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Le triomphe de la vérité

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Une réflexion de l’ambassadeur Jean-Pierre Edon, spécialiste des questions internationales: Perpétuation des actes terroristes dans le sahel et risque d’invasion djihadiste des pays du golfe de Guinée


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Les deux derniers mois de l’année 2019 ont été particulièrement meurtriers. Au cours du mois de Novembre 2019, près de 150 militaires maliens ont succombé dans les attaques terroristes perpétrées par les djihadistes. Le 25 novembre 2019 treize soldats français ont trouvé la mort à la suite d’une collision de deux hélicoptères. Le 10 décembre 2019, l’attaque du camp militaire d’ Inates au Niger a entrainé la mort de 71 militaires nigériens, 12 blessés et des porté- disparus. Au Burkina Faso, une double attaque a fait 52 morts en ce mois de décembre 2019.
Depuis trois ans, on dénombre rien que dans ce pays du Faso, environ 700 morts et près de 600.000 déplacés. Des civils, des religieux comme les prêtres, les pasteurs et leurs fidèles en ont été victimes. Très longue, cette liste est loin d’être exhaustive. Une question vient alors à l’esprit, celle de savoir la situation réelle sur le terrain et le rôle que jouent les forces étrangères aux côtés des armées nationales. Y a-t-il à court et moyen terme risque d’invasion djihadiste des pays du Golfe de Guinée et aussi des pays européens ?
Depuis le 17 Janvier 2012, un conflit armé oppose dans le Nord du Mali, l’armée nationale aux rebelles Touareg du Mouvement National pour la Libération de l’AZAWAD (MNLA) et aux mouvements salafistes Ansar Dine, alliés d’autres mouvements islamiques. Le MNLA revendique l’autodétermination et l’indépendance de l’AZAWAD correspondant aux trois régions maliennes de Kidal, Gao et Tombouctou. Cette revendication est inadmissible et inacceptable par le Gouvernement et son peuple, la République du Mali étant une et indivisible.
Le mouvement Ansar Dine de l’ancien combattant touareg Iyad ag Ghali défend lui, l’instauration d’une république islamique avec l’application de la charia. Deux autres organisations ayant des missions semblables, interviennent aussi au Mali : il s’agit du mouvement pour l’Amitié et le Jihad en Afrique de l’Ouest ( MUJAO ) et Al Quaida au Maghreb (AQMI ).
En 2012, l’intervention des forces armées françaises, demandée par le Gouvernement malien et soutenue par le président en exercice de l’Union Africaine, était salutaire en ce sens qu’elle a permis d’arrêter la progression rapide vers Bamako des différentes colonnes djihadistes bien entrainées et lourdement armées. Seule, l’armée nationale n’aurait pas pu le faire. Ainsi est apparue l’opération Serval devenue en Août 2014, Barkhane créée pour appuyer les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) engagés dans la lutte contre les groupes islamiques.
S’inscrivant dans le cadre d’une stratégie des forces pré positionnées dans la région, en partenariat avec les Etats de la zone, cette opération militaire visant à combattre les groupes armés salafistes djihadistes ,mobilise plus de quatre mille hommes contre quelques centaines de djihadistes en 2014 dont le nombre en augmentation s’élève aujourd’hui à quelques trois mille hommes, toutes tendances confondues.
Avec le concours du Royaume Uni, de l’Estonie, l’opération Barkhane comprend d’après les sources HUF post, 4500 militaires, 7 avions de chasse, 22 hélicoptères, 6 à 10 avions de transport, 3 drones, 260 blindés lourds, 210 blindés légers, 360 véhicules logistiques.
Cinq ans après son déploiement dans le Sahel avec tous ses armements de loin supérieurs à ceux des djihadistes, cette force n’a pas pu répondre aux attentes des populations locales qui ne voient pas d’amélioration dans la lutte contre les terroristes. Aussi la présence française devient-elle difficilement supportable. Au Mali en particulier des critiques fusent de toutes parts contre les soldats français, ce qui donne l’impression d’un sentiment anti-français. En réalité il s’agit de l’expression de la déception de la population qui pensait qu’avec la présence de ces forces dans le Nord, les djihadistes seront vaincus et la paix sera rapidement restaurée dans le pays.
Très profonde, cette déception s’est transformée en fureur de la part de certaines personnalités. Le journal « Jeune Afrique » dans sa parution n° 3073 du 1 au 7 décembre 2019 a évoqué le cas du député malien Moussa Diarra qui a fait le 21 novembre à l’Assemblée nationale un discours hostile au rôle des Français.
Il en est de même de certains citoyens estimant que la force Barkhane ne veut pas combattre les envahisseurs islamiques. Le célèbre chanteur Salif Kéita a enfoncé le clou en disant que « La France finance nos ennemis contre nos enfants ». Quant au burkinabè Ouattara Hervé, il va plus loin en déclarant que « Tout laisse à penser que la France coopère avec les groupes djihadistes pour rendre la zone instable et piller nos matières premières ».Ainsi se manifeste ce prétendu sentiment anti- français qui vient en opposition à l’ambiance spéciale en début du conflit , connue au Mali par le Premier français.
