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Le triomphe de la vérité

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Entretien avec le DG/Bubedra, Arsène Thierry Codo sur l’évolution de la piraterie au Bénin:«Nous dépassons déjà 30.000 œuvres piratées saisies cette année»


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Le fléau de la commercialisation des œuvres artistiques piratées a couvert aujourd’hui chaque centimètre carré du Bénin. Le Bureau béninois du droit d’auteur et des droits voisins (BUBEDRA), l’institution agréée pour livrer le combat contre le phénomène fonctionne en vain. Son Directeur général, Arsène Thierry Codo se prononce sur les tracasseries que génère le combat et annonce la mort de l’industrie culturelle au Bénin si rien n’est fait.

L’Evénement Précis : Comment se porte aujourd’hui le BUBEDRA ?

Le DG/Bubedra Arsène Thierry Codo : Le BUBEDRA se porte bien, je ne sais pas de quelle santé vous parlez. Par rapport à l’institution ? Sinon que tout se passe bien.

Revenons à l’une des branches du BUBEDRA notamment celle de la lutte contre la piraterie. Nous sommes déjà un peu à la veille de la fin de l’année est-ce que vous pouvez nous faire aujourd’hui le point du nombre d’œuvres piratées que vous avez eues à arraisonner cette année ?

Faire le point exhaustif maintenant, je ne saurais le dire. Parce que nous sommes en train de faire le rapport de fin d’année, et chaque fois que nous saisissons à chaque sortie d’opération, elle est sanctionnée par un PV (Procès verbal) de saisie. Tout est décompté dans ces PV. Donc il s’agira pour nous de faire ressortir les PV de saisie, faire la compilation pour pouvoir faire le rapport de fin d’année.

Donc on ne peut pas avoir une idée approximative de nombre de CD saisis cette année ?

Si ce n’est qu’une idée approximative, je pourrai vous dire que nous dépassons déjà 30.000 œuvres piratées saisies au cours de cette année parce que si cela ne tenait qu’à l’opération du marché Dantokpa seul, on était à 19.500 CD. Donc c’est à partir de ce point de repère que je peux vous dire qu’on est au-delà de 30.000.

Dites-nous M. le Directeur par rapport à l’année passée si vous faites la comparaison, est ce qu’il y a une progression ou bien il y a quand même une certaine diminution de saisie de CD si on fait le rapport ?

Je vais vous dire que si on fait le rapport, l’année passée c’était un peu moins de 30.000 et au jour d’aujourd’hui, quand je vous parle je vous dis que nous sommes au-delà de 30.000. Ça veut dire que par rapport à cette année déjà, le nombre d’œuvres piratées saisies s’est accru comparativement à l’année dernière. Ça veut dire que le phénomène prend encore de l’ampleur. Les saisies suivent également la même lancée.

Par rapport à cela, est-ce que vous pensez que la lutte anti-piraterie a des faillites qu’il faut corriger ? Puisque de jour en jour le phénomène s’accroit. Comment expliquez-vous la situation ?

Comme toute opération, il y a toujours des failles. Lorsqu’on s’arrête à un moment T pour faire une évaluation, on constate qu’il y a des avancées et il y a encore des choses à corriger et nous sommes également dans cette situation. C’est pour vous dire que cette opération nécessite beaucoup de moyens et nous avons des détectives privées sur le terrain que nous entretenons.

Cela coûte énormément et dans le même temps, il n’y a que la Commission nationale de lutte contre la piraterie (Cnlp) qui est également une commission d’appui technique mise en place par décret pour assister le BUBEDRA. Il y avait au départ un budget sinon que son budget va décrescendo. Au même moment, le décret qui l’a créée a prévu qu’elle étende ses organes sous forme de brigades départementales et de brigades communales. Mais paradoxalement, le budget diminue. Comment est-ce que les brigades communales et départementales pourront fonctionner ?

Pour l’instant, nous avons pu mettre en place les brigades départementales mais les moyens étant ce qu’ils sont, nous ne sommes pas encore allés au niveau des communes. Parce qu’il aurait été intéressant de par le décret qu’au niveau de chaque commune on est une brigade communale pour faire face à cette opération. Mais on ne fait que par rapport à nos moyens. Parce que s’il faut les mettre en place aujourd’hui, il faudra couvrir les 77communes que compte notre pays.

