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Le triomphe de la vérité

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Edito : L’immolation de la qualité


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Les résultats des examens de fin d’année ont montré le sombre visage de l’éducation nationale. Les notes officiellement traficotées au BEPC ont donné un taux de réussite de 30,16%, c’est-à-dire qu’environ 70% des candidats ont échoué cette année. Et cela n’a été possible que parce que l’on a été obligé de racheter jusque dans l’ordre de 7 de moyenne, au moins. Les maquillages indécents orchestrés dans les cabinets ministériels, de concert avec les enseignants eux-mêmes, permettent jusqu’ici de nous mentir à nous-mêmes. Et il ne se trouve aucune autorité, aucun président d’institution, pas même celui du Conseil national de l’éducation pourtant dirigé par le respectable professeur Paulin Hountondji, il ne se trouve personne, disais-je, pour demander que l’on arrête tout au moins de mentir sur une chose aussi sacrée : l’avenir de nos enfants, c’est-à-dire, l’avenir de ce pays.

                J’ai été personnellement sidéré de remarquer une chose. A l’examen du CEP, le résultat national était  de 89,61%, c’est-à-dire, près de 90%. On a frôlé les scores staliniens de 99% obtenus il y a presque une décennie, dans l’euphorie fabriquée des nouveaux programmes. Et pourtant, à moins d’un mois de l’examen final de cette année, la plupart des examens blancs organisés dans les circonscriptions scolaires ont donné des résultats nettement moins dithyrambiques. On a eu droit à moins de 50% dans bien des cas. Et voilà qu’au sprint final, nos enfants sont devenus des génies. Rendons grâce à Dieu.

                Mais ce qui m’intéresse ici, c’est la qualité même des produits qui sortent de cet engrenage de mensonge. Personne ne peut le nier, malgré les chiffres tripatouillés à l’envi, le système éducatif béninois s’enfonce dans une crise abyssale. Il y a bien entendu, de gros efforts qui sont faits en matière d’infrastructures, de recrutement d’enseignants, ou encore en termes de taux brut de scolarisation. Malgré cela, il y a eu des décisions politiques de gratuité et de reversement mal pensées qui détruisent tout ceci.

                De sorte qu’on peut affirmer que la qualité du système éducatif ne correspond pas du tout aux dotations budgétaires consenties dans le secteur. Qu’on le veuille ou non, le budget de l’éducation est le poste le plus important du budget national. 25,23% en 2014, 20,84% en 2015, la part de l’éducation dans les allocations budgétaires au Bénin depuis plus d’une décennie, ne descend jamais en-dessous de 20%. Bien entendu, elle évolue en dents de scie avec une remarquable irrégularité. Ce sont près de 221,5 milliards de FCFA en 2014 et 216,5 milliards en 2015 avec une flopée de partenaires bilatéraux et multilatéraux.

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ourquoi tout cet investissement n’a pas vraiment servi à améliorer la qualité du produit final, c’est-à-dire le niveau des enfants ? La première raison est d’abord, l’approche dite par compétence, le nouveau programme, pour ne pas le nommer. C’est la calamité numéro un, et c’est sans commentaire.

                Il y a ensuite que la préoccupation des différents gouvernements depuis 2006, ne semble pas avoir été la qualité de notre système. Aujourd’hui, les chiffres de scolarisation maternelle et primaire sont très élevés, notamment avec les différentes gratuités instaurées. Seulement, l’accompagnement devant soutenir ces mesures n’a pas suivi et ne suivra  pas non plus. Le coût financier est tout simplement prohibitif, s’il faut améliorer à la fois la qualité du système et le taux  de scolarisation. Il y avait un choix politique à faire, l’Etat béninois a fait celui du nombre à des fins électorales, au détriment de la qualité. La conséquence directe, c’est que le système, à terme, sera difficile voire impossible à réformer, sauf à appliquer une thérapie de choc.

 Quelle est alors la troisième raison qui empêche le système de s’améliorer ?

                C’est la qualité des enseignants eux-mêmes. Les mesures de reversement prises il y a quelques années, n’auraient jamais dû être prises de la façon massive que l’on a vue. On a reversé tout le monde, sans tenir compte des profils réels des bénéficiaires. Ce fut une mesure à caractère politique qui a eu le mérite de stabiliser les enseignants concernés, mais en empêchant plus tard, une réelle formation de ceux-ci. Car, le danger, c’est qu’on ne peut faire plier du bois sec. Le mal qui a été fait risque d’impacter des générations entières de Béninois et constituer même une source de déstabilisation du pays.

                Le ver est donc dans le fruit. Les dotations budgétaires ne suffisent pas à résorber les problèmes de l’enseignement. Il faut encore que l’autorité consente à ne pas utiliser le secteur éducatif à des fins politiques.

Olivier ALLOCHEME

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