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Le triomphe de la vérité

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Edito: Les raisons d’une débâcle


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L’avez-vous remarqué ? Une bonne partie des Béninois ont été surpris des résultats du BEPC 2018. Cette surprise est en elle-même surprenante : à quoi devrait-on s’attendre lorsque les élèves ont subi quatre mois de grève sur neuf ?

Oui, avec les 28,63%  de taux de réussite, environ 72% des candidats ont échoué. C’est-à-dire qu’environ deux candidats sur trois ont échoué à cet examen. Bien sûr, depuis lors, j’attendais que des acteurs politiques, des associations de la société civile montent au créneau pour fustiger ces résultats qui sont en-deçà des 50,56% enregistrés en 2017. Les politiques béninois s’intéressent peu à ces sujets qui concernent la plupart des parents. Après tout, ils ont raison, cela ne touche pas aux élections, la politique n’étant faite chez nous que pour parler des acteurs politiques et de leurs propres lubies, on n’a pas été surpris qu’aucun député, aucun parti ou mouvement politique n’ait même évoqué ce sujet, même de façon sibylline. BEPC ? Circulez, il n’y a pas élection, donc pas de raison de se gêner. Et pourtant, deux candidats sur trois ont échoué !

Tout se passe comme si les acteurs publics n’observent le système éducatif que de loin. Le regard qu’on y porte s’attend à des grèves, des grossesses abusivement attribuées aux enseignants ou encore à des résultats catastrophiques. Peu de gens se sont rendus compte que les mois de grève ne devraient que générer ce que l’on a vu. Les 64,44% de taux de réussite au CEP 2018 n’ont été possibles qu’à cause de l’abnégation de bon nombre de directeurs d’écoles primaires publiques qui, pour la plupart, ont trouvé le moyen de faire travailler leurs élèves, même en pleine grève. Bravant les mots d’ordre et les regards inquisiteurs de leurs collègues grévistes, ils ont tenu à préparer leurs candidats. Ce phénomène ne s’est pas observé seulement à Cotonou, mais aussi à l’intérieur du pays.

On en serait à ce niveau de résultat au BEPC si cet examen n’était d’une toute autre complexité. Et surtout si les professeurs vacataires qui forment environ 71% des effectifs enseignants au secondaire, avaient reçu une meilleure formation. Les enseignants permanents qui forment l’essentiel des personnels qualifiés du système sont massivement allés en grève, entrainant les résultats que l’on a vus.

A ce niveau, on peut déjà se rendre compte que les responsabilités sont largement partagées. Si trois enseignants sur quatre ne sont pas qualifiés pour le travail, ou ne sont pas suffisamment payés pour, on ne saurait raisonnablement attendre un miracle d’un système fonctionnant de cette manière. Ceci ne dédouane pas la responsabilité des enseignants eux-mêmes. Mais l’on n’oubliera jamais de rappeler qu’ici, pendant quatre mois sur neuf, les vrais enseignants sont restés chez eux.

Raisonnablement, l’on ne peut juger de la qualité d’un système à partir de déterminants aussi négatifs. Autrement dit, les résultats du BEPC, pas plus que ceux du CEP ou du BAC ne peuvent servir cette année à juger de la qualité réelle des enseignants, encore moins de tout le système. J’entends en effet certains observateurs jeter hâtivement le tort sur les enseignants. Et ils font semblant d’oublier que ces enseignants ont été absents des classes pendant presque la moitié de l’année. Là-dessus, ceux qui s’appuient sur ces résultats pour décréter  la nécessité d’évaluer (aussi) les enseignants du secondaire, devraient se rendre compte qu’un mauvais diagnostic est aussi sinon plus nuisible qu’un faux médicament. Et il s’agit ici d’un très mauvais diagnostic qui pourrait déboucher sur des solutions factices. Du reste, si l’on se rappelle les mésaventures du ministère des enseignements maternel et primaire dans le cadre de la pseudo-évaluation des enseignants, il y a une conclusion à tirer : aucune évaluation d’enseignants ne se fait comme on l’a fait.

Le mal fondamental de cette année, est d’abord la grève qui a paralysé les activités pédagogiques pendant une bonne moitié du temps scolaire. Fallait-il prolonger l’année pour permettre aux apprenants de rattraper le temps perdu ? Ne pas l’avoir fait a des conséquences visibles. Ne pas l’avoir fait conduit à bâcler une bonne partie des apprentissages, alors que les évaluations ont été faites, en bonne et due forme. Ne me demandez pas dans ces conditions, si tout cela aura des répercussions sur les années à venir : c’est évident.

Par Olivier ALLOCHEME

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