 Déjà par rapport aux six pour les départements couplés que nous avons maintenant on n’a pas encore les moyens qu’il faut pour faire face au fonctionnement de ces brigades, raison pour laquelle on a exécuté le décret de la CNLP au premier niveau c’est-à-dire en mettant en place les brigades départementales. Autrement dit, pour l’instant, les moyens ne suivent pas si bien que j’ai des problèmes à ce niveau.

Alors dites-nous autour de combien tourne le budget de la CNLP

Le budget de la CNLP imaginez-vous il y a 2ans c’était environ 30 millions et l’année passée c’est ramené à 20 millions et cette année-ci parce que nous avons vraiment imploré les services financiers ils nous ont maintenu les 20millions sinon que ça allait connaitre également un abattement de la moitié.

 Vous n’êtes pas sans savoir que le budget général de l’Etat a connu un abattement et cet abattement, c’est au niveau de tous les ministères donc toutes les rubriques des budgets sectoriels ont connu des coupes sombres mais Dieu merci on nous a gardé les 20millions de l’année passée. C’est insuffisant. Le BUBEDRA même est obligé de faire face à ses propres dépenses ainsi que celles liées à la lutte contre la piraterie de la commission.

Dites-nous M. le Directeur puisqu’il s’agit de faire le point aujourd‘hui, combien de pirates vous avez pu arrêter et pu poursuivre devant la justice pour le compte de cette 2011 ?

Vous savez, la question n’est pas de poursuivre nécessairement parce que la loi 2005-30 du 10 avril 2006 relative à la protection du droit d’auteur et des droits voisins en Républiques du Bénin a prévu deux étapes. Il y a d’abord la première étape de la transaction qui veut dire, lorsque vous arrêtez un pirate avec ses produits, avec les équipements on fait nécessairement main basse là-dessus.

 C’est en cas d’échec de la transaction que le dossier est porté devant le tribunal par la police si bien que la plupart des cas des individus qui ont été arrêtés ,encore que ce sont, comme on le dit « des menu fretins » c’est-à-dire que ce sont des gens qui prennent les produits chez d’autres et les commercialisent . Donc la plupart du temps, on arrive à faire un règlement à l’amiable au niveau des commissariats si bien qu’on n’a pas toujours porté ces affaires devant le tribunal.

Donc si je vous comprends bien il n’y a pas de pirate poursuivi aujourd’hui au niveau du tribunal?

Aujourd’hui pour l’instant non. Parce que tous, ils reconnaissent à l’étape de la police leur forfait et ils payent les amendes forfaitaires qu’on met à leur charge. Toujours est-t-il que les produits une fois saisis ne sont plus restitués.

Je voudrais savoir le nombre de ces pirates dont vous avez saisi les œuvres cette année ne serait qu’une idée approximative ?

Je vous aurais menti si j’avance un chiffre. Il faut d’abord que je fasse recours aux PV de saisie parce que lorsqu’on arrête les produits, on y met le nombre de produit saisi et le nombre de personnes arrêtées au cours de l’opération. Autrement dit, je n’ai pas une idée exacte. Nous sommes en train de faire à la direction des affaires juridiques, le point, donc le rapport de l’année.

Et ce n’est qu’après cela que je pourrai vous dire de façon exhaustive quel nombre de produits ont été saisis. Nous faisons également en ce moment, la classification des produits, les CD audio Béninois, les CD audio étrangers, les DVD ainsi de suite pour savoir si le phénomène prend plus d’ampleur par rapport aux œuvres Béninoises.

En parlant d’amende, elle varie de combien à combien par rapport à la piraterie des œuvres artistiques ?

Ce n’est pas grand-chose. Çà ne dépasse pas 100.000Fcfa et ça dépend encore du nombre de CD que nous retrouvons chez la personne. Mais des fois comme c’est une transaction, quand nous nous mettons là- bas, nous discutons parce que les intéressés sont aux frais et leurs parents viennent et on négocie et puis ils payent.

Quand ils payent, on leur délivre la quittance qu’ils vont montrer au commissariat et c’est au vu de la quittance que le commissariat nous appelle pour dire nous avons reçu la quittance qui porte à croire que les parents de l’intéressé sont passés vers vous et ils ont conclu la transaction. Donc nous pouvons libérer la personne et on donne la main levée.

Pouvons-nous savoir à quoi ont servi les sous des différentes transactions ?

