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Le triomphe de la vérité

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Edito: Match intergénérationnel


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J’avais pensé qu’en matière de stratégie électorale, Boni Yayi en connaissait un rayon. Ces dernières semaines m’ont pourtant donné la preuve du contraire. En matière de stratégie politique, il a été lamentable aux législatives et voilà que pour le contrôle du bureau du parlement, il montre une inaptitude presque infantile. Le duel Houngbédji-Koutché qui s’est joué hier à l’Assemblée nationale, résume à lui seul son incapacité à voir loin, ou du moins, à percevoir plus loin que le bout de ses intérêts. Il est vrai que depuis 2006, la classe politique béninoise est prise dans un match serré entre anciens et nouveaux.
Komi Koutché incarne la jeunesse aux dents longues, celle qui a su tirer son épingle du jeu en s’inféodant au pouvoir. Dans son sillage, on peut citer, entre autres, Christophe Vignigbé, DG FNPEEJ, Bernardin Aligbonon DG du Fonds national pour l’environnement, Djalil Assouma, DG Bénin Télécom, Nasser et Chabi Yayi, tapis dans l’ombre de leur père, ou encore tous ces jeunes ministres ayant fait leurs premières expériences politiques sous les ombrelles du changement. Trop souvent, ils disparaissent de la circulation dès qu’ils sont remplacés de leurs postes.
Il en est tout autrement pour le ministre des finances. Son ascension professionnelle fulgurante a certainement ébloui quelques-uns au sein de la mouvance. Mais mises à part des filiations récentes avec le chef de l’Etat, il reste une étoile filante qui n’a connu les rouages de la politique que ces dernières années. C’est pourquoi cela reste une outrecuidance majeure de le positionner à la tête de l’Assemblée nationale.
Entendons-nous bien. Il ne s’agit pas de refuser aux jeunes le droit de participer aux instances de prise de décision politique. Il ne s’agit même pas de revendiquer une quelconque suprématie de l’expérience des « vieux » sur l’inexpérience des « jeunes ». Il est question de l’Assemblée nationale qui reste la deuxième institution du pays. Et qui, à ce titre, ne saurait être laissée aux mains du premier venu, fût-il un jeune premier aux valeurs les plus clinquantes.
Aussitôt élu député pour la première fois de sa vie, le voilà positionné pour diriger la deuxième institution de l’Etat. C’est d’autant plus une imposture que Komi Koutché est censé diriger de vieux briscards de la politique comme Adrien Houngbédji, lui-même, Bruno Amoussou, Rosine Soglo, Mathurin Nago ou encore Sacca Lafia. Pourquoi diantre Yayi n’a-t-il pas pu céder à la voix de la raison en choisissant une figure plus consensuelle comme François Abiola dont il connait pourtant la fidélité ? En réalité, les mêmes erreurs de positionnement qui ont conduit à la débâcle des législatives ont été réitérées ici aussi. L’humeur, les relations familiales et surtout la peur panique de l’après-2016, ont conduit le maitre de la mouvance à multiplier les erreurs pour le plus grand bonheur de ses adversaires.
Face à Komi, qui retrouvait-on ? Un Adrien Houngbédji qui a derrière lui au moins une quarantaine d’années d’expérience politique. Il est le symbole de la vieille classe politique que Boni Yayi avait juré d’enterrer. Disons le mot, c’est une revanche qu’il prend sur le destin et surtout sur son adversaire de 2011. Sa victoire, en dehors d’être celle de l’expérience, est d’abord le fruit de la recherche par la classe politique béninoise de repères sûrs face aux incertitudes de fin de règne.
Mais Adrien Houngbédji n’est qu’un candidat de compromis. Il est évident que son score du 26 avril 2015 a marqué la différence avec tout autre candidat de l’opposition. Candidat de raison et non pas de cœur, il a réussi le tour de force de se rallier l’Alliance RB-RP malgré ses différends historiques avec les Soglo.
Derrière tout ce match, s’affrontent en réalité deux visions politiques antagonistes : celle d’un Yayi prêt à tout et à toutes les compromissions pour parvenir à ses fins, et celle d’un Adrien Houngbédji qui veut incarner la mesure et le respect de l’Etat.
Le duel féroce d’hier, marque ainsi le retour du Bénin à une option plus respectueuse de son histoire et de ses institutions.

Par Olivier ALLOCHEME

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