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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le quiproquo


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L’interdiction des travaux dirigés (TD) dans les collèges et lycées publics ne peut être qu’une mesure temporaire. Malgré tout le mal qu’on en a dit en conseil des ministres, ce mercredi, les TD sont irremplaçables dans le processus d’apprentissage aujourd’hui.
Une fois n’est pas coutume, je parlerai un peu de moi-même. Quand j’allais au Bac, je n’avais jamais suivi de TD. Mais notre professeur de biologie (on parle aujourd’hui de SVT) nous avait conviés à un TD pour dimanche, exactement à la veille de l’examen. J’étais plutôt curieux de savoir ce qu’il pouvait nous apprendre de nouveau. Sous une pluie mémorable (il y eut inondation ce jour-là à Porto-Novo), quelques-uns avaient suivi la consigne du professeur volontaire. Plus de vingt ans après, je reste convaincu que cette séance m’a fait du bien puisqu’une bonne partie des notions révisées, ce jour-là, étaient sorties, le lendemain. Révision et approfondissement : voilà les deux services que les TD rendent aux apprenants en plus de ce qu’ils renforcent leur confiance en eux-mêmes.
Ce n’est donc pas étonnant que les écoles privées en fassent l’une de leurs armes favorites pour faire réussir leurs apprenants. Regardez donc les dix premiers au Bac 2017. Neuf viennent des écoles privées qui toutes organisent des TD payants à leurs candidats. Dans la ville de Cotonou, le meilleur collège public au Bac depuis plusieurs années, le CEG Sègbèya, est connu pour avoir systématisé la pratique. Avec succès, puisque les résultats sont visibles. Dans une bonne partie des autres établissements publics, les parents d’élèves rechignent à payer, arguant du manque d’argent et surtout de ce que l’école est gratuite. Voilà le vrai problème.
Oui, il y a des directeurs d’établissements félons qui ont tôt fait de transformer les séances de TD en fonds de commerce. Comme dans toute initiative de ce genre, les copinages ne manquent pas dans le choix des enseignants devant faire les TD. Surtout les menaces adressées aux parents sur le paiement des frais y afférents ont tôt fait de donner mauvaise réputation à une pratique somme toute salutaire. Lorsque quelques brebis galeuses sabotent une pratique, il n’est pas indiqué de rebrousser chemin.
Les parents d’élèves au Bénin sont convaincus que l’école est gratuite. Aucune école n’est gratuite, nulle part. C’eût été le cas que l’école se serait écroulée d’elle-même. Dites-donc, si l’école est gratuite, qui achète les cahiers ? Qui donc paie les livres ? Qui achète les autres fournitures indispensables à l’apprentissage ? Depuis la vague des gratuités factices décrétées dans un souci vaguement populiste, les parents se révoltent dès qu’il est question de payer le moindre copeck. Alors que dans certains pays, comme en Chine ou en Corée du Sud, la plupart des parents consacrent jusqu’à 80% de leurs revenus à l’école des enfants, les parents béninois, surtout dans les écoles publiques, ont du mal à concevoir que l’école a un prix. Par contre, les mêmes qui n’ont pas d’argent pour acheter un cahier ou un livre, les mêmes qui vont menacer l’administration scolaire parce qu’on a exigé le paiement des frais de TD, sont aux premières loges des cérémonies mortuaires pour lesquelles l’on est prêt à dépenser des fortunes. Je vous passe les autres paradoxes, notamment le fait que beaucoup sont prêts à vendre leurs parcelles pour enterrer un parent, alors qu’ils sont capables d’écrire une lettre au Chef de l’Etat pour dénoncer un chef d’établissement qui demande 15.000 FCFA par an pour les TD organisés pour la réussite de leurs enfants.
70 à 80% des enseignants eux-mêmes n’envoient pas leurs propres enfants dans les établissements publics du fait de leurs résultats médiocres. Ne parlons même pas des autres catégories de cadres dont la plupart, en plus des TD, paient chèrement des répétiteurs pour leurs rejetons à la maison. Même aujourd’hui à l’université, dans les facultés dites classiques, des TD et autres TP s’organisent pour renforcer le niveau des apprenants.
Et ce n’est pas une spécificité béninoise. Dans des pays au système éducatif très performant comme la Chine et la Corée du Sud, les TD sont systématiques dans les écoles et se tiennent tous les soirs parfois jusqu’à 22h. Bien entendu, dans ces pays, l’Etat (ou parfois les municipalités) qui organise ces séances, a pris des dispositions pour le retour des enfants chez eux dans des bus appropriés.
A cause de quelques brebis égarées, il ne faut pas sacrifier des initiatives qui ont fait leurs preuves aussi bien au Bénin qu’ailleurs.

Olivier ALLOCHEME

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