.
.

Le triomphe de la vérité

.

Sous L’Arbre à Palabre avec Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun, aménagiste du territoire:« Nos règles d’occupation du territoire sont vétustes »


Visits: 15

Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun n’a pas sa langue dans la poche. Ce spécialiste de l’aménagement du territoire et développement régional dit simplement ses vérités sur les grosses erreurs de gestion du territoire à Cotonou et partout ailleurs au Bénin. Il propose des pistes pour sortir de l’impasse des inondations et aussi de nouvelles dispositions légales pour faire face aux menaces qui assaillent le foncier au Bénin.

Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun, «Dans chaque commune, l’élu local doit connaître les zones urbaines, et permettre l’installation, les zones à urbaniser, afin d’assurer les enjeux du développement durable.

L’introduction

L’aménagement du territoire au Bénin, quels regards ? Je peux dire qu’on n’est pas en train de faire de l’aménagement du territoire au Bénin parce qu’aménager un territoire, c’est réussir à tout disposer en ordre sur le territoire. Vous n’êtes pas sans savoir que la non disposition des choses en ordre crée un certain nombre de problèmes, et donc a un impact négatif sur le territoire. Déjà quand on enregistre des impacts négatifs, on ne peut pas parler d’aménagement du territoire réussi.

Aménager un territoire, les appréhensions de Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun

Aménager un territoire, c’est pouvoir disposer en ordre chaque chose sur un territoire afin que notre installation sur le territoire n’ait pas d’impacts négatifs. Quand on parle d’aménagement du territoire, comme le nom l’indique, c’est l’aménagement à une échelle plus large sur le territoire. On viendra parler peut-être d’aménagement départemental, à une échelle plus serrée sur le département, on parlera d’aménagement communal, ça rentre dans les dispositions d’urbanisme serré sur une commune, et on parlera aussi d’aménagement de ville, avant aussi de parler d’aménagement intérieur. Donc c’est l’ensemble des règles qui nous amènent à savoir où est chaque chose pour préserver la vie future.

Où en est-on à propos de votre idée sur la table-ronde concernant l’aménagement du territoire ?

Ce n’est pas tombé dans des oreilles de sourds. J’ai remarqué que nos autorités commencent par intégrer à leurs réflexions le devenir du territoire. C’est vrai que j’avais suggéré une table-ronde et je continue toujours de la suggérer. Pour que notre nation profite des compétences de chacun, il faut qu’il y ait un creuset. Nous sommes convaincus qu’aujourd’hui nos règles d’urbanisme sont vétustes. Nous en sommes convaincus parce que, chaque fois, on crie inondation, lotissement mal fait, construction ne respectant pas les normes.

Ça veut dire qu’on ne fait pas de l’aménagement du territoire notre priorité. Alors, pour aller vers la priorité, il faudrait qu’on sache qui s’occupe de quoi, quand est-ce qu’il le fait, et comment il le fait ? Il faut une harmonisation des points de vue et c’est ce qui m’a amené, chaque fois, à revenir sur la table-ronde. Mais j’aurais appris que l’Etat, après avoir écouté nos discours, a mis sur pied une commission interministérielle pour réfléchir uniquement sur la question d’inondation. Or, la question de l’inondation n’est qu’une partie du volet aménagement du territoire. Donc un travail est fait.

Les propositions de Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun à une table ronde des acteurs de l’aménagement du territoire

On va d’abord s’entendre sur le diagnostic : que reflète le diagnostic, quels sont nos problèmes ? Pas pour copier directement ce qui se fait ailleurs. Mais aujourd’hui la chose capitale sur laquelle il faudrait qu’on revienne est le zonage du territoire. Aujourd’hui, on s’installe comme on veut, on ne distingue pas la zone inconstructible de la zone constructible donc habitable, on ne distingue pas la zone urbaine de la zone à urbaniser, on ne distingue pas la zone forestière de la zone agricole. C’est un mélange. Je vais d’abord penser à zoner le territoire, et on resserre le zonage sur chaque commune.

 Dans chaque commune, l’élu local doit connaître les zones urbaines, et permettre l’installation, les zones à urbaniser, afin d’assurer les enjeux du développement durable. Nous n’avons pas en réalité une zone agricole proprement dite. On ne sait où est-ce qu’il faut aller cultiver. Il fut un temps où on faisait la recherche des terres agricoles. Ça c’est les insuffisances de l’aménagement du territoire.

Vos actions prioritaires si vous étiez nommé ministre en charge de l’aménagement du territoire

Comme je l’ai souvent dit, nous sommes sur un territoire déréglé. Nommé ministre, est-ce que c’est le ministre qui fait le travail ? Le ministre coordonne. Du moment où nos préoccupations ont un impact négatif sur notre environnement, on ne peut pas dire qu’on est en train de faire de l’aménagement du territoire. Donc, c’est déréglé et il va falloir qu’on parvienne à régler. Il y a les règles en matière d’urbanisme, il y a les règles de la construction, il y a les règles de préservation de l’environnement.

