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Le triomphe de la vérité

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Edito: Pour la Côte-d’Ivoire


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logo journalAlassane Ouattara avait promis aux rebelles des Forces républicaines de Côte-d’Ivoire (FRCI) une somme de 5 millions de FCFA chacun en plus d’une villa clé en main d’une valeur de 7 millions, si jamais ils gagnaient la guerre contre son ennemi juré, Laurent Gbagbo. Alléchés par l’odeur du CFA, des milliers de jeunes s’étaient engagés dans la lutte. Tant et si bien que le 11 avril 2011, Laurent Gbagbo a été capturé vivant par les rebelles.   Mais six ans plus tard, de CFA, point, encore moins de villa.
Quelque 8500 d’entre les ex-rebelles ont bien été recrutés dans l’armée régulière. Mais une promesse reste une promesse. En novembre 2014, une première mutinerie s’allume à Bouaké. Après le silence des armes, les hommes n’obtiennent toujours rien jusqu’à ce 06 janvier 21017 où ils se soulèvent à Bouaké, Abidjan et ailleurs. L’accord conclu le 14 janvier souligne l’engagement du pouvoir à leur accorder tout au moins 5 millions sur les 12 millions que l’Etat leur doit en tout. Pour satisfaire toutes leurs revendications, il ne faut pas moins de 100 milliards de FCFA. Sur France 24, Antoine Glaser, fondateur du sulfureux magazine La Lettre du Continent, laisse entendre que Ouattara a tenté d’obtenir la protection de la France à travers le bataillon français stationné à Port Bouët. En vain. Le chef de l’Etat ivoirien craint en effet une explosion sociale qui est précisément en train de se mettre en route à la suite de la satisfaction des revendications des mutins.
Ce lundi, les cinq millions ayant été payés aux ex-rebelles, les autres catégories des forces armées ont commencé à grogner.   Mardi, des soldats de la caserne militaire de Zambakro (15 km à l’Ouest de Yamoussoukro) ont occupé la voie principale de Yamoussoukro, en tirant en l’air, obligeant les commerces à baisser les rideaux et les populations à se terrer.   La fièvre de la capitale administrative touche également Abidjan et Bouaké où des tirs ont été aussi entendus dans la journée de ce mardi. A l’état-major général, c’est un vent de panique qui s’est emparé des hauts gradés. Personne n’exclut plus rien désormais.
Car, au même moment que les soldats, les fonctionnaires menacent d’aller en grève. Ils réclament « justice ». La  réforme des retraites   baisse les pensions de 30 à 50% et  fait passer l’âge de la retraite de 55 à 60 ans, voire 65 ans. A cela s’ajoutent les cotisations qui augmentent de 6 à 8,33% du salaire, alors que les pensions ont été réduites de 30 à 50% selon les catégories. A juste titre les fonctionnaires exigent son annulation et le paiement des arriérés des revalorisations salariales d’un montant global de 243 milliards de francs CFA. Leur cri de détresse semble tomber dans des oreilles de sourd. Un séminaire leur est proposé en février suite à un préavis de grève déposé depuis décembre,  là où les caisses de l’Etat sont vidées pour faire plaisir aux mutins.
Ironisant sur la situation, Mamadou Koulibaly, l’opposant et ancien président de l’Assemblée nationale, affirme : « Avec ADO, le tir à la kalach est devenu une discipline sportive. » Le problème, c’est qu’après avoir connu une croissance économique soutenue ces cinq dernières années, la Côte-d’Ivoire est devenue la locomotive de la sous-région. Elle a vanté aux investisseurs sa sortie de crise et la paix obtenue après dix années de conflit. Aujourd’hui, le modèle ivoirien est en lambeaux. Les nombreux investisseurs qui accourent à Abidjan et ailleurs dans le pays, commencent à se demander s’ils n’auraient pas dû attendre encore un peu. Et les incertitudes sont mauvaises pour les affaires.
Que peut faire Ouattara dans une conjoncture aussi complexe ? Après avoir fait voter une constitution qui écarte clairement Guillaume Soro de la succession au profit du vice-président qu’est désormais Daniel Kablan-Duncan, il semblait avoir réussi son coup. Les mutineries qui s’enchaînent montrent pourtant que l’ex-chef de la rébellion et actuel président de l’Assemblée nationale n’a pas encore dit son dernier mot. Beaucoup le soupçonnent d’être derrière ces coups fourrés qui risquent de rendre le pays ingouvernable. Ce serait en effet une pure vengeance de sa part. Non seulement son poste a été vidé de sa substance par la nouvelle loi fondamentale, mais encore lui qui ne cracherait pas sur le dauphinat se voit ostracisé, même s’il parvient à décrocher sa réélection à la tête du parlement.
Clairement, après avoir frôlé une croissance de 9% en 2015 et 2016, la Côte-d’Ivoire risque de plonger à nouveau dans des incertitudes sécuritaires. Un peu comme si la guerre terminée en 2011 devait encore engendrer d’autres guerres.

Par Olivier ALLOCHEME

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