IL s’agit de l’accueil exceptionnellement fraternel et chaleureux dont a été l’objet le président François Hollande lors de sa visite en Février 2013 à Bamako et au Nord sur le terrain de bataille. Il est apparu aux yeux des Bamakois comme un sauveur, voire un libérateur et beaucoup de Maliens en signe de reconnaissance et d’amitié, ont même adopté les noms des premiers soldats français ayant perdu la vie au cours des combats.
L’intervention française à l’époque était bien accueillie et opportune, car sans elle, la capitale Bamako tombait dans les mains des groupes islamiques. Le Mali serait devenu la base d’où seraient menées des incursions armées vers la Guinée Conakry, le Libéria, la Côte d’Ivoire, le Ghana, Le Togo, le Benin, le Nigéria étant déjà en lutte contre Boko Haram.
En général, la présence des forces armées étrangères sur le territoire d’un autre pays n’est pas un acte recommandable. Toutefois il n’est pas souhaitable en ce moment d’envisager le départ de l’opération Barkhane du Sahel. Le faire, c’est livrer les pays concernés à l’Etat Islamique comme ce qui s’est passé en Syrie et en Irak. Il faudra plutôt revoir la mission des forces étrangères, leurs modes d’actions et définir de nouvelles stratégies qui prennent en compte les formes de lutte des djihadistes. Ces derniers évitent les guerres classiques et préfèrent l’utilisation des techniques de guérilla, en prenant l’offensive dans les attaques- surprises avec l’utilisation des véhicules à deux roues, imposant ainsi la défensive à leurs adversaires.
Les colonnes djihadistes ayant illégalement occupé les territoires des pays concernés, il revient alors aux armées nationales appuyées par les forces étrangères de les localiser et les chasser par tous les moyens des zones arbitrairement occupées, surtout au Nord du Mali.
En somme, le maillon faible de la chaine au Sahel demeure le Mali en ce sens qu’il fut le premier pays attaqué en 2012. Mieux, il est menacé d’éclatement en deux Etats par un mouvement sécessionniste et subit les coups fréquents des violences communautaires.
Un sursaut national s’avère nécessaire pour sauver la patrie au lieu de se confondre dans des luttes politiques inopportunes au moment où par une cohésion nationale patriotique, il fallait s’unir comme un seul homme pour défendre la sécurité, la paix et l’intégrité territoriale du pays. Il est d’une nécessité impérieuse que la classe politique malienne tout entière se mobilise contre l’ennemi commun qui ne connait ni l’opposition, ni la mouvance présidentielle.
L’ampleur que prend cette situation depuis bientôt sept ans dans le Sahel et l’organisation bien structurée desdits groupes alliés à l’Etat Islamique, ainsi que leur programme politique, ne doivent pas laisser indifférents les Africains de même que les Européens pour des raisons suivantes : une fois le Sahel maitrisé, les djihadistes étendront leur conquête vers les pays du Sud ayant un accès à l’Océan Atlantique. Les nouvelles cibles seront alors tous les pays du Golfe de Guinée. Au-delà des considérations religieuses qui fondent généralement l’action des djihadistes, ces groupes des hors-la-loi visent la main mise sur les énormes ressources encore intactes du sous-sol dont regorgent les pays du Sahel et ceux de la côte.
On se rappelle l’enlèvement en Mai 2019 des touristes français dans le parc Pendjari au Benin. C’est une opération à considérer à la fois comme un signal et un test. La preuve en est qu’une fois enlevés, ces touristes ont été transportés dans la zone d’influence des terroristes au Burkina Faso. Il a fallu la détermination et la bravoure des militaires français pour les libérer, malheureusement avec en leur sein deux morts qui s’ajoutent à celle du guide béninois.
A cet acte, ajoutons celui de la fusillade de Grand Bassam en Côte d’Ivoire en 2016. Au Ghana, des remous non encore clarifiés se font entendre déjà du côté de l’Est du pays appelé autrefois Togo land. Les ennemis de ce pays émergent, résolument engagé dans la voie du développement, veulent allumer un feu colonial éteint depuis des lustres pour freiner ses progrès sociaux et économiques.
Très vicieux, ces agresseurs d’une autre nature, discrètement soutenus ou utilisés par certaines nations insoupçonnables désireuses de préserver leurs intérêts au détriment de ceux des populations autochtones, exploitent souvent des faits d’histoire et la situation de pauvreté existant dans certaines régions du pays ciblé, pour satisfaire leur vil dessein. Les trois cas sus-évoqués permettent de dire que les pays côtiers actuellement en paix, ne seront pas épargnés de la conquête islamique si rien n’est fait dès maintenant pour l’étouffer et l’anéantir au Sahel.
Dans l’hypothèse non souhaitable où le Sahel et les pays du Golfe de Guinée seraient occupés par les islamistes, cette vaste zone servira alors de base privilégiée pour attaquer les pays européens au nom du djihad qui veut dire « guerre sainte ». Les actes terroristes commis à ce jour en Europe en sont une belle illustration.
