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Le triomphe de la vérité

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Edito: Repenser la fiscalité


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En 1974, l’économiste américain Arthur Laffer a émis des hypothèses qui ont conduit à une des théories les plus discutées de la fiscalité. Il a dessiné en effet un simple diagramme pour illustrer un truisme de la politique fiscale. Prenons un taux d’imposition à zéro, c’est-à-dire que le gouvernement décide de ne collecter aucun impôt sur le revenu des citoyens. Il aura donc zéro franc comme impôt sur le revenu. Autre hypothèse, mettons le taux d’imposition à 100%.A ce niveau, le gouvernement n’aura rien non plus puisque personne ne voudrait travailler pour ensuite reverser la totalité de ce qu’il a gagné à l’Etat. Là encore, le gouvernement aura zéro franc, bien qu’ayant monté le niveau d’impôt au plus haut possible.   Entre ces deux extrêmes, subsiste pourtant une constante: lorsque le niveau des impôts est vraiment élevé, il y a toujours une possibilité de le baisser pour accroitre les revenus. En diminuant les impôts, l’Etat accroît les revenus des citoyens et les siens propres.

Lorsque les citoyens se plaignent qu’il y a trop d’impôts qui impactent leurs revenus, il faut se demander ce qu’il y a lieu de faire pour à la fois tenir compte de leurs déceptions mais aussi de la nécessité pour l’Etat d’avoir des ressources pour réaliser ses projets.

Quarante-cinq ans après la démonstration de Laffer, 15.000 articles ont mentionné la courbe de Laffer dans leurs titres. Et ce jeudi, le président américain Donald Trump a honoré Arthur Laffer de la médaille présidentielle de la liberté, la plus haute distinction civile des Etats-Unis. Laffer était déjà dans son équipe de campagne en tant que conseiller à l’économie. Il est coauteur entre autres, de Trumponomics: Inside the America First Plan to Revive Our Economy, un ouvrage publié en octobre 2018 qui analyse la conception économique de l’actuel locataire de la Maison Blanche. La courbe de Laffer est fondée sur l’idée qu’il y a une relation positive entre croissance du taux d’imposition et croissance des recettes de l’Etat.  Cette relation s’inverse lorsque le taux d’imposition devient trop élevé. En d’autres termes, les agents économiques surtaxés ont tendance à moins travailler ou, carrément, trouvent des moyens de fraude pour en payer moins ou pour ne pas en payer du tout. Selon Laffer, il n’est pas fiscalement rentable de dépasser un certain taux de prélèvement (situé à 30%, ce que Laffer appelle le « normal rate »). Au-delà, le taux est considéré comme un « prohibitive rate » et pousse les contribuables  à travailler moins, ce qui entraîne une baisse des recettes de l’Etat. C’est l’illustration la plus claire de l’adage selon lequel trop d’impôts tuent l’impôt.

Selon cette théorie, le Président américain Donald Trump a procédé dès 2017 à des réductions significatives d’impôt dont les effets se font sentir aujourd’hui. On peut ainsi voir que l’impôt sur les sociétés est passé d’une moyenne de 35% à 21%. Pour les individus, des réductions substantielles  ont été également opérées, compte tenu des niveaux de revenus.

Il ne faut pas imputer aux seules mesures fiscales l’embellie actuelle de l’économie américaine. Mais elles en ont été pour beaucoup dans la création de nouvelles entreprises et de nouveaux plans d’embauche dans les entreprises qui disposent de moyens supplémentaires pour créer des emplois.

Dans tous les cas, le taux d’imposition dépend non seulement des besoins de l’État, mais aussi de la structure des prélèvements obligatoires et de la façon dont ils sont perçus auprès de la population. L’histoire fiscale du pays, le contexte économique et les croyances des agents dans la situation économique future sont également des facteurs à prendre en compte.

Prenons le cas du Bénin. Si la loi des finances 2019 encourage les jeunes entreprises par des mesures fiscales incitatives, il n’en est pas de même des entreprises plus anciennes qui doivent faire face à des taux d’imposition dépassant parfois les 35%. A l’heure où l’Etat prépare le budget général 2020, il est utile de rappeler que l’évasion fiscale est l’une des résultantes des excès de la fiscalité, dans un contexte où les entreprises sont confrontées à d’immenses défis. Tenir compte de la courbe de Laffer en incitant les entreprises à rester au pays et à y faire prospérer leurs affaires, constitue le choix raisonnable de toute économie. Car, désormais, avec le protectionnisme sauvage du Nigeria, le Bénin offrira de moins en moins d’arguments d’attractivité en comptant sur sa proximité avec ce géant voisin. De ce point de vue, une politique fiscale agressive doit être repensée.

Par Olivier ALLOCHEME

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