 Et tout ça entre en ligne de compte dans un règlement de territoire. Je crois que dans l’environnement d’aujourd’hui, les ministres n’apprécient pas l’étendue du portefeuille. Quand tu es ministre pendant qu’en amont il n’y a pas les dispositions qui doivent te permettre d’être efficace, je crois qu’il vaut mieux accepter d’abord d’être à un niveau où vous dirigez un bureau de réglementation et vous faites asseoir toutes les bonnes bases avant d’aller coordonner. Aujourd’hui quand on est ministre, on se dit que les cadres vont faire le travail.

Mais est-ce que les cadres savent réellement ce qu’ils ont à faire ? Ils ont tellement de choses à faire qu’on constate aujourd’hui que les hommes se succèdent mais rien ne change, surtout dans notre secteur de l’aménagement du territoire. Rien ne se fait, on fait de l’à peu près.

Les inondations à Cotonou : une fatalité ?

L’inondation à Cotonou, c’est une mauvaise politique de gestion territoriale. J’avais rappelé entre temps que l’eau ne mérite plus uniquement d’être gérée. Elle mérite d’être managée. Il faut savoir comment recueillir l’eau, comment s’en servir, comment la préserver. Aujourd’hui c’est même heureux qu’on crie à l’inondation. On pourrait ne plus avoir du tout d’eau à Cotonou. C’est des phénomènes qu’on peut vivre.

 L’inondation à Cotonou part d’abord de ce qu’on appelle étalement urbain anarchique. C’est ne pas faire le zonage, ne pas savoir l’occupation rigoureuse du territoire et son corollaire. C’est l’étalement urbain anarchique qui fait qu’on prend Cotonou comme une zone qu’on peut entièrement habiter. Et moi je ne fais pas partie de ceux qui voient Cotonou comme une zone carrément humide. A Cotonou on peut apprécier la nature de ces inondations et adapter des types de construction. C’est un territoire. Si on était en pénurie de parcelles, donc de zones constructibles, on chercherait à gagner de la place sur la mer, sur les lagunes, partout.

 Voilà un peu ce que je peux dire concernant Cotonou. Maintenant, c’est vrai que le niveau de Cotonou est plus bas que le niveau de la mer. Donc, c’est là que doivent s’imposer les notions de management de l’eau. L’eau que reçoit Cotonou, ça s’éventre, quand le niveau de l’eau est très élevé au nord, c’est bas à Cotonou. Quand ça diminue au nord, ça augmente à Cotonou. Ça veut dire que l’eau quitte le nord pour Cotonou. Dans ces conditions, quand je parle de management de l’eau, c’est qu’il faut pouvoir penser aux consommateurs d’eau.

Alors, qui peut consommer cette eau-là ? Si on peut dévier l’eau à Cotonou, on pourrait s’en servir pour l’irrigation et donc, développer l’agriculture, on peut s’en servir pour développer l’électricité. C’est des projets qu’on pense coûteux mais c’est un retour sur investissement garanti. Alors, si on ne veut pas que l’eau arrive à Cotonou, il y a des types de protection rapprochés et il y a des types de protections éloignées ou diffuses. Rapprochées, c’est la solution qu’on trouve in situ, pour protéger Cotonou ; éloignées, c’est des dispositions qu’on trouve en amont, ici c’est le nord.

Si toutes ces dispositions sont prises, Cotonou peut être en dessous du niveau de la mer, et on va bien profiter du territoire. J’avais dit aussi que quand on finit d’explorer les moyens de protection, on peut relever le niveau de la berge de Cotonou, on peut ériger des ouvrages de rehaussement de la berge de Cotonou, qui permettront à Cotonou de ne pas recevoir l’eau. Maintenant il peut arriver que, malgré les dispositions prises, certaines localités soient menacées par l’humidité.

Là, on analyse le type de construction qui est adapté à ces localités-là. Alors, quand on dit que Cotonou sera inhabitable d’ici un certain temps, je dis que Cotonou peut être habité pour mille ans. Il revient donc à prendre les précautions nécessaires.

Le problème du foncier, un handicap pour l’aménagement du territoire ?

Non seulement ça constitue un handicap pour l’aménagement du territoire, mais en plus le volet lotissement doit permettre à l’Etat de devenir propriétaire du foncier. Quand l’Etat n’est pas propriétaire de foncier dans un pays, c’est un handicap au développement : quoi que l’Etat veuille faire, il y a un surcoût, c’est le renchérissement du coût de nos projets. L’Etat même, pour faire passer sa voie, aura acheté du foncier. C’est bien grave.

