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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le consensus d’Abidjan


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Il n’y a pas eu finalement d’annonces chiffrées à Abidjan. Le cinquièmesommet UE-UA qui a réuni dans la capitale ivoirienne quelque 83 chefs d’Etat et de gouvernement, a accueilli du 29 au 30 novembre, 5000 participants des 55 pays d’Afrique, de 28 pays d’Europe, de l’ONU et des organisations internationales. Le thème principal de l’événement « Investir dans la jeunesse pour un avenir durable », venait à point nommé après le drame de l’esclavage en Libye. Sur fond de tragédie libyenne, les participants avaient en main une occasion pour trouver une solution de fond au problème.
Il faut bien comprendre pourquoi le communiqué final n’a pas fait état de chiffres d’aide de l’Europe vers l’Afrique. Les paradigmes même de l’assistance internationale ont été ringardisés avec la pratique du win-win chinois qui ne laisse aucune chance aux anciennes méthodes. En mettant en avant d’abord, l’intérêt économique de ses partenaires africains, la Chine a rapidement dépassé les pays européens et se pose aujourd’hui en premier partenaire commercial de l’Afrique. Les échanges commerciaux entre l’Europe et l’ensemble du continent africain représentaient 286 milliards d’euros en 2015, avec une balance commerciale favorable de 22 milliards pour l’Union européenne (UE). Or le volume des échanges entre l’Afrique et la seule Chine a atteint 126 milliards d’euros en 2016 (49,87 milliards d’importations et 77,23 milliards d’exportations). L’Union Européenne reste le premier donateur de l’Afrique avec 21 milliards d’euros d’aide au développement versés en 2016.
Mais ce qui compte aujourd’hui, c’est moins les milliards d’aide versés que la construction d’une capacité africaine de production de richesse qui passe nécessairement par la promotion de l’industrie.
Pendant longtemps, les pays européens ont conçu le développement de l’Afrique comme une menace à leur propre prospérité. L’action diplomatique et commerciale mise en place n’a jamais tenu compte du fait que l’exploitation sauvage des ressources du continent par des multinationales euraméricaines qui n’y investissent que très peu, pourrait un jour déboucher sur un tel niveau de paupérisation que le revers en serait immédiat pour l’Europe elle-même. Nous y sommes aujourd’hui. Les dizaines de milliers de migrants, chassés par les guerres et la misère, sont aussi les produits de la conception néocoloniale du capitalisme européen. Cette conception n’accorde jamais qu’un rôle prédateur pour les multinationales euraméricaines en Afrique. Il faut maintenant sortir de ce schéma et intégrer l’idée que l’épanouissement des entreprises typiquement africaines fera le bonheur des entreprises européennes.
Après plus d’un siècle de capitalisme sauvage, la question est de savoir si cette nécessaire réadaptation, qui recadre les règles de l’économie de marché, peut s’opérer. Au moment où la Chine construit à tout rompre de grandes zones industrielles en Ethiopie ou au Maroc, l’Europe en est encore à se demander ce qu’elle pourrait faire pour rattraper son retard colossal. D’autant que Pékin ne semble guère pouvoir s’arrêter. Son gigantesque projet des Nouvelles Routes de la Soie, lancé il y a à peine quelques mois, et destiné à envahir l’Afrique (entre autres) de ses rails, de ses ponts, de ses routes, échangeurs et autres infrastructures de transports, pourrait lancer une autre frénésie.
Il faut un plan Marshall pour l’Afrique. Pas un plan Marshall hypocrite permettant aux oligarchies régnantes, de continuer à profiter des dividendes des importations, mais une véritable industrialisation basée sur l’incitation à la consommation intérieure. En consommant ce que nous produisons sur place et en favorisant l’intégration commerciale entre les économies de la région, il est évident que l’Afrique va lancer le train du réveil de sa créativité. Actuellement du moins, les structures économiques sont construites sur le continent pour que l’on importe tout, pour exporter à l’état brut des matières premières à prix fluctuants et bas.
Rien ne changera sur le continent si personne n’arrête ou ne réduit cette dépendance au profit d’une productivité interne aux Etats. Autrement dit, les vagues de migrants n’arrêteront pas d’inonder l’Europe si les jeunes ne trouvent pas d’opportunités pour travailler et gagner dignement leur vie sur place.

Par Olivier ALLOCHEME

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