Il s’agit par exemple de l’attaque terroriste islamique contre le journal satirique Charlie Hebdo perpétrée à Paris le 7 Janvier 2015. C’est le premier et le plus meurtrier des trois attentats enregistrés en France pendant cette période. Il en est de même de l’attentat au camion Berliet à Berlin contre la foule lors du marché de Noël en 2015. Il s’en est suivi 12 morts et 56 blessés. Revendiqué par l’Etat islamique, cet acte macabre a été commis aussi sous une autre forme en Belgique et en Norvège.
Aucun pays n’est donc à l’abri de ces actes criminels, à tort justifiés par des considérations confessionnelles. Or l’Islam est une religion de tolérance, de paix, d’amour du prochain, de fraternité et d’assistance aux pauvres… Aussi la conversion en la foi islamique ne saurait-t-elle se faire par la force, mais plutôt par le dialogue, l’explication pacifique, la manifestation de l’amour et la conviction.
Il ressort de ce qui précède que la lutte contre le terrorisme dans le Sahel doit être considérée comme l’affaire de tous les pays de l’Afrique de l’Ouest, du continent tout entier et aussi de l’Europe. Comme aimait à le dire un ancien chef d’Etat africain, si la maison de ton voisin brûle et tu ne l’aides pas à éteindre le feu, ta propre maison ne sera pas épargnée.
Dans cet ordre d’idées, le Benin pouvait adhérer au groupe du G5 en tant que membre ou tout au moins observateur, car des pays côtiers de la région, il est celui qui a la particularité de partager les frontières avec trois Etats victimes des attaques djihadistes : le Burkina Faso, le Niger et le Nigéria. L’incident du parc pendjari en dit long.
La prolifération des mosquées, des écoles coraniques et franco-arabes , de forages de puits, de centres de santé construits partout dans le pays et particulièrement dans la partie septentrionale par des organisations non- gouvernementales d’obédience islamique, ou des associations musulmanes béninoises financées par les pays du Golfe, est une bonne chose. Mais elle appelle toutefois la vigilance de la part des Autorités. Une vive attention propre à tout Etat organisé est recommandée, et ne gêne en rien le caractère laïc du Benin.
Ceci est d’autant plus préoccupant qu’une étude financée par l’Union Européenne et réalisée par Monsieur Aziz Mossi sous la conduite de huit experts, dans le cadre du programme de L’UE de prévention de l’extrémisme violent en Afrique de l’Ouest et dans le lac Tchad, a révélé que le Bénin n’est pas à l’abri de la radicalisation, ni de l’extrémisme violent. La zone concernée par cette étude couvre les quatre départements du Nord.
La solidarité africaine et internationale devient alors nécessaire pour combattre ce nouveau fléau de nature à déstabiliser l’ordre international, comme nous le rappelle l’attaque terroriste contre les deux Tours jumelles à New York le 11 septembre 2001. Qui l’aurait cru, mais cela s’est passé par la destruction incroyable de ce qu’on peut appeler le symbole de la réussite commerciale américaine, première puissance économique et militaire mondiale.
Il est heureux de constater que la solidarité régionale se manifeste déjà. En effet les Etats membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), ont annoncé le jeudi 3 Octobre 2019 au cours de la réunion de Dakar sur le financement de la sécurité dans l’espace de l’Union, la mobilisation de 500 millions de dollars américains pour la lutte contre le terrorisme.
De la même manière le sommet de la Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tenu à Ouagadougou le 13 septembre 2019 a décidé d’allouer à cette opération dans l’espace communautaire, 1 milliard de dollars US d’ici à 2024. A ceci s’ajoute le projet franco-ivoirien de création en Côte d’Ivoire d’une école militaire de formation à la lutte antiterroriste. Tout récemment, quelques jours avant l’attaque du camp militaire nigérien d’inates, les Etats-Unis ont annoncé l’octroi au Niger d’une assistance matérielle de l’ordre de 20 millions de dollar.
Le monde entier est alors interpellé dans la lutte contre ce phénomène de notre siècle. Aussi la poursuite des combats au Sahel pour plus d’efficacité, appelle- t-elle les dispositions indicatives et non exhaustives ci-après :
L’intervention des forces étrangères à travers l’opération Barkhane doit être maintenue et davantage pointue, accompagnée d’une meilleure coordination avec les armées nationales des cinq pays dans l’élaboration et la mise en œuvre de toutes les stratégies de combat sur le terrain. Soutenus par les forces françaises, les militaires maliens doivent avoir accès à Kidal Tombouctou et Gao.
La présence de l’administration malienne au Nord doit être davantage marquée, voire consolidée pour décourager à jamais et empêcher définitivement la balkanisation du pays voulue par le MNLA. Il n’est pas exclu que ce mouvement soit soutenu par une puissance étrangère ou une multinationale dans sa quête de diviser le pays en deux Etats. Ce soutien ne vise que l’affaiblissement du pays pour mieux exploiter ses ressources naturelles.