Or, juste une petite réflexion permet aux autorités d’être propriétaires du foncier. Aujourd’hui non seulement l’Etat n’est pas propriétaire mais en plus il est le plus gros locataire. C’est une catastrophe qui pointe à l’horizon. Les gens préfèrent louer à l’Etat parce que l’Etat est le plus offrant. Et le loyer est renforcé. Quand le loyer est renforcé, c’est en déphasage avec la bourse du Béninois. Ça crée d’autres problèmes sociaux.

Les zones reconnues humides de Cotonou

J’ai juste un petit problème : qu’on reloge l’eau. Quand on reloge l’eau, on peut vivre sur l’eau mais concéder à l’eau sa demeure. Les zones de Vossa sont reconnues comme des zones humides. C’est vrai que les gens ont remblayé les bas-fonds. La solution n’était peut-être pas de remblayer pour habiter. Je dis donc de reloger l’eau, ensuite on pourra savoir les zones habitables. Si on finit d’occuper les espaces secs, on peut lotir l’étendue de l’eau et imposer le type de construction. Cotonou est déjà une zone entièrement urbaine. On va parler plutôt des zones à protéger.

Sinon je risque de rejoindre ceux qui disent que Cotonou n’est pas du tout habitable. On peut habiter partout, même sur l’eau, ça dépend du type de construction. Empêchez les gens de faire du remblai pour s’installer. Cotonou est déjà une zone urbaine et le problème n’a pas été posé en son temps. Si le problème avait été posé, on devrait disposer d’une zone forestière à Cotonou, d’une zone agricole sur les banlieues de Cotonou pour permettre aux agriculteurs de vivre avec les fonctionnaires. A Cotonou il n’y a plus de zone à urbaniser. Tout ou presque est déjà urbanisé en désordre mais on pourrait parler de zone à protéger à Cotonou.

Les propositions du spécialiste pour contrôler les inondations à Cotonou

On peut lotir l’étendue de l’eau et imposer le type de construction. Donc, si on va parler du zonage de Cotonou, Cotonou est déjà une zone entièrement urbaine. Les zones humides comme Agla doivent être protégées. On les protège, l’eau va toujours exister mais on ne fera que la reloger. C’est dans cette logique que se développe la construction de bassin. Toute activité a un coût. Vous n’avez pas vu les collecteurs qui ont été réalisés dans Cotonou ?

Ça fait douze milliards de francs. Est-ce que vous n’avez pas vu que les collecteurs sont tous submergés ? Tout est encore dans l’eau. Ça veut dire que ce n’est pas encore la solution. Et ça c’est un investissement. Autant prendre un peu de recul, penser à reloger l’eau donc enlever certains bâtiments. Quand je dis reloger l’eau, l’eau a besoin d’être dans une contention. Il faut un bassin de contention pour l’eau. Et dites-vous qu’on peut reloger l’eau et s’en servir encore. Dès qu’il y a feu quelque part, le sapeur-pompier peut aller y prendre de l’eau. Ça peut être un abreuvoir pour les animaux. Ça dépend du type de bassin qu’on construit. Il peut y avoir un grand bassin où il y a un abreuvoir.

Et c’est dans le grand bassin que le sapeur-pompier peut revenir mais, on se serait assuré qu’on a relogé l’eau. Reloger l’eau, c’est comme on reloge un homme. On lui rétrocède sa demeure. Donc, il faut suffisamment de bassins dans Cotonou et ça va être des ouvrages, des zones à protéger. On n’y touche pas, naturellement. Dans certains cas où les propriétaires possèdent un titre foncier et que l’Etat n’arrive pas à développer la réflexion pour les sortir des lieux pour reloger l’eau, on leur impose un type de construction. Ça dépend de l’appréciation des aléas en matière de prévention des risques d’inondation.

 Ça dépend de la profondeur de l’eau, ça dépend de sa vitesse. Si la profondeur de l’eau est importante donc entre 1,5 mètre et 2 mètres et que la vitesse est forte, celui là qui s’y installe crée encore des problèmes à l’Etat. L’Etat ira à son secours comme quand les gens sont inondés, les mêmes autorités vont leur dire : « on vous vient en aide ». C’est vrai que c’est un peu de la politique mais c’est une réalité, ça coûte pour l’Etat. Donc, si on apprécie les aléas, on voit que là, c’est un aléa fort. Mais pour moi plutôt, il faut une solution de rechange et dire à cet occupant où il doit s’installer de façon adéquate.

