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Le triomphe de la vérité

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Edito: Nago au petit trot


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Mathurin Nago ne sera plus une excroissance du gouvernement au sein du parlement. Comme un aigle définitivement libéré de sa cage, il vole, vole et survole encore au-dessus de la tête de l’exécutif. Vendredi, il a encore commis l’un de ces petits coups qui ont le don d’énerver le maître de la Marina : « que cessent les manipulations, les calomnies et les intrigues, car la bataille, la vraie est ailleurs, » a martelé Mathurin Nago. Le Président de l’Assemblée nationale a en effet pris le temps de répondre à ses détracteurs, à tous ceux qui l’ont accusé en décembre d’avoir fait le jeu de l’opposition au moment du vote du budget 2014, en optant pour le vote secret. Ce mode de scrutin avait largement favorisé le rejet du projet gouvernemental. Mieux, l’homme a presque bravé la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle a enjoint aux députés de se réunir en plénière le 31 décembre 2013 pour voter à nouveau le budget rejeté et jugé non conforme à la Constitution. Cette fois-là, ni l’adoption du texte par ordonnance, ni les dénonciations courroucées des membres les plus éminents de la mouvance qui ont parlé de traitrise sans attaquer ouvertement Nago, n’ont empêché le public de voir dans tous ces mouvements (tectoniques) des crises profondes de la yayicratie finissante. Il se passe que le professeur Nago est en train de s’affranchir progressivement de l’emprise du régime Yayi pour se construire une nouvelle identité pour 2016. Il se passe aussi que cette délivrance ne peut se réaliser que sur le mode de l’arrachement, surtout que Boni Yayi ne semble pas disposé à laisser qui que ce soit briguer un mandat présidentiel pour 2016. Il se passe enfin que Nago candidat, a besoin de sortir de ses habits d’acolyte numéro un du Chef de l’Etat en 2011. Et dans ce registre, il ne peut faire l’économie d’un combat. Son besoin de se démarquer ne saurait néanmoins se réaliser de si tôt. Et les représailles n’ont pas tardé. Déjà, la distance s’est creusée entre les deux hommes. On a vu les ministres à l’ouverture de la session de vendredi, mais ils étaient absents à la cérémonie de décoration de Nago et de ses pairs de l’Afrique venus participer à l’événement. On n’a pas vu Nago lors de la récente concertation organisée au palais par Yayi pour lancer ses troupes à l’assaut des prochaines élections. Il y a à peine quelques mois, cette perspective était inenvisageable. Progressivement, la machine FCBE qui aurait pu servir à faire monter un candidat du sérail au pouvoir, est en train de se tourner contre Nago. A l’intérieur du bureau de l’Assemblée nationale où les FCBE faisaient leur loi, des voix discordantes ont commencé à s’élever. Et l’on verra d’ici peu les échauffourées qui auront d’abord lieu à fleurets mouchetés avant d’éclater sur la place publique. Durant la session en cours, les Béninois verront comment s’exprimeront les forces en présence. La présentation et l’adoption du rapport du président de l’Assemblée nationale serviront de test. Mais il y aura aussi la désignation des membres de la CENA prévue pour cette session qui fera l’objet de toutes les fureurs. L’on surveillera surtout la désignation des membres désignés au titre du parlement pour siéger à la HAAC. Par le passé, les noms étaient partis de la présidence, imposés par la haute main du Chef de l’Etat. Ces différentes occasions rendront service au président de l’Assemblée nationale, s’il entend réellement prendre ses marques. La véritable question est de savoir quelle est la marge de manœuvre dont il dispose pour oser se mettre volontairement en congé du yayisme. Dans un contexte où le Chef de l’Etat veut tout régenter, cette bouffée de liberté ne fera qu’attiser sa méfiance et renforcer sa tendance à ostraciser son allié douteux. Dans ces conditions, toute opposition frontale sera perçue comme une menace et combattue comme telle, y compris par des manœuvres de destitution. Sans emprise réelle sur les députés FCBE, il reste à savoir comment Nago s’exprimera dans le seul langage que comprend l’hôte de la Marina, celui de la force.

Par Olivier ALLOCHEME

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