Les deux derniers mois de l’année 2019 ont été particulièrement meurtriers. Au cours du mois de Novembre 2019, près de 150 militaires maliens ont succombé dans les attaques terroristes perpétrées par les djihadistes. Le 25 novembre 2019 treize soldats français ont trouvé la mort à la suite d’une collision de deux hélicoptères. Le 10 décembre 2019, l’attaque du camp militaire d’Inates au Niger a entrainé la mort de 71 militaires nigériens, 12 blessés et des porté- disparus.Au Burkina Faso, une double attaque  a fait 52 morts en ce mois de décembre 2019.

 Depuis trois ans, on dénombre rien que dans ce pays du Faso, environ 700 morts et près de 600.000 déplacés. Des civils, des religieux comme les prêtres, les pasteurs et leurs fidèles en ont été victimes. Très longue, cette liste est loin d’être exhaustive. Une question vient alors à l’esprit, celle de savoir la situation réelle sur le terrain et le rôle que jouent les forces étrangères aux côtés des armées nationales. Y a-t-il  à court et moyen terme risque d’invasion djihadiste des pays du Golfe de Guinée et aussi des pays européens ?

Depuis le 17 Janvier 2012, un conflit armé oppose dans le Nord du Mali, l’armée nationale aux rebelles Touareg du Mouvement National pour la Libération de l’AZAWAD (MNLA) et aux mouvements salafistes Ansar Dine, alliés d’autres mouvements islamiques. Le MNLA revendique l’autodétermination et l’indépendance de l’AZAWAD correspondant aux trois régions maliennes de Kidal, Gao et Tombouctou. Cette revendication est inadmissible et inacceptable par le Gouvernement et son peuple, la République du Mali étant une et indivisible.

 Le mouvement Ansar Dine de l’ancien combattant touareg Iyad ag Ghali défend lui, l’instauration d’une république islamique avec l’application de la charia. Deux autres organisations ayant des missions semblables, interviennent aussi au Mali : il s’agit du mouvement pour l’Amitié et le Jihad en Afrique de l’Ouest ( MUJAO ) et Al Quaida au Maghreb (AQMI ).

En 2012, l’intervention des forces armées françaises, demandée par le Gouvernement malien et soutenue par le président en exercice de l’Union Africaine, était salutaire en ce sens qu’elle a permis d’arrêter la progression rapide vers Bamako des différentes colonnes djihadistes bien entrainées et lourdement armées. Seule, l’armée nationale n’aurait pas pu le faire. Ainsi est apparue l’opération Serval devenue en Août 2014, Barkhane créée pour appuyer les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) engagés dans la lutte contre les groupes islamiques.

 S’inscrivant dans le cadre d’une stratégie des forces pré positionnées dans la région, en partenariat avec les Etats de la zone,  cette opération militaire visant à combattre les groupes armés salafistes djihadistes ,mobilise plus de quatre mille hommes contre quelques centaines de djihadistes en 2014 dont le nombre en augmentation s’élève aujourd’hui à quelques trois mille hommes, toutes tendances confondues.

Avec le concours du Royaume Uni, de l’Estonie, l’opération Barkhane comprend d’après les sources HUF post, 4500 militaires, 7 avions de chasse, 22 hélicoptères, 6 à 10 avions de transport, 3 drones, 260 blindés lourds, 210 blindés légers, 360 véhicules logistiques.

Cinq ans après son déploiement dans le Sahel avec tous ses armements de loin supérieurs à ceux des djihadistes, cette force n’a pas purépondre aux attentes des populations locales qui ne voient pas d’amélioration dans la lutte contre les terroristes. Aussi la présence française devient-elle difficilement supportable. Au Mali en particulier des critiques fusent de toutes parts contre les soldats français, ce qui donne l’impression d’un sentiment anti-français. En réalité il s’agit de l’expression de la déception  de la population qui pensait qu’avec la présence de ces forces dans le Nord, les djihadistes seront vaincus et la paix sera rapidement restaurée dans le pays.

Très profonde, cette déception s’est transformée en fureur de la part de certaines personnalités. Le journal « Jeune Afrique » dans sa parution n° 3073 du 1 au 7 décembre 2019 a évoqué le cas du député malien Moussa Diarra qui a fait le 21 novembre à l’Assemblée nationale un discours hostile au rôle des Français.

 Il en est de même de certains citoyens estimant  que la force Barkhane ne veut pas combattre les envahisseurs islamiques. Le célèbre chanteur Salif Kéita a enfoncé le clou en disant que « La France finance nos ennemis contre nos enfants ». Quant au burkinabè Ouattara Hervé, il va plus loin en déclarant que « Tout laisse à penser que la France coopère avec les groupes djihadistes pour rendre la zone instable et piller nos matières premières ».Ainsi se manifeste ce prétendu sentiment anti- français qui vient en  opposition à l’ambiance spéciale en début du conflit , connue au Mali par le Premier français.

IL s’agit de l’accueil exceptionnellement fraternel et chaleureux dont a été l’objet le président François Hollande lors de sa visite en Février 2013 à Bamako et au Nord sur le terrain de bataille. Il est apparu  aux yeux des Bamakois comme un sauveur, voire un libérateur et beaucoup de Maliens en signe de reconnaissance et d’amitié, ont même adopté les noms des premiers soldats français ayant perdu la vie au cours des combats.

L’intervention française à l’époque était bien accueillie et opportune, car sans elle, la capitale Bamako tombait dans les mains des groupes islamiques. Le Mali serait devenu la base  d’où seraient menées des incursions armées vers la Guinée Conakry, le Libéria, la Côte d’Ivoire, le Ghana, Le Togo, le Benin, le Nigéria étant déjà en lutte contre BokoHaram.

En général, la présence des forces armées étrangères sur le territoire d’un autre pays n’est pas un acte recommandable. Toutefois il n’est pas souhaitable  en ce moment d’envisager le départ de l’opération Barkhane du Sahel. Le faire, c’est livrer les pays concernés à l’Etat Islamique comme ce qui s’est passé en Syrie et en Irak. Il faudra plutôt revoir la mission des forces étrangères, leurs modes d’actions et définir de nouvelles stratégies qui prennent en compte les formes de lutte  des djihadistes. Ces derniers évitent les guerres classiques et préfèrent  l’utilisation des techniques de guérilla, en prenant l’offensive dans les attaques- surprises avec l’utilisation des véhicules à deux roues, imposant ainsi la défensive à leurs adversaires.