 Maintenant, dans d’autres cas où on voit que la vitesse de l’eau est faible, même si la profondeur de l’eau est importante, on impose tout simplement à quiconque veut s’installer, un type de construction. Des constructions sur pilotis et des clôtures ajourées par exemple. Elles permettent qu’on s’installe mais permettent aussi à l’eau de prendre toujours par son chemin naturel et évitent que les édifices soient des obstacles à l’eau. Maintenant, dans les cas de programmes d’intérêts général (PIG), le titre foncier, ce n’est rien du tout.

L’Etat a le pouvoir et nul ne peut empêcher un PIG. Si le cadrage existe, on lui montre les impacts que son installation a sur le territoire, il doit pouvoir quitter. L’Etat est trop faible dans notre pays. C’est pourquoi on parle donc de repenser en urgence la question de la gestion du territoire, relire les textes parce qu’il y a certains qui ne sont pas informés. Il faut quand même noter globalement que moi, je ne dis pas qu’on ne peut pas vivre dans une zone humide. On peut vivre dans une zone humide avec des précautions.

On peut ne pas reloger tout le monde mais reloger ceux qui sont dans le périmètre du bassin. Mais, on ne va pas dépenser douze milliards pour les reloger ! Ce n’est pas douze milliards qu’il faut pour reloger tous ceux qui font obstacle à l’eau. On peut aussi jouer sur le concept de l’intercommunalité pourquoi pas.

L’expropriation

En fait, l’Etat occulte un certain nombre de dispositions. Il y a la science de l’expropriation et c’est du pouvoir de l’Etat. Et l’expropriation a des étapes. Il y a l’étape amiable où on peut négocier et il y a la deuxième étape qui est judiciaire. Il y a le juge de l’expropriation qui tranche. Il doit y avoir une structure qui fixe le coût. Et à un moment donné, quand tu n’es pas d’accord, on t’exproprie. Il faut dire quelque chose.

Face à une préoccupation d’intérêt général, le titre foncier et les autres documents sont inopérants. J’ai parlé de la science de l’expropriation. Est-ce que les gens la maitrisent ? C’est ça. C’est comme la place de l’indépendance à Porto-Novo où en son temps une expropriation avait été faite par les autorités mais aujourd’hui, on n’a pas de document. C’est ne pas maîtriser la science de l’expropriation. L’Etat doit pouvoir être fort. Vous savez, c’est parce qu’on ne pense pas durable.

Sinon, vingt ans plus tôt, on devrait savoir quelle infrastructure occupera une place sur le territoire et réserver un emplacement à cet effet afin de pallier les expropriations en cascade. Comme c’est le cas par exemple lors de l’érection d’échangeur de Godomey. C’est le manque de planification territoriale. Aujourd’hui, le problème s’est posé à Cotonou. Je suppose que quelqu’un veuille construire un bâtiment à l’entrée de Parakou où on n’a pas encore pensé peut-être le développement futur. Ça veut dire qu’on ira négocier avec lui dans quelques années si entre temps son ouvrage occupait la place d’un édifice public.

Normalement, les lotissements qui se font à Parakou aujourd’hui doivent être associés aux enjeux de développement durable. En matière d’aménagement du territoire, il y la planification spatiale qui permet de savoir et de prévenir l’occupation de l’espace. Une bonne planification spatiale permet d’éviter les expropriations à de coûts faramineux et aussi une économie durable.

La place du Délégué à l’aménagement du territoire dans un Etat

Le Délégué à l’aménagement du territoire est le gardien du territoire. Jusqu’à aujourd’hui, moi je n’ai pas vu ce qu’il fait en faveur du territoire, je crois qu’il ne comprend pas lui-même son rôle de gardien du territoire. Quand je dis gardien, vous comprenez. Si on te confie quelque chose, quiconque veut la toucher en contournant les normes, tu vas réagir et appeler donc celui qui t’a confié la surveillance du territoire.

Il est le surveillant du territoire. Le Délégué à l’aménagement du territoire, c’est un mot nouveau qu’on a commencé à entendre sous le ministre Luc Gnacadja. La première année devrait servir à asseoir les bases. La deuxième devrait servir peut-être à faire une vulgarisation des nouvelles dispositions avec des échéances et la troisième année devrait être destinée à commencer à appliquer. Quand un Délégué à l’aménagement du territoire est installé, sa première activité est de procéder à un diagnostic territorial afin de faire asseoir les bases juridiques nécessaires.

Sa deuxième activité sera d établir un planning opérationnel pour informer et dire que plus rien ne sera comme avant ,plus aucun désordre sur le territoire n’est permis, plus d’anarchie territoriale. Et sa troisième activité sera de passer à l’application rigoureuse des textes. Par la suite, il initiera avec les experts, les différents documents des planifications spatiales au service de l’état et des collectivités territoriales.

