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Le triomphe de la vérité

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Edito: A quand la justice ?


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Au Bénin, la justice n’est jamais innocente. Ses acteurs sont affublés de toutes sortes de suspicions, allant de la manigance politique à la basse corruption des magistrats ou des policiers. A l’heure où j’écris ceci, une famille se bat pour rassembler suffisamment d’argent à verser à un juge du tribunal de Cotonou, dans une affaire domaniale. Dans leur tête, sans cet argent, la partie adverse qui semble avoir les moyens de miser gros auprès du magistrat, pourrait bien l’emporter. Chacun est convaincu qu’il n’y a que l’argent pour faire décider un juge. Qu’ont donc fait les acteurs de la justice pour mériter une telle présomption de saleté ? A chacun d’interroger l’histoire pour voir combien de fois des magistrats félons ou des agents de police judiciaire véreux ont pu être condamnés ou radiés.
De sorte que dans ce pays, lorsque la police tente de mener sereinement une enquête judiciaire, il n’y a pas moins que des syndicalistes pour monter au créneau et tirer à boulets rouges sur la justice. Et menacer. C’est ainsi dans l’affaire Laurent Mètongnon, prenant fait et cause pour leur camarade toujours gardé à vue, les syndicalistes se sont fendus d’une déclaration incendiaire contre le régime Talon. Celui-ci chercherait à museler l’opposition où le syndicaliste communiste s’est fait remarquer ces derniers mois à travers une opposition des plus virulentes au gouvernement. Laurent Mètongnon était notamment aux premières loges des manifestations ayant marqué le rejet de l’examen par le parlement du projet de révision de la constitution. Et depuis lors, il n’a jamais ménagé le gouvernement et son chef, à travers des manifestations publiques et des sorties médiatiques dans lesquelles sa verve antigouvernementale le dispute à une rhétorique résolument communiste voire passéiste. N’est-il pas parmi les membres fondateurs du FSP ? N’a-t-il pas, lui un syndicaliste, choisi de dévoyer l’éthique syndicale, en se rabibochant avec des acteurs politiques qu’il n’avait eu de cesse de vilipender hier ? Et puis, pour finir, lui Mètongnon, n’est-il pas en réalité un anarchiste toujours prompt à entrer en guerre contre tous les régimes ?
Ce sont autant de questions qui viennent donner du poids aux suspicions les plus folles. Les syndicalistes soupçonnent la justice de pactiser avec le gouvernement. Certains acteurs politiques aussi. Que ce soit le FSP, Restaurer l’Espoir, une partie de la RB…, chacun y est allé de sa rhétorique suspicieuse pour montrer que le « prisonnier politique » Laurent Mètongnon, est une « victime » des « dérives du pouvoir sanguinaire de Talon ».
Jusque-là personne ne parle des 17 milliards indûment placés. Personne n’ose ouvrir la bouche pour se demander si les faits sont avérés. C’est à se demander si les milliers de travailleurs assujettis à la CNSS ne valent finalement pas grand-chose face au seul Mètongnon. C’est bien leurs cotisations qui ont été mises en danger par les placements hasardeux dont il est aujourd’hui question. La question se pose de savoir de quel droit chacun des acteurs veut dénier à la justice son devoir de savoir ce qui s’est passé.
Ce n’est évidemment pas les cotisations sociales de ceux qui crient aujourd’hui qui ont été mises en danger. Et chacun peut voir comment l’on passe par pertes et profits les pensions de retraites de milliers de travailleurs.
Le fait est que dans la même affaire, d’autres personnalités sont également écoutées par la justice. Pas plus tard que ce mardi, nous avons appris la mise en examen de l’ancien député Aboudou Youssao, dans le cadre de ce dossier. Il ne se trouvera personne pour organiser des marches en vue de clamer son innocence. Il en est de même du directeur général et du directeur administratif et financier de la CNSS au moment des faits. Pour mieux appréhender la situation, il suffit de se rendre compte que ces différentes personnalités sont aussi des Béninois disposant des mêmes droits et des mêmes devoirs que tous les autres citoyens.
Plus clairement, il y a lieu de constater que la pression exercée sur les magistrats vise précisément à faire pencher leur verdict dans un certain sens. Cette pression publique menée devant tous, tend à montrer comment nous avons perdu le sens même de la justice. Nous voulons une justice des forts au profit des privilégiés. Aujourd’hui, plus que jamais, les magistrats ont le devoir de montrer que la vraie justice n’est pas pour le siècle prochain.

Par Olivier ALLOCHEME

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