Les colonnes djihadistes ayant illégalement occupé les territoires des pays concernés, il revient alors aux armées nationales appuyées par les forces étrangères de les localiser et les chasser par tous les moyens des zones arbitrairement occupées, surtout au Nord du Mali.

En somme, le maillon faible de la chaine au Sahel  demeure le Mali en ce sens qu’il fut le premier pays attaqué en 2012.Mieux, il est menacé d’éclatement en deux Etats par un mouvement sécessionniste et subit les coups fréquents des violences communautaires.

 Un sursaut national s’avère nécessaire pour sauver la patrie au lieu de se confondre dans des luttes politiques inopportunes au moment où par une cohésion nationale patriotique, il fallait s’unir comme un seul homme pour défendre la sécurité, la paix et l’intégrité territoriale du pays. Il est d’une nécessité impérieuse que la classe politique malienne tout entière se mobilise contre l’ennemi commun qui ne connait ni l’opposition, ni la mouvance présidentielle.

L’ampleur que prend cette situation depuis bientôt sept ans dans le Sahel et l’organisation bien structurée desdits groupes alliés à l’Etat Islamique, ainsi que leur programme politique, ne doivent pas laisser indifférents les Africains de même que les Européens pour des raisons suivantes : une fois le Sahel maitrisé, les djihadistes étendront leur conquête vers les pays du Sud ayant un accès à l’Océan Atlantique. Les nouvelles cibles seront alors tous les pays du Golfe de Guinée. Au-delà des considérations religieuses qui fondent généralement l’action des djihadistes, ces groupes des hors-la-loi visent la main mise sur les énormes ressources encore intactes du sous-sol dont regorgent les pays du Sahel et ceux de la côte.

On se rappelle l’enlèvement en Mai 2019 des touristes français dans le parc Pendjari au Benin. C’est une opération à considérer à la fois comme un signal et un test. La preuve en est qu’une fois enlevés, ces touristes ont été transportés dans la zone d’influence des terroristes au Burkina Faso. Il a fallu la détermination et la bravoure des militaires français pour les libérer, malheureusement avec en leur sein deux morts qui s’ajoutent à celle du guide béninois.

 A cet acte, ajoutons celui de la fusillade de Grand Bassam en Côte d’Ivoire en 2016. Au Ghana, des remous non encore clarifiésse font entendre déjà du côté de l’Est du pays appelé autrefois Togo land. Les ennemis de ce pays émergent, résolument engagé dans la voie du développement, veulent allumer un feu colonial éteint depuis des lustres pour freiner ses progrès sociaux et économiques.

Très vicieux, ces agresseurs d’une autre nature, discrètement soutenus ou utilisés par certaines nations insoupçonnables désireuses de préserver leurs intérêts au détriment de ceux des populations autochtones, exploitent souvent des faits d’histoire et la situation de pauvreté existant dans certaines régions du pays ciblé, pour satisfaire leur vil dessein. Les trois cas sus-évoqués permettent de dire que les pays côtiers actuellement en paix, ne seront pas épargnés de la conquête islamique si rien n’est fait dès maintenant pour l’étouffer et l’anéantir au Sahel.

Dans l’hypothèse non souhaitable où le Sahel et les pays du Golfe de Guinée seraient occupés par les islamistes, cette vaste zone servira alors de baseprivilégiée pour attaquer les pays européens au nom du djihad qui veut dire « guerre sainte ». Les actes terroristes commis à ce jour en Europe en sont une belle illustration.

Il s’agit par exemple de l’attaque terroriste islamique contre le journal satirique Charlie Hebdo perpétrée à Paris le 7 Janvier 2015. C’est le premier et le plus meurtrier des trois attentats enregistrés en France pendant cette période. Il en est de même de l’attentat au camion Berliet à Berlin contre la foule lors du marché de Noël en 2015. Il s’en est suivi 12 morts et 56 blessés. Revendiqué par l’Etat islamique, cet acte macabre a été commis aussi sous une autre forme en Belgique et en Norvège.

 Aucun pays n’est donc à l’abri de ces actes criminels, à tort justifiés par des considérations confessionnelles. Or l’Islam est une religion de tolérance, de paix, d’amour du prochain, de fraternité et d’assistance aux pauvres… Aussila conversion en la foi islamique ne saurait-t-elle se faire par la force, mais plutôt par le dialogue, l’explication pacifique, la manifestation de l’amour et la conviction.

Il ressort de ce qui précède que la lutte contre le terrorisme dans le Sahel doit être considérée comme l’affaire de tous les pays de l’Afrique de l’Ouest, du continent tout entier et aussi de l’Europe. Comme aimait à le dire un ancien chef d’Etat africain, si la maison de ton voisin brûle et tu ne l’aides pas à éteindre le feu, ta propre maison ne sera pas épargnée.

 Dans cet ordre d’idées, le Benin pouvait adhérer au groupe du G5 en tant que membre ou tout au moins observateur, car des pays côtiers de la région, il est celui qui a la particularité de partager les frontières avec trois Etats victimes des attaques djihadistes : le Burkina Faso, le Niger et le Nigéria.L’incident du parc pendjari en dit long.

