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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le défi de la démonopolisation du coton


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logo journalFaisons le point. Depuis un mois qu’il est installé à la tête du pays, Patrice Talon a fait du coton une priorité. En trois conseils des ministres, la filière est bien restée au centre de ses préoccupations.  Dans le conseil des ministres du 13 avril, le gouvernement a d’abord mis fin aux réquisitions des usines d’égrenage de la Société pour le développement du coton (Sodeco), société  dont Talon est actionnaire majoritaire. Lors de ce premier conseil, la SONAPRA a été sommée de régler les redevances de réquisition, conformément au décret n°2014-533 du 25 août 2014 portant réquisition des usines de la société. Coût de l’opération :   12 milliards de francs CFA. On se rappelle que six usines sur les dix que possédait la société avaient été réquisitionnées le 10 janvier 2014 par le régime Yayi au moment où  l’État tentait d’annuler la cession à Patrice Talon de 17,5% de ses parts au sein de la Sodeco.   Au même moment, le gouvernement a prévu d’acheter des intrants pour un montant total de 20 milliards de FCFA pour le compte de la campagne cotonnière qui s’annonce.
Au conseil des ministres du 28 avril, le deuxième, l’accord-cadre qui déléguait la gestion de la filière au secteur privé à travers  l’Association Interprofessionnelle du coton (AIC) a été rétabli. Cet accord-cadre avait été annulé en avril 2012 à la suite d’accusations de malversations. L’AIC avait été démantelée parce que soupçonnée d’être aux mains de Patrice Talon qui en était le vice-président.    Une plainte avait été déposée « pour fraude » en raison « d’irrégularités constatées au cours de la campagne 2011-2012 ».  A la place de l’AIC, l’Etat avait décidé d’utiliser les CARDER dont le rôle a été revitalisé pour l’occasion. Ce qui a inspiré le mois dernier ce commentaire de Pascal Irénée Koupaki : « Ce cadre de transition était contraire à l’option fondamentale de libéralisation et aux lois de la République. La gestion transitoire a coûté cher au Trésor public et la filière connaît encore des difficultés ».
Ce mercredi 04 mai, le gouvernement a choisi de se pencher sur les producteurs eux-mêmes. À deux semaines du début de la campagne cotonnière, il a décidé   « de solder immédiatement l’ardoise de 19,5 milliards de francs dus aux cotonculteurs au titre de la campagne précédente ». On voit donc qu’en l’espace d’un mois, ce sont 51,5 milliards de FCFA qui ont été annoncés pour être injectés dans la filière, dont 39,5 milliards iront directement aux producteurs et 12 milliards à la SODECO.
Alors question : la filière a-t-elle généré suffisamment de ressources lors de la campagne dernière pour permettre de débourser autant d’argent en un temps aussi court ? Si l’on sait que lors de la campagne écoulée, les volumes produits n’ont atteint qu’environ 400.000 tonnes, on peut en douter. On voit aussi que cette fois-ci, comme l’année dernière, c’est le Trésor Public qui sera mis à contribution pour combler le gap éventuel. Selon les estimations du Ministère de l’Agriculture, la production pourrait baisser de 18 % cette année en raison de conditions météorologiques défavorables.
Mais ici, ce qui préoccupe le bas-peuple, ce sont surtout les craintes liées au  retour en force des sociétés du Groupe Talon dans la filière coton. Démantelé sous le régime Yayi, l’empire Talon est plus que jamais mis sur orbite. Il dispose des coudées franches pour reverdir la filière qui a enregistré ces dernières années des contreperformances régulières. Une bonne partie des cotonculteurs ont commencé à déserter la filière, emportés non seulement par les mauvaises récoltes mais aussi par la désorganisation structurelle qui y a cours. Désormais, le gouvernement n’aura aucune excuse pour ne pas faire de bons résultats.
Mais le revers de la médaille, c’est le renforcement du monopole du Groupe Talon sur la filière.   Ce sera un challenge presque inextricable pour les différents responsables engagés dans la gouvernance de la filière. Il faut se demander si cette gouvernance   ne sera pas prisonnière de ce monopole évident, au point de ne viser que les intérêts du Groupe Talon. Là où j’attends particulièrement le gouvernement, c’est surtout sur la mise en place    d’une industrie nationale de production d’engrais.
En cette matière, il faut dès maintenant une levée de boucliers de la société civile pour que les importations massives s’arrêtent. Vœux pieux ? Je veux bien croire que non.

Par Olivier ALLOCHEME

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