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Le triomphe de la vérité

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Edito: La rampe de lancement


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Mouhamadou Buhari était encore à l’aéroport d’Abuja lorsqu’il a décidé au dernier moment, de renoncer à aller à Kigali. Ce 21 mars 2018, a été adopté au Rwanda, l’accord de création de la Zone de libre échange (ZLEC) permettant aux citoyens de 44 pays africains d’échanger librement des biens et services entre eux.C’est un pas de géant qui est ainsi engagé sur la voie de la construction de l’économie africaine. Mais entre la bonne volonté manifestée à Kigali et la réalité du terrain, subsistent de nombreux obstacles que les Africains ont le génie d’inventer chaque jour pour éviter de faire des affaires entre eux.
Le renoncement du président nigérian provient des fortes pressions internes que lui faisaient non seulement l’Association des manufacturiers du Nigéria (MAN). Pour le président de l’Association, Frank Jacobs, le Nigeria devrait rester prudent jusqu’à ce que l’accès aux marchés et l’application des règles d’origine soient traités. Et de stigmatiser l’absence d’une consultation préalable de toutes les parties concernées avant la signature du traité et des autres documents afférents. Le cas du Bénin est presque identique : le gouvernement, bien qu’approuvant la déclaration de Kigali, a décidé en conseil des ministres, ce mercredi 21 mars, de ne pas adopter le traité avant d’avoir procédé à des études préalables et consulté les différents acteurs. Il faudra que le Parlement ratifie le Protocole sur la libre circulation des peuples en Afrique, l’accord de création de la Zone de libre échange afrcain (AfCFTA) ainsi que la Déclaration de Kigali.
Mais, ne nous leurrons pas. La ZLEC devrait créer un bloc commercial de 1,2 milliard de personnes avec un produit intérieur brut (PIB) combiné de plus de 3 400 milliards de dollars. C’est un énorme marché dans lequel les pays s’engagent désormais à supprimer les droits de douane sur 90% des biens et à libéraliser les services. Les industriels nigérians, qui ont peur de la concurrence étrangère, soulignent que les questions d’accès au marché, ainsi que celles liées à l’application des règles d’origine doivent être clairement définies. Il en est de même pour l’Afrique du Sud qui a juste signé la Déclaration de Kigali. Il faudra que 22 pays ratifient l’accord pour le rendre exécutoire. Plusieurs observateurs craignent que sa mise en exécution effective fasse encore dix ans, du fait des réticences qui émergent déjà de-ci de-là.
Et pourtant, en créant un marché unique qui s’étend du Cap au Caire, de Djibouti à Dakar, les pays africains viennent de faire un pas de géant susceptible de donner au continent un coup de pousse historique. C’est tout le commerce africain qui va enregistrer une véritable révolution. Une entreprise de Cotonou pourra librement vendre ses produits à Nairobi ou à Luanda. De même, une société installée à Rabat, Kinshasa ou Conakry, pourra vendre librement ses marchandises à Cotonou ou Parakou. Selon les statistiques, le commerce entre les pays africains ne représente que 17 ,6% des exportations de ces Etats en 2016, contre 70% en Europe. On remarque aisément que les pays africains, près de 60 ans après leur indépendance, ne sont pas capables de commercer entre eux. La plupart gardent encore des relations privilégiées avec leurs anciennes métropoles. Il est plus facile d’appeler Paris que Dakar ou Brazzaville. Briser la barrière qui empêchera la perpétuation de tels paradoxes, donnera un coup de fouet à nos différentes économies. Il ne sert à rien de produire si l’on ne peut vendre et surtout, il est vain de proclamer l’union entre des Etats qui ne peuvent pas commercer entre eux.
C’est d’ailleurs pour cette raison que l’ancien Président nigérian Oluségun Obasanjo a qualifié de criminels tous ceux qui ne supporteraient pas l’accord de Kigali. Mais le problème était déjà que les deux puissances économiques de la région (le Nigeria et l’Afrique du Sud), ne sont pas signataires du protocole. Et concrètement, le Bénin n’a pas des intérêts immédiats à le ratifier pour une raison simple : l’industrie béninoise sera vite écrasée par la déferlante venant d’ailleurs. Lorsque les Marocains, les Kenyans ou les Nigérians auraient le droit de nous envoyer leurs produits sans taxes de douanes, qu’avons-nous, nous les Béninois, à leur vendre en retour, dans leur pays ? Une zone de libre échange est perdante dans un pays où les industries balbutient.
Cependant, un pays comme le Bénin aurait totalement tort d’éviter d’entrer dans une zone de libre-échange. Autant elle peut être nuisible, autant elle constitue une arme puissante pour les industriels ayant besoin de marché.

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