La prolifération des mosquées, des écoles coraniques et franco-arabes, de forages de puits, de centres de santé construits partout dans le pays et particulièrement dans la  partie septentrionale pardes organisations non- gouvernementales d’obédience islamique, ou des associations musulmanes béninoises financées par les pays du Golfe,est une bonne chose.Mais elle appelle toutefois la vigilance de la part des Autorités. Une vive attention propre à tout Etat organisé est recommandée,et ne gêne en rien le caractère laïc du Benin.

Ceci est d’autant plus préoccupant qu’une étude financée par l’Union Européenne et réalisée par Monsieur Aziz Mossi sous la conduite de huit experts, dans le cadre du programme de L’UE de prévention de l’extrémisme violent en Afrique de l’Ouest et dans le lac Tchad,a révélé que le Bénin n’est pas à l’abri de la radicalisation, ni de l’extrémisme violent. La zone concernée par cette étudecouvre les quatre départements du Nord.

 La solidarité africaine et internationale devient alors nécessaire pour combattre ce nouveau fléau de nature à déstabiliser l’ordre international, comme nous le rappelle l’attaque terroriste contre les deux Tours jumelles àNew York le 11 septembre 2001. Qui l’aurait cru, mais cela s’est passé par la destruction incroyable de ce qu’on peut appeler le symbole de la réussite commerciale américaine, première puissance économique et militaire mondiale.

Il est heureux de constater que la solidarité régionale se manifeste déjà. En effet les Etats membres de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), ont annoncé le jeudi 3 Octobre 2019 au cours de la réunion de Dakar sur le financement de la sécurité dans l’espace de l’Union, la mobilisation de 500 millions de dollars américains pour la lutte contre le terrorisme.

 De la même manière le sommet de la Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tenu à Ouagadougou le 13 septembre 2019 a décidé d’allouer à cette opération dans l’espace communautaire, 1 milliard de dollars US d’ici à 2024.A ceci s’ajoute le projet franco-ivoirien de création en Côte d’Ivoire d’une école militaire de formation à la lutte antiterroriste. Tout récemment, quelques jours avant l’attaque du camp militaire nigérien d’inates, les Etats-Unis ont annoncé l’octroi au Niger d’une assistance matérielle de l’ordre de 20 millions de dollar.

Le monde entier est alors interpellé dans la lutte contre ce phénomène de notre siècle. Aussi la poursuite des combats au Sahel pour plus d’efficacité, appelle- t-elle les dispositions indicatives et non exhaustives ci-après :

  • L’intervention des forces étrangères à travers l’opération Barkhane doit être maintenue et davantage pointue, accompagnée d’une meilleure coordination avec les armées nationales des cinq pays dans l’élaboration et la mise en œuvre de toutes les stratégies de combat sur le terrain. Soutenus par les forces françaises, les militaires maliens doivent avoir accès à Kidal Tombouctou et Gao.

La présence de l’administration malienne au Nord doit être davantage marquée, voireconsolidée pour décourager à jamais et empêcher définitivement la balkanisation du pays vouluepar le MNLA.Il n’est pas exclu que ce mouvement soit soutenu par une puissance étrangère ou une multinationale dans sa quête de diviser le pays en deux Etats. Ce soutien ne vise que l’affaiblissement du pays pour mieux exploiter ses ressources naturelles.

  • L’implication opérationnelle de l’Algérie dans cette opération est nécessaire pour deux raisons principales : C’est un pays frontalier avec le Mali d’une part, il jouit d’une grande expérience dans la lutte contre les islamistes d’autre part.
  • Une intervention plus active de l’Europe est nécessaire surtout en ce moment où les Etats-Unis s’apprêtent à retirer ses hommes dont le concours dans les renseignements a pourtant été jusqu’à présent très utile, efficace et apprécié. De la même manière que l’OTAN est intervenu en Lybie en 2011 pour protéger les populations, de cette même manière il peut s’impliquer dans la lutte contre les djihadistes dans le Sahel. Le président français a raison d’envisager aussi cette possibilité.
  • Plus que par le passé, l’Union Africaine doit se sentir davantage concernée et prendre les mesures adéquates et appropriées. Ceci est d’autant plus indiqué qu’en Afrique Centrale, Orientale et Australe, se manifestent déjà des velléités terroristes à caractère islamique dans les pays comme la République Centrafricaine, le Mozambique dans sa partie septentrionale notamment, le Kenya et subsidiairement la Tanzanie. Quant à la Somalie devenue un non-Etat à cause de l’intensité de ce type de terrorisme, la situation se passe de commentaires.
  • Envisager de solliciter le concours d’Israël, pays rompu aux techniques de lutte contre le terrorisme. Ses larges expériences et expertise en la matière sont notoires et pleines d’enseignements.
  • Les forces Barkhane et les armées nationales prendront désormais l’initiative d’attaquer en premier les groupes islamiques partout où ils sont installés et éviter de subir leurs assauts répétitifs et dese défendre contre leurs opérations guerrières. A cette fin, un accent particulier sera mis sur les renseignements.
  • En dehors des ressources personnelles sales issues du trafic des stupéfiants, des êtres humains et des faux médicaments dont se servent les djihadistes au Sahel, ces derniers bénéficient aussi largement de sources de financement provenant de certains pays, des personnalités islamistes immensément riches à travers le monde, surtout de certaines entités étatiques musulmanes.

