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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le recul démocratique


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Disons ce qui est. Même si le scrutin a eu lieu hier, les incidents qui l’ont émaillé principalement dans les bastions FCBE constituent un énorme recul de la démocratie au Bénin. A Cotonou, Calavi, Ouidah et dans l’écrasante majorité des communes du pays, le vote s’est déroulé sans incident majeur, sauf à constater que la majorité des Béninois ne sont pas sortis. Après avoir enregistré un taux de participation de 65% en 2015, l’élection législative de cette année aura au grand maximum un taux de participation de 30%. Pour l’essentiel, ceux qui ne sont pas allés voter ont eu peur de la violence qui a été promise. « La guerre civile commence ce dimanche », me disait ma sœur qui me recommandait de rester gentiment chez moi. Dans beaucoup d’églises ce dimanche, les fidèles ont été priés de rester chez eux. Nous sommes face à la réalité de la violence électorale.
Pour la première fois depuis les violences de mars 1991, la situation du pays a failli basculer, notamment dans certains bastions FCBE. A Savè, Kilibo, Tchaourou, Parakou et dans quelques autres localités éparses, des scènes de violence encore inconnues jusqu’ici au Bénin, ont été enregistrées. Qu’on le veuille ou non, la police et l’armée se sont abstenues de faire usage des armes létales, sauf dans des cas extrêmement limités. Nous sommes retournés aux années 1960 où la forme d’expression électorale privilégiée était la violence. Ceux qui n’étaient pas contents ont forcé les autres à rester chez eux. Ils se sont imposés à tout le reste.
C’est tout le contraire de l’idéal démocratique ayant gouverné la conférence des forces vives de la nation de février 1990. Même les désaccords politiques les plus profonds doivent s’exprimer par le vote. Une bonne partie de la classe politique ne l’a pas encore compris et a contaminé la population qui n’a pas compris non plus que même l’abstention constitue une forme d’expression.
Dans le cas des violences de samedi et dimanche, elles remettent en cause notre capacité à réformer l’architecture politique nationale, sans provoquer les soubresauts que nous voyons. Ceux qui ne veulent pas des réformes, même s’ils sont largement minoritaires, veulent aussi s’imposer. Et c’est là où l’idéal démocratique est en cause. Pour avoir échoué à se faire entendre aujourd’hui, on peut se faire entendre demain, en utilisant la seule voie qui compte en matière démocratique, celle des urnes. Ce qui s’est passé samedi et dimanche dans quelques localités de notre pays, montre que pour beaucoup, la démocratie est consensus. Elle ne l’a jamais été et ne le sera jamais. Qu’on le veuille ou non, la loi démocratique est la loi de la majorité. La minorité, sans être réduite au silence, devra se réinventer pour conquérir la majorité, si elle entend renverser la vapeur.
Toute analyse sérieuse du scrutin de dimanche pourra conclure que même un parlement comme celle qui se dessine, constitue une menace pour le Chef de l’Etat. Il perdra facilement les communales de l’année prochaine, si tant est que le taux de participation d’hier est une forme d’expression populaire. Ce type de parlement peut propulser facilement également un opposant à la tête du pays en 2021. Dans toute démocratie organisée, l’opposition en aurait tiré conseil et pris avantage immédiatement pour les scrutins à venir.
Mais le schéma actuel basé sur l’usage de la violence et de l’anarchie, nous interroge. La démocratie est-elle réellement entrée dans nos mœurs ? N’est-elle pas au contraire un vernis dont nous nous gargarisons pour montrer que nous sommes en phase avec la marche du monde ?
Mon observation me permet de répondre par oui à la deuxième interrogation. L’idéal démocratique du Bénin est un ramassis de patrimonialisme moyenâgeux, de sophistication législative absconse et de médiocrité intellectuelle assumée. Trente ans après la conférence nationale, nous en sommes encore à expérimenter ce que même au Nigeria qui n’a connu la démocratie que très récemment, on ne redoute plus : la volonté affichée et assumée de défier la loi.
Malheureusement, il n’y a que l’anarchie qui attend les Etats de ce type. La démocratie est en effet le refus de l’expression des opinions par la violence, et l’acceptation de n’être gouverné que par la dictature de la loi, qu’on la juge juste ou non.
Pour le moment, il n’y a qu’à constater que pour une certaine classe politique de chez nous, nous en sommes encore très loin.

Par Olivier ALLOCHEME

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