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Le triomphe de la vérité

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Editorial: La balade présidentielle


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Le populisme revient au galop. On avait pourtant cru que les bains de foule improvisés et les coups de théâtre avaient cessé sous le régime Yayi. Mais apparemment, le Chef de l’Etat n’a pris une pause que pour mieux relancer sa machine populiste huilée dès 2006. Dès le début de son quinquennat, il a fait penser à tous qu’un nouveau style de gouvernement plus proche des préoccupations du peuple est apparu. D’où les promenades inopinées, les apparitions subites dans les services et les administrations, les visites de chantier, et ce long marathon opéré à travers la ville de Porto-Novo. On se souviendra comme si c’était hier de sa descente dans les eaux au plus fort des inondations en 2007, bottes aux pieds sous les flashs des photographes et le ronron des cameramen. On parla de gouvernance-spectacle.

Le style populiste revient donc avec force avec les dernières sorties,  sous les espèces d’un jogging hors des murs de la résidence présidentielle. L’occasion de saluer la vendeuse de bouillie ou l’infirmière de garde du CNHU, Boni Yayi aura réussi à attirer une fois de plus les projecteurs de l’actualité sur ses faits et gestes lors de cette randonnée. Déjà mardi, il était apparu tout seul au volant de sa voiture au marché à Parakou, riant et devisant avec les bonnes dames qui, à Parakou comme à Cotonou, ont crié à tue-tête ” Yayi , dix ans ! ” A Cotonou, c’est surtout les zémidjans qui lui ont donné le change en faisant le hourrah pour ses dix ans. Voilà l’homme, simple et proche des humbles, humble et proche des pauvres, des gens de rien du tout qu’il cherche à servir. Président et au service de tous et surtout de ceux qui souffrent. D’où cette intermède au niveau du CNHU. D’où aussi cette virée inopinée à Agbangninzoun, commune FCBE malgré la prégnance du bloc Force Clé-RB. Après la tornade, Boni Yayi s’y est précipité avant tout le monde pour y dire sa compassion et faire des promesses. Les populations y ont vu un signe de proximité et une hauteur d’esprit ineffables. Le comble de la magnanimité. Mais il ne faut pas évacuer l’idée qu’il s’agit d’un fin calcul électoral sur les terres de l’opposition arrachées et conservées en dépit de tout. Ce geste d’amitié et de compassion, même s’il n’est accompagné d’aucune action immédiate, est déjà vu par les populations de cette commune oubliée comme une preuve de grandeur. Faut-il encore citer la dernière visite à la famille du révérend pasteur Agbaossi décédé il y a seulement quelques semaines ? Elle prouve que Yayi aura gardé malgré tout, l’étoffe d’un homme du peuple, un président des pauvres et des humbles.

Seulement voilà, la grande manœuvre communicationnelle qui se cache derrière ces footings, n’échappe à personne. Il y a là trop de Sarkozy pour qu’on n’y voie pas une volonté de se replacer dans le cœur des Béninois après les turpitudes de l’image présidentielle. Malmené par l’opposition et en bute à une fronde sociale qui ne cesse de se rallumer, Boni Yayi avait besoin d’une bouffée d’air. Sa trouvaille intervient pourtant au cœur de la crise sur la Lépi et des menaces de grève qui pleuvent dans la fonction publique. Au moment où ses ministres sont à la tâche sur ces différents fronts, il s’octroie une récréation hors des enceintes de la présidence, sans craindre les sarcasmes de l’opposition. On peut y voir une volonté délibérée de briser la noire grisaille des jours qui se passent en affrontements divers, au point de paraître traqué aux yeux de tous. L’image d’un président aux abois disparaît pour laisser place à un homme heureux qui a encore du temps à consacrer aux autres, du temps aux plus petits, du temps aux souffrants.

Ce populisme du petit geste, plus que celui des promesses à l’emporte-pièce, garde une incalculable hauteur.  Mais dans les faits, je ne doute pas un seul instant que le capital d’intérêt qu’il suscite va bientôt s’estomper, tué dans l’œuf par lui-même. Yayi a l’art de défaire son image et nul ne doutera qu’il sèmera un nouveau gâchis par maladresse et par excès de communication. Voilà le piège dans lequel il tombe presque toujours, à force de chercher l’onction populaire  dans la rue. 

 Olivier ALLOCHEME

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