Il serait nécessaire de les identifier, d’en faire un répertoire, et d’arrêter les voies et moyens y compris la négociation, pour bloquer et empêcher la poursuite de ces financements. Les puissances occidentales impliquées dans l’opération Barkhane, de même que les Nations-Unies, ont les moyens et les possibilités de réussir cette opération de blocage des sources de financement, pour peu qu’il y ait la volonté réelle exempte de tout calcul, et la ferme détermination d’y parvenir.

La présence des forces armées étrangères dans le Sahel peut être interprétée comme l’échec des armées nationales qui n’ont pas pu arrêter et anéantir les agresseurs. On a tendance à croire qu’elles ne sont pas conçues pour faire la guerre. Elles s’illustrent davantage en Afrique dans le combat pour freiner et affaiblir la lutte démocratique de nos populations. D’où cette appellation de « Armée en temps de paix ». A cette caractéristique, les armées algérienne, tchadienne et nigériane font exception, car elles savent se battre sans le concours des forces étrangères.

Désormais il faut apprendre à nos militaires  à véritablement faire la guerre, à s’adapter à l’ennemi, le combattre et le vaincre pour maintenir et sécuriser nos frontières. L’accent devra être mis sur la formation, le renseignement et la maitrise du matériel technique. Ce sont là des questions de fond sur lesquelles  les djihadistes sont en avance sur nous. L’armée en temps de paix doit se transformer désormais en armée de guerre. C’est le prix à payer pour éviter la présence sur nos sols des soldats étrangers avec tous ses inconvénients.Il n’y a pas de dignité si on attend tout des autres. Sur ce plan, la réaction des Autorités françaises à la suite du dernier accident d’hélicoptères, est compréhensible.

En effet, à l’occasion dela mort au Mali de 13 militaires français en Novembre 2019, le président de la République, Monsieur Emmanuel Macron, sous l’effet d’une grande émotion et à la faveur de ce qu’il appelle manifestation du sentiment anti- français, a fait une déclaration diversement commentée. Il a notamment déclaré que « Nous devons à court terme ré-clarifier le cadre et les conditions politiques de notre intervention au Sahel avec les Etats membres du G5. Qu’ils clarifient et formalisent leurs demandes à l’égard de la France et de la communauté internationale. Souhaitent-ils notre intervention ? Ont-ils besoin de nous ? Je veux avoir des réponses claires etc… »

En dehors de la forme peu diplomatique et du ton assez choquant envers ses pairs africains de cette déclaration, le fond mérite que l’on prenne du temps pour y réfléchir avec objectivité, réalisme et sans passion. En effet, à la suite de plus de 5 ans de la présence des forces françaises au Mali et dans le Sahel pour contrer les envahisseurs islamiques, le genre de résultat obtenu à ce jour recommande que l’onprenne une pause pour revoir les moyens et les stratégies de lutte utilisés.

La méthode de combat en vigueur depuis lors est- elle conforme et adaptée à l’évolution de la situation sur le terrain ? Sinon, que faire sur le plan politique et militaire, d’où la nécessité d’une clarification par les pays du G5 du nouveau cadre et conditions politiques de l’intervention des forces Barkhane et aussi de celle descontingents desNations-Unies présents sur le terrain.

L’occasion apparait bonne pour que les chefs d’Etat concernés s’expriment sur la voie à suivre désormais en vue d’arriver à bout de cette invasion djihadiste. Cette fois –ci, toutes les questions seront analysées et discutées sur un même pied d’égalité en tant qu’Etat, avec la partie française en vue d’aboutir de commun accord à une position consensuelle à mettre en œuvre à l’avenir.

 A notre humble avis,la présence des forces étrangères à travers l’opération Barkhane est encore nécessaire et utile. Il suffira de revoir et consolider les méthodes de travail et d’action opérationnelle avec une meilleure coordination et une mutualisation des forces devant être dorénavant, de plus en plus offensives, car il s’agit bel et bien d’une guerre.

Toutes ces questions et de nouvelles doléances feront certainement l’objet de discussion approfondie au cours de la prochaine réunion convoquée par la partie française le 13 Janvier 2020 à Pau en France. Le souhait de tout le monde est qu’elle aboutisse à de bonnes résolutions de nature à rendre plus efficace le combat contre les djihadistes, une lutte qui risque d’être longue. Mais la victoire sera celle des paisibles populations du Sahel.

Jean- Pierre Adelui EDON

Ambassadeur, spécialiste des questions internationales.

L’implication opérationnelle de l’Algérie dans cette opération est nécessaire pour deux raisons principales : C’est un pays frontalier avec le Mali d’une part, il jouit d’une grande expérience dans la lutte contre les islamistes d’autre part.

Une intervention plus active de l’Europe est nécessaire surtout en ce moment où les Etats-Unis s’apprêtent à retirer ses hommes dont le concours dans les renseignements a pourtant été jusqu’à présent très utile, efficace et apprécié. De la même manière que l’OTAN est intervenu en Lybie en 2011 pour protéger les populations, de cette même manière il peut s’impliquer dans la lutte contre les djihadistes dans le Sahel. Le président français a raison d’envisager aussi cette possibilité.

Plus que par le passé, l’Union Africaine doit se sentir davantage concernée et prendre les mesures adéquates et appropriées. Ceci est d’autant plus indiqué qu’en Afrique Centrale, Orientale et Australe, se manifestent déjà des velléités terroristes à caractère islamique dans les pays comme la République Centrafricaine, le Mozambique dans sa partie septentrionale notamment, le Kenya et subsidiairement la Tanzanie. Quant à la Somalie devenue un non-Etat à cause de l’intensité de ce type de terrorisme, la situation se passe de commentaires.

