence ne s’est pas prononcée sur la problématique de la corruption.

 S’il vous était donné de conclure cet entretien ?

L’entretien, je le conclus sur ce dernier sujet parce que sous le Prpb, le parti politique que je dirige, l’UDFP,  a dénoncé des abus de pouvoir et la corruption et opté pour la moralisation de la vie politique. Je pense que dans la liberté que nous avons eu sous le Renouveau Démocratique, on n’a pas pu prendre les mesures coercitives et les sanctions nécessaires pour combattre la corruption, les délits et les crimes économiques et politiques. Les serments des membres de nos différentes CENA n’ont servi à rien par exemple. La conséquence, c’est la catastrophe des dernières élections municipales, communales et locales dont le contentieux nous amène à des reprises des élections jusqu’à ces derniers jours.  Je considère donc, et c’est la position de mon parti, que nous n’avancerons pas tant que nous n’allons pas respecter les normes de la moralisation de la vie publique, tant que nous n’allons pas mettre en œuvre les mesures nécessaires pour sanctionner les manquements aux normes de la moralisation de la vie publique. Il s’agit de rompre désormais avec l’impunité surtout en politique.

 Entretien réalisé par Donatien GBAGUIDI

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