Je crois que ça fait bientôt dix ans que le ministre Gnacadja est passé à la tête du ministère. Si on avait pris les trois premières années pour régler le problème pendant que ce n’était pas encore crucial, aujourd’hui, vous saurez qu’en tant que détenteur du titre foncier, vous ne devez pas être un obstacle pour un projet d’intérêt général ; vous devez savoir qu’en tant que détenteur du titre foncier, avant d’ériger la construction, vous devez faire appel au Délégué à l’aménagement du territoire pour apprécier le type de construction. Le Délégué du territoire bien fort peut remettre en cause permis de construire, titre foncier…parce que c’est lui le surveillant du territoire. Si ça n’avance pas, s’il y a un problème sur le territoire, c’est lui qu’on doit interpeller.

Je ne dis pas que cette Délégation ne joue pas son rôle mais son rôle n’est pas visible sur le territoire. Peut-être qu’il y a une autre façon de jouer mais pour moi, son rôle n’est pas visible sur le territoire. Donc, normalement, si je prends l’exemple vivant de l’église d’Agla, quand les gens voulaient construire, il peut venir s’opposer et dire « tel que j’apprécie les aléas, c’est peut-être un aléa moyen. Donc les chances pour que la zone ne soit pas inondée ne sont pas trop fortes mais si le clergé tient vraiment à y rester, il devra adapter un type donné de construction ».

A des endroits, il va dire « vous ne devriez pas construire ici ». Il devrait jouer ce rôle. Au niveau du territoire en général, quand le Chef de l’Etat dit : « écoutez, j’ai un grand projet, je dois construire cet hôpital qui doit finir d’ici un an. Démarrez demain ! » Un bon Délégué doit lui dire : « N’occultons pas les dispositions. Vous m’aviez confié la surveillance du territoire, il ne faudra pas dire plus tard que mon avis a été recueilli. Laissez-moi quelques jours pour que très rapidement, je puisse voir si la zone est constructible, quel type de construction imposé et puis je donnerai mon quitus pour que le projet soit réalisé ». C’est un rôle un peu semblable au rôle du directeur des marchés publics.

Le maire le plus reculé, avant de poser un acte dans le domaine financier, doit avoir l’aval du Délégué du contrôle financier. C’est exactement la même influence que le Délégué à l’aménagement doit avoir sur le territoire. C’est la même chose. Pour faire quelque chose sur le territoire national, il faut l’avis du Délégué à l’aménagement du territoire. Normalement, le plan de travail devrait être élaboré et vulgarisé.

Il doit y avoir dans chaque localité des répondants, des surveillants qui vont chaque fois l’informer de ce qu’il n’y pas synergie dans les actions. Aujourd’hui par exemple, plusieurs ministères s’occupent du domaine de la construction. Les actions à mener sur un territoire, doivent être des actions concertées. Ceci pour garantir un aménagement durable du territoire.

La nécessité de retoucher les lois sur la décentralisation

D’abord, l’organe désigné pour surveiller l’aménagement du territoire doit être rattaché au Chef de l’Etat. Parce que la politique de l’aménagement du territoire doit être une politique prioritaire pour les plus hautes autorités du pays. Si c’est leur priorité, le maire, roi qu’il soit chez lui, est quand même sous l’autorité du Chef de l’Etat. Alors, si le chef de l’état, ayant juridiction sur tout le pays, dévoile sa vision, ce n’est pas au maire de s’en écarter. Les maires doivent réussir à exprimer leur vision avant tout à la Délégation à l’aménagement du territoire pour prise en compte.

Il doit y avoir un conseil national à l’aménagement du territoire composé de nos élus ou de leurs représentants qui doivent savoir ce que c’est que l’aménagement du territoire donc la science, qui doivent savoir ses avantages et les effets néfastes si on n’en fait pas une priorité. Maintenant, en ce qui concerne les maires, ce n’est pas moi qui ai façonné la loi. Il y a une loi qui a dit que pour être élu local, il suffit juste de savoir écrire et lire son nom. Aujourd’hui, il n’y a pas ce qu’on peut faire sans la ressource humaine qualifiée. Je prends l’exemple de « l’Evénement Précis ».

Si vous recrutez des journalistes qui ne font pas l’affaire, n’est-ce pas l’image de « L’Evénement Précis » que vous véhiculez ? Alors, le directeur de publication doit veiller à composer une très bonne équipe de journalistes pour rehausser l’image de la structure. Donc, si on veut pérenniser nos actions, il faut compter sur des ressources humaines de qualité. Si on veut pérenniser nos actions au niveau des communes, il faut compter sur des ressources humaines de qualité. Cette loi-là, le législateur en son temps a peut-être fait du sentimentalisme, n’a pas voulu d’un développement du Bénin pour tout de suite.