Là encore c’est au service financier de faire le point, je n’ai pas une idée exacte de cela. Mais il faut dire que ce que nous collectons, c’est dans ça que nous entretenons les services de l’ordre qui nous aident, car c’est un contrat. Ils ne peuvent pas se lever d’eux-mêmes et aller sur le tarrain. C’est un service, il faut payer le service. Ce n’est pas grand-chose mais on essaye de les entretenir.

Y-a-t-il un système de redistribution de ces amandes de sorte que cela puisse profiter également aux artistes pour lesquels vous menez le combat ?

Cela est un peu difficile, si bien que lorsqu’on fait les déductions, l’entretien de l’opération même et le reste, la plus part des temps, on rejette la masse globale et tous les artistes en bénéficient parce qu’il serait difficile au jour d’aujourd’hui de dire que ce sont les œuvres de tel ou tel autre artiste qui sont les plus piratées. Car, on retrouve des jaquettes qui ne contiennent pas de CD de même on retrouve des CD qui n’ont pas d’inscription et on ne connait plus les intéressés. Mais pour la plus part des temps, c’est la masse commune que l’on les verse et tout le monde en bénéficie.

Vous accentuez la lutte et le phénomène prend d’ampleur. Avez-vous des stratégies à mettre en place pour traquer et le diminuer ?

Tous les jours que Dieu fait, on essaye de réfléchir, la preuve je vous ai dit que pour les activités quotidiennes, le BUBEDRA sort par fois par semaine pour faire la ronde et également nous avons des éléments dans la ville qui nous filent les mèches et on fait les opérations. Nous mettons en place les stratégies avec les CRS avec lesquels nous travaillons. Aujourd’hui encore on doit se voit pour une opération sur laquelle on est depuis 01 mois. Il faut aller minutieusement et voit comment mettre une stratégie en place pour ne pas rater la cible.

Quand la saisie est opérée et que l’intéressé n’est pas poursuivi devant le tribunal, quelle est alors la destination des œuvres saisies car c’est sur décision du juge du tribunal que l’on opère l’incinération des œuvres ?

Que les pirates soient poursuivis ou qu’ils ne le soient pas, on sollicite l’autorisation du tribunal pour leur incinération. Je dois vous dire qu’avant ma prise de fonction dans le bâtiment annexe de Dantokpa, il y en a tellement que nous avons commis un huissier de justice qui nous a fait le dénombrement.

Ici, les œuvres saisies sont dans nos locaux et nous avons saisi sollicité l’autorisation du Président du tribunal pour leur incinération. Nous sommes encore à cette étape. On n’a pas encore obtenu l’autorisation à proprement parler. Dès qu’on l’aura, on va donc se rapprocher des services de l’environnement pour voir dans quelle condition procéder à cette incinération.

Au jour d’aujourd’hui combien le BUBEDRA perçoit-il pour ce qui concerne la vignette hologramme sur les œuvres artistiques ?

La vignette hologramme aujourd’hui coûte 200FCFA. Nous percevons 30FCFA au titre de frais de fabrication et 40FCFA au titre des frais de gestion. Cela fait 70F Cfa des 200F CFA. Il reste alors 130FCFA qui sont restitués aux intéressés.

Un mot pour conclure cet entretien.

Pour conclure cet entretien je demande juste la contribution de tous les béninois parce que la lutte contre la piraterie n’est pas l’affaire du BUBEDRA seul, c’est une affaire nationale. Il faut sensibiliser raison pour laquelle les communicateurs que vous êtes également doivent aider à la compréhension de ce phénomène pour faire en sorte que nos consommateurs décident désormais d’acheter les œuvres licites.

Quand je parle d’œuvres licites, ce sont des œuvres qui sont revêtues de l’hologramme du BUBEDRA. Parce que quand on le fait, on essaie d’aider les artistes qui s’investissent psychologiquement, physiquement, financièrement, intellectuellement, mais qui n’ont pas toujours de ressources sur l’investissement. Il va falloir que nous les aidions à vivre réellement de leur art car s’ils ne vivent pas de leur art, c’est l’industrie culturelle qui meurt.

 Et quand l’industrie culturelle meurt c’est tout le public qui prend un coup. Puisque dans certains pays, les œuvres artistiques contribuent énormément au relèvement du projet de développement. C’est pourquoi je nous invite à exiger les produits originaux.

Propos recueillis par

Donatien GBAGUIDI

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