Envisager de solliciter le concours d’Israël, pays rompu aux techniques de lutte contre le terrorisme. Ses larges expériences et expertise en la matière sont notoires et pleines d’enseignements.

Les forces Barkhane et les armées nationales prendront désormais l’initiative d’attaquer en premier les groupes islamiques partout où ils sont installés et éviter de subir leurs assauts répétitifs et de se défendre contre leurs opérations guerrières. A cette fin, un accent particulier sera mis sur les renseignements.

En dehors des ressources personnelles sales issues du trafic des stupéfiants, des êtres humains et des faux médicaments dont se servent les djihadistes au Sahel, ces derniers bénéficient aussi largement de sources de financement provenant de certains pays, des personnalités islamistes immensément riches à travers le monde, surtout de certaines entités étatiques musulmanes.
Il serait nécessaire de les identifier, d’en faire un répertoire, et d’arrêter les voies et moyens y compris la négociation, pour bloquer et empêcher la poursuite de ces financements. Les puissances occidentales impliquées dans l’opération Barkhane, de même que les Nations-Unies, ont les moyens et les possibilités de réussir cette opération de blocage des sources de financement, pour peu qu’il y ait la volonté réelle exempte de tout calcul, et la ferme détermination d’y parvenir.
La présence des forces armées étrangères dans le Sahel peut être interprétée comme l’échec des armées nationales qui n’ont pas pu arrêter et anéantir les agresseurs. On a tendance à croire qu’elles ne sont pas conçues pour faire la guerre. Elles s’illustrent davantage en Afrique dans le combat pour freiner et affaiblir la lutte démocratique de nos populations. D’où cette appellation de « Armée en temps de paix ». A cette caractéristique, les armées algérienne, tchadienne et nigériane font exception, car elles savent se battre sans le concours des forces étrangères.
Désormais il faut apprendre à nos militaires à véritablement faire la guerre, à s’adapter à l’ennemi, le combattre et le vaincre pour maintenir et sécuriser nos frontières. L’accent devra être mis sur la formation, le renseignement et la maitrise du matériel technique. Ce sont là des questions de fond sur lesquelles les djihadistes sont en avance sur nous. L’armée en temps de paix doit se transformer désormais en armée de guerre. C’est le prix à payer pour éviter la présence sur nos sols des soldats étrangers avec tous ses inconvénients. Il n’y a pas de dignité si on attend tout des autres. Sur ce plan, la réaction des Autorités françaises à la suite du dernier accident d’hélicoptères, est compréhensible.

En effet, à l’occasion de la mort au Mali de 13 militaires français en Novembre 2019, le président de la République, Monsieur Emmanuel Macron, sous l’effet d’une grande émotion et à la faveur de ce qu’il appelle manifestation du sentiment anti- français, a fait une déclaration diversement commentée. Il a notamment déclaré que « Nous devons à court terme ré-clarifier le cadre et les conditions politiques de notre intervention au Sahel avec les Etats membres du G5. Qu’ils clarifient et formalisent leurs demandes à l’égard de la France et de la communauté internationale. Souhaitent-ils notre intervention ? Ont-ils besoin de nous ? Je veux avoir des réponses claires etc… »
En dehors de la forme peu diplomatique et du ton assez choquant envers ses pairs africains de cette déclaration, le fond mérite que l’on prenne du temps pour y réfléchir avec objectivité, réalisme et sans passion. En effet, à la suite de plus de 5 ans de la présence des forces françaises au Mali et dans le Sahel pour contrer les envahisseurs islamiques, le genre de résultat obtenu à ce jour recommande que l’on prenne une pause pour revoir les moyens et les stratégies de lutte utilisés.

La méthode de combat en vigueur depuis lors est- elle conforme et adaptée à l’évolution de la situation sur le terrain ? Sinon, que faire sur le plan politique et militaire, d’où la nécessité d’une clarification par les pays du G5 du nouveau cadre et conditions politiques de l’intervention des forces Barkhane et aussi de celle des contingents des Nations-Unies présents sur le terrain.

L’occasion apparait bonne pour que les chefs d’Etat concernés s’expriment sur la voie à suivre désormais en vue d’arriver à bout de cette invasion djihadiste. Cette fois –ci, toutes les questions seront analysées et discutées sur un même pied d’égalité en tant qu’Etat, avec la partie française en vue d’aboutir de commun accord à une position consensuelle à mettre en œuvre à l’avenir.
A notre humble avis, la présence des forces étrangères à travers l’opération Barkhane est encore nécessaire et utile. Il suffira de revoir et consolider les méthodes de travail et d’action opérationnelle avec une meilleure coordination et une mutualisation des forces devant être dorénavant, de plus en plus offensives, car il s’agit bel et bien d’une guerre.
Toutes ces questions et de nouvelles doléances feront certainement l’objet de discussion approfondie au cours de la prochaine réunion convoquée par la partie française le 13 Janvier 2020 à Pau en France. Le souhait de tout le monde est qu’elle aboutisse à de bonnes résolutions de nature à rendre plus efficace le combat contre les djihadistes, une lutte qui risque d’être longue. Mais la victoire sera celle des paisibles populations du Sahel.

Jean- Pierre Adelui EDON
Ambassadeur, spécialiste des questions internationales.

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