Parce que c’est un frein pour la visibilité des actions au niveau de nos communes. Il faut que les gens retouchent ces lois-là. Moi, j’avais même pensé, quand on disait relecture de la constitution, que les gens allaient toucher à ces dispositions-là. Moi, je me suis amusé à catégoriser les élus que nous avons eus depuis neuf ans qu’on parle de décentralisation. Dans certaines communes, c’est le maire seul qui est lettré; dans d’autres c’est le maire et son conseil communal qui sont légèrement lettrés et la troisième catégorie où tout le monde est lettré de bon niveau.

Dans ces trois catégories, c’est une catastrophe vu que les élus ont très bien des notions en matière de développement local. Pour donc la visibilité des actions au niveau de nos communes, il faut que les gens révisent ces lois-là.

La carte d’aménagement de Cotonou

Oui c’est par un cabinet canadien où il faut faire passer des collecteurs par endroit. Il faut vous dire que, j’ai été toujours clair dans mes analyses. Le problème de Cotonou n’est pas de canaliser l’eau. C’est de manager l’eau. Je n’ai jamais été pour les collecteurs qu’on réalise dans Cotonou. Ça règle le problème un tant soit peu, mais cela ne sera pas durable. Moi je connais mieux les problèmes de Cotonou que le blanc qui vient porter ses avis.

Je suis à Porto-Novo et je connais mieux les problèmes que cette ville rencontre en matière d’inondation que l’expert qu’ils vont importer du Canada pour comprendre lui maintenant les problèmes de Cotonou. Les experts ne sont pas ailleurs, mais plutôt chez nous. Ils maîtrisent mieux les réalités du Bénin et de ses villes. Il faut vous dire que si vous les voyez venir au Bénin, ce n’est pas pour venir humer l’air mais pour chercher de l’argent.

Approche sur le lotissement au Bénin

D’abord, nous ne faisons pas de lotissement au Bénin, nous gaspillons plutôt l’espace. Le lotissement est un outil de développement. A ce jour, nous constatons que ça n’a pas abouti à un développement. Il faut revoir la méthode. Le lotissement est un outil de désenclavement. Les lotisseurs ne sont pas des professionnels. Si on faisait de très bons lotissements, l’Etat devrait être propriétaire de foncier. Car quand on fait de lotissement dans une localité, il y a ce qu’on appelle coefficient de réduction en faveur des équipements collectifs. Or ce qu’on applique dans notre pays ne sert qu’à faire les voiries, et quelques infrastructures sociocommunautaires.

 Si on fait un calcul rigoureux de la superficie qu’occupent ces réalisations, cela représente un prélèvement environs 17% par parcelle lotie. Mais au minimum, nos localités appliquent dans les opérations de lotissement, un coefficient de réduction d’au moins 37%. Si je considère même une moyenne de 35% comme coefficient de réduction, la différence, ça passe par où ? Ça devrait être des réserves de foncier pour l’Etat.

A ces réserves, il faut maintenant adapter un mode de gestion. Alors pour y parvenir, je vais rappeler qu’on ne lotie pas tout un territoire. On fait des lotissements de priorité car le lotissement de développement est celui de priorité. Avant toute opération de lotissement, on doit se poser certaines questions fondamentales. Est-ce que réellement nous avons besoin de lotissement ? On doit premièrement avoir une vision qui sous-tend le lotissement. On doit définir ceux qui en ont besoin. Voulons-nous lotir, dégager des réserves ?

 On peut lotir pour corriger une installation anarchique. On peut initier un lotissement parce que l’Etat veut profiter des coefficients de réduction pour constituer son patrimoine foncier. Donc après avoir équipé le territoire par des voies et infrastructures sociocommunautaires, leurs réserves constituent une propriété insaisissable de l’Etat parce que c’est issu d’un lotissement. Voilà donc un moyen très simple pour que l’Etat soit propriétaire de foncier.

 Si de lotissement en lotissement, l’Etat arrive à constituer des réserves, il aurait eu une matière en échange pour convaincre l’investisseur. La disponibilité d’un foncier sécurisé peut motiver l’investisseur. Même s’il faut céder le foncier à un investisseur, ce sera fait à coût réel. Alors le lotissement tel que je l’ai défini, pourrait pallier la spéculation foncière. Parce que, l’Etat disposant d’une réserve de fonciers peut décider de vendre à un coût retenu donc par l’équipe communale ou les autorités centrales. L’Etat peut donc faire du social.

