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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le luxe du crédit


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L’argent coûte trop cher dans les banques béninoises. Pour avoir accès au crédit bancaire, les taux d’intérêt appliqués sont largement au-dessus de la moyenne dans la sous-région. Et ceci contient de graves conséquences pour les ménages et les entreprises.
Oui, nous le savons, la situation n’est pas plus brillante ici qu’ailleurs. Pas plus tard que la semaine dernière, les Nations unies ont critiqué les taux d’intérêts élevés pratiqués par les banques sur le continent africain, taux d’intérêt qui découragent un grand nombre d’investisseurs. Ainsi donc, pour construire sa maison, par exemple, le Béninois qui a recours à un crédit bancaire doit rembourser des taux d’intérêts plus élevés que le Français placé dans les mêmes conditions. C’est la triste réalité à laquelle nous sommes confrontés. Le directeur des Affaires économiques de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), Andrew Mold, explique que cette situation est injustifiée car elle limite le montant des prêts accordés au secteur privé.
D’une manière générale, on observe même qu’il y a en Afrique un écart d’environ 10%  entre le taux de dépôt et le taux d’intérêt des prêts. Mieux, entre les pays d’Afrique du Nord et ceux d’Afrique de l’Ouest, il y a des disparités négatives qui montrent le martyr que nous souffrons tous chaque fois que nous devons demander du crédit pour acheter une parcelle, construire une maison ou améliorer la trésorerie de nos entreprises.
Il  est largement plus facile à un Français ou à un Américain d’avoir un crédit à bas prix qu’à un Béninois ou à un  Togolais qui vivent pourtant dans des pays pauvres. Et c’est d’ailleurs l’une des raisons  pour lesquelles les entreprises font  très rarement recours au crédit bancaire. Aujourd’hui, en moyenne moins de 20% du fonds de roulement du secteur privé en Afrique provient des banques commerciales. Moins de 20%. Bien entendu, tout investisseur aura beaucoup de réticence à s’engager dans un tel environnement, surtout lorsqu’il se met à faire les comparaisons que nous venons de faire.
Si la situation générale est ainsi, le cas du Bénin est pourtant des plus critiques. Dans une étude rendue publique l’année dernière par la BCEAO, l’institution constate que  notre pays fait partie  d’un groupe de  trois pays avec la Guinée Bissau et le Niger, groupe dans lequel  le financement bancaire est le plus cher sur la période 2005-2012.  Les taux d’intérêts appliqués ici sont  en moyenne de  11,2 % pour le Niger, 10,4 % pour la Guinée-Bissau  et 10,1 % pour le Bénin.  Dans le même temps, dans un pays comme le Sénégal ou même la Côte d’Ivoire, les taux d’intérêt débiteurs sont inférieurs à la moyenne communautaire qui est d’environ 8%.
L’étude   montre que le faible niveau de concurrence dans le secteur bancaire, la faible bancarisation, le coût des ressources, l’aversion au risque ainsi que la politique monétaire sont à l’origine des évolutions des taux d’intérêts  débiteurs des banques.  Mais ce  qui choque, c’est de constater que la plupart de ces établissements bancaires sont des sociétés multinationales qui pratiquent des taux curieusement différents d’un pays  à l’autre. Une banque qui opère sur la place de Paris  avec des taux de 5% vient pratiquer à Cotonou des taux de 9  à 10%.
Je connais des amis qui n’ont pu acheter leur voiture ou leur parcelle qu’en faisant des prêts à la banque. Et là, le remboursement s’étire sur plusieurs années, avec des taux d’intérêts aussi élevés. A ces occasions, vous avez l’impression qu’on vous vole, que votre banque vous trompe parce qu’elle est bien consciente que vous ne pouvez faire autre chose que de s’adresser à elle.
Dans bien des cas, le recours aux institutions de micro-finance est  la solution. Mais là encore, tout le monde sait que les taux sont plus élevés que dans les banques classiques. Ils vont jusqu’à 18% dans certains cas. Mais alors, que faire ?
Il s’agit maintenant que les Etats s’organisent pour favoriser le crédit bancaire en sensibilisant nos banquiers sur la situation. Je m’étonne même que le patronat béninois ou encore les associations de consommateurs se comportent encore comme si la situation était normale. Ils doivent se réveiller pour que l’accès au crédit ne soit plus un luxe.

Par Olivier ALLOCHEME

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