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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le coup de Kagamé


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On parlera longtemps encore de l’élection ce vendredi 12 octobre 2018, de la ministre rwandaise des Affaires étrangères, comme secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie. Louise Mushikiwabo prend la tête de l’OIF au moment où son propre pays, le Rwanda n’utilise plus le français comme langue officielle. Le président rwandais ne parle pas français et n’a jamais caché son antipathie pour la France.
Faut-il le rappeler, la France a joué un rôle majeur dans le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994. L’opération Turquoise mise en place par l’armée française, sous l’égide de l’ONU, a mobilisé en effet 2 500 soldats français ainsi que plusieurs contingents africains dans le sud-ouest du pays et dans les camps de réfugiés de l’Est du Zaïre (actuelle République démocratique du Congo, RDC). Elle a permis de créer une « Zone humanitaire sûre » dans le Sud-Ouest, sur environ un cinquième du territoire rwandais. Le Front Patriotique Rwandais (groupe rebelle dirigé par Kagamé à l’époque) accusait la France de chercher à sauver le régime et les auteurs du génocide.
Kagamé n’a jamais caché que d’après lui, la France a aidé les génocidaires à disparaitre afin de les utiliser plus tard comme monnaie d’échanges diplomatiques pour continuer à jouer un rôle dans la région des Grands Lacs.
En avril 2014, lors d’un entretien au journal français Libération, le président rwandais avait déjà rappelé que « la France comme la Belgique ont joué un rôle néfaste dans l’histoire de [s]on pays, ont contribué à l’émergence d’une idéologie génocidaire ». Dix ans plus tôt,il avait attaqué la France dans un discours conduisant au départ précipité du représentant français d’alors, Renaud Muselier. Il a aggravé la situation le 24 novembre 2006 en rompant unilatéralement les relations de son pays avec Paris, suite aux mandats d’arrêts internationaux émis contre lui et ses proches par le juge antiterroriste français Jean-Louis Bruguière. Dans la foulée, en octobre 2008, il est décidé que l’enseignement à l’école rwandaise est désormais en anglais et non plus en français.
Mais le 29 novembre 2009, les deux pays rétablissent leurs relations, de sorte que le 25 février 2010, à Kigali, le président français Nicolas Sarkozy a pu reconnaître de « graves erreurs d’appréciation » et une « forme d’aveuglement » de la France.
Malgré tout, Kagamé est resté ferme. Une bonne partie de ses opposants sont tués, emprisonnés ou humiliés publiquement. Le Rwanda n’est pas du tout un modèle de démocratie.
L’un des plus célèbres est Patrick Karegeya, ancien chef des services de renseignement de Kagamé devenu opposant virulent. Il a été assassiné dans un hôtel sud-africain par les services spéciaux rwandais. La main de fer du maître de Kigali n’épargne guère les journalistes, enquêteurs et autres acteurs politiques dont certains ont été retrouvés morts alors qu’ils menaient des enquêtes sur le régime.
Mais l’admiration du monde a rarement faibli concernant Kagamé. Bill Clinton salue en lui « l’un des plus grands leaders de notre temps », Tony Blair l’appelle un visionnaire et Bill Gates travaille avec lui. Le président rwandais a été invité à prononcer un discours à la prestigieuse université de Harvard aux Etats-Unis, et a reçu des distinctions honorifiques dans bon nombre d’universités à travers le monde.
Parce que malgré sa dictature implacable contre ses opposants, Kagamé a permis à son pays de sortir de la guerre, par une relance économique exemplaire. La croissance économique du pays fait partie des plus élevés du continent et la lutte contre la corruption et pour la bonne gouvernance y donne des résultats très encourageants.
Pourquoi donc la France a-t-elle cédé face à Kagamé ? C’est clairement que le maître de Kigali a été plus fort. Mais la France a tout à gagner en ouvrant l’OIF aux pays anglophones désireux d’y entrer. Accessoirement, cette victoire rwandaise permet à la France de normaliser ses relations avec un pays qui joue un rôle de leadership régional en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.
Le Bénin a-t-il eu raison de soutenir la candidature rwandaise à l’OIF ? Absolument oui ! Le Rwanda est un partenaire privilégié de notre pays et les relations entre le Chef de l’Etat et son homologue rwandais sont parmi les meilleures. On peut donc admettre que notre pays aura tout à tirer de cette victoire.
Disons donc le mot : Le coup de maître de Kagamé en impose à la France, au Canada et à tout le monde, pour le bonheur de l’Afrique entière.

Par Olivier ALLOCHEME

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