Là où, aujourd’hui on achète des parcelles à cent millions de francs Cfa, n’est-ce pas parce qu’on est tenu d’en acheter et parce qu’il n’y a plus d’alternative. Si quelque part à Cotonou, on vous présente une parcelle de 200 mètres carré de superficie qu’on veut vous vendre à cinquante millions de francs CFA, et que la mairie vous présente la même parcelle à dix millions de Francs CFA, je crois que c’est chez le maire que vous irez. Les autorités à divers niveaux ont un grand rôle à jouer pour la maîtrise du foncier afin d’éradiquer cet avènement de spéculation sans cesse croissant.

Des ambitions politiques ?

Je n’en avais pas. Mais aujourd’hui j’ai trop d’ambitions politiques. Simplement parce que je suis d’une localité qui pour des raisons politiques dispose de deux arrondissements, l’un appelé Cana 1 et l’autre, Cana 2. C’est bien une transformation politique. Donc je suis de Cana 1 qui est un arrondissement reculé. Aujourd’hui, Cana a deux chefs d’arrondissement. Il y a un qui n’est pas de Cana, c’est-à-dire d’une autre localité mais comme il n’y a pas d’homme représentatif à Cana, l’unique qui était élu a pris la tête de l’un des deux arrondissements et l’autre dont je parle est venu bénéficier de second.

Il faut vous dire que le bureau de l’arrondissement dirigé par ce dernier reste pour la plupart du temps, toujours fermé. Là, quel intérêt il a à venir travailler pour le développement de Cana ? Il n’a pas son électorat chez nous mais plutôt chez lui. Cela veut dire qu’il y a un vide dû à la politique politicienne. Moi, je n’ai pas d’ambition politique politicienne mais j’ai d’ambition politique de développement.

 Et en ma qualité de consultant en montage d’opérations en aménagement, urbanisme et immobilier, je dois être le conseiller de l’élu local. Dans les pays développés, ils ont compris au point où ceux qui ont mon profil sont appelés des AMO (Assistants maîtres d’ouvrage), sans lesquels l’élu ne prend aucune décision pouvant toucher le territoire et même en cas de signature des contrats partenariaux. Bref, on ne peut pas faire de développement sans la politique. Donc pour sortir mon arrondissement de l’ornière et sortir mon village de sa précarité, il faut que je fasse la politique de développement.

Les consultations électorales de la course de 2013 et des actions engagées

S’il n’y a pas de candidat, moi je n’aimerais plus que quelqu’un d’ailleurs vienne enfoncer mon arrondissement dans le gouffre. Je ne veux pas que les gens abandonnent davantage mon Cana d’origine. Comme je le dis, la bonne gestion d’une cité est fonction de la capacité des hommes qui sont à la tête de cette cité-là. Avant mes actions étaient plus concentrées sur les enfants du village qui voulaient abandonner les classes pour des raisons de vulnérabilité de leurs parents.

Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun, entouré des journalistes de l’Evénement Précis

 Je leur venais en aide. J’ai une association dénommée l’Association pour le Développement Local de Canan-Adokouinto (AdeLCa) qui fonctionnait depuis et dites-vous cette association ne parle pas politique. Comme je l’ai signifié aux membres, elle est apolitique. On parle vraiment développement. Il y a un marché appelé « Adokouin » qui est un marché ancestral abandonné depuis 1800,il porte d’ailleurs le nom du village. Mon association veut le rénover. On est entrain de construire un hangar là sur fonds propre. Les amis donnent un peu, ceux qui sont de bonne volonté aussi, et moi-même j’ajoute ce que j’ai. On va l’inaugurer en janvier prochain par la grâce de Dieu.

C’est année scolaire par exemple et sans pourtant suppléer au Grand frère VODONOU qui a beaucoup fait pour la localité, mon association, avec ces maigres moyens a eu à venir en aide aux écoliers et élèves par des fournitures scolaires et pense très prochainement distinguer les brillants.

Conclusion

Il faut que nos autorités sachent que tout ce qu’ils font repose sur un territoire et sur le foncier qui doit être sacré pour nous. Si on peut parvenir à court terme à relire le code de l’urbanisme, doter le Bénin d’un agenda spatial, tenir la table ronde que j’ai souhaitée, cela serait une grande satisfaction pour moi. Je parle en ces terme parce que mon seul souci c’est de voir réglés dans mon pays les problèmes d’aménagement de territoire en tant que professionnel en la matière.

 Je mesure les dégâts de notre laxisme d’aujourd’hui. Face à l’étalement urbain anarchique, il urge que quelque chose soit fait. Tel qu’au 31 décembre on dit que la loi des finances de l’année devient caduque et on l’actualise, c’est la même chose qui devrait être faite en ce qui concerne le code de l’urbanisme et de la construction, les lois sur l’occupation et de gestion du territoire.

Carte d’identité

Entrepreneur par défi

Allure imposante, robuste avec une taille moyenne, c’est Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun. « Mon père a toujours voulu que je sois fonctionnaire », révèle-t-il. « Mais moi je me disais que lorsque je vais rentrer dans la fonction publique, je serai tenté de détourner parce que j’ai beaucoup d’ambition. Or je ne vais pas détourner parce que je n’aime pas la honte ». Tout compte fait, l’homme ne se plaint pas, bien qu’ayant suivi la voie du privé.

Nanti aujourd’hui d’un Mastère spécialisé obtenu à Euromed Management, une grande école de Marseille en France, il est outillé pour le montage d’opérations en aménagement, urbanisme et immobilier. Pourtant, il a commencé très jeune avec un diplôme de technicien en génie civil en cumulant emploi et étude pour financer sa formation. C’est bien riche de ses atouts qu’il a pu créer depuis plus d’une dizaine d’années sa propre entreprise baptisée Société de conception, d’étude, de réalisation et d’aménagement de bâtiments et travaux publics (Cerab-TP SA) d’où il tire son bonheur.

Spécialiste de l’aménagement du territoire et développement régional donc, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun adore l’espace et se montre très regardant dans ses constructions personnelles. « J’aime l’espace. C’est pourquoi quand je construis mes immeubles, les gens ont tendance à les confondre avec un palais », affirme-t-il. Mais il n’est surtout pas un homme né avec une cuillère dorée à la bouche. Face au défi de son devenir dont il prend réellement conscience à l’âge de 16 ans, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun sera contraint de concilier petit job et études pour supporter les efforts de ses parents

. «Comprenez que l’enfant de pauvre ne peut pas évoluer sans rien faire. Aujourd’hui, il est d’ailleurs très important de se former en continu », relève-t-il. Né le 28 février 1973 à Porto-Novo, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun entre à l’Ecole primaire publique d’Anavié où il décroche son Certificat d’étude primaire (CEP) en 1984. Turbulent, le jeune Cyriaque l’était vraiment. Mais après l’obtention de son CEP, il se rendra à l’évidence du grand défi de réussite qui l’attend. Ainsi, juste après son premier diplôme en poche et la classe de 4ème au CEG d’anavié , il passe le concours d’entrée au Collège polytechnique industriel jadis connu sous le nom de Collège d’enseignement technique (CET).

« En réalité, c’était un peu par défi que je me suis retrouvé là », confesse-t-il. Il en sort premier de tout le département de l’Ouémé et obtient une place à la prestigieuse école d’Ina. Il y décroche le Certificat d’aptitudes professionnelles (CAP) en Maçonnerie en 1990. Boursier avec 15 de moyenne, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun était définitivement déterminé à relever le défi de son avenir qui inquiétait sérieusement ses parents du fait de sa turbulence. Il entame le second cycle au Lycée technique Coulibaly d’où il sort en 1993 avec le Diplôme de Technicien Industriel (DTI), équivalent du Baccalauréat.

Malgré cet avenir prometteur, il arrête d’abord ses études, histoire de pouvoir se faire un peu d’économie pour passer le Brevet de technicien supérieur (BTS). C’est en Côte-d’Ivoire qu’il obtient ce diplôme rêvé. Mais son ambition étant de créer et de gérer sa propre entreprise plutôt que d’être un simple Génie Civil, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun se lance dans des études de management. Il obtient son Certificat d’étude supérieure en management des entreprises et des services en 1999.

Et c’est fort de ces connaissances qu’il est devenu aujourd’hui un véritable entrepreneur. Un entreprenariat qu’il entend mettre au service de son village d’origine, Cana Adokouinto, une localité de la commune de Zogbodomey dans le département du Zou, complètement ignorée par les politiques selon lui.

Intimité

L’accro du « Consommons local »

Marié et père de 4 enfants, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun est un accro du « Consommer local ». Fidèle en effet aux plats de sa localité, il adore l’Akassa emballé connu sous le nom de « lio kanblado » accompagné de la sauce de légume, précisément le « fon man ». « J’ai une épouse et je n’arrive pas à rester sans elle. Ce qui fait que dans tous mes voyages je suis toujours avec elle, si elle est disponible. Dans le cas contraire, je n’arrive pas à la remplacer par une autre femme» indique-t-il.

Du reste, il apprécie sans partage les séances d’échanges d’idées. La plupart de ses temps libres, il les consacre à ce genre d’exercice. Le sport favori de ce spécialiste en aménagement du territoire, c’est tout simplement la marche. Comme tout homme pragmatique, Tôgbé Cyriaque Agonkpahoun n’aime pas perdre son temps. C’est d’ailleurs l’une des qualités avec lesquelles il n’entend nullement transiger. « J’aime bien gérer mon temps », déclare-t-il.

Reviews

  • Total Score 0%



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page