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Le triomphe de la vérité

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EDITORIAL:Les lumières et les ténèbres


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La loi sur la lutte contre la corruption est enfin votée. C’est par décret en date du 29 mars 2006 que le gouvernement a transmis ce projet à l’Assemblée Nationale, conformément aux engagements du Bénin. Le 31 octobre 2003, la Convention des Nations Unies reconnaissant le caractère international de la corruption a été adoptée. La communauté internationale (le Bénin avec) a admis par là qu’une approche globale et multidisciplinaire s’impose pour prévenir et combattre efficacement le fléau. Mais deux problèmes majeurs éclatent ici.

Il y a d’abord la composition de l’Autorité Nationale de Lutte contre la Corruption. Elle sera formée d’un Inspection Général d’Etat, un communicateur désigné par la Haac, un sociologue désigné par le corps professoral, un Inspecteur des Banques désigné par l’Association de promotion des Banques, un Magistrat ayant au moins 15 ans d’ancienneté, un Expert comptable, un Administrateur des Impôts, un Inspecteur des Douanes, un Spécialiste en passation de marché public, deux Officiers de Police Judiciaire, un Gendarme, un Agent de Police.

Le Magistrat, l’Expert-comptable, l’Administrateur des Impôts, l’Inspecteur des Douanes, le Spécialiste en passation de marché public et les Officiers de police judiciaire sont désignés par l’Exécutif. Ce sont environ huit membres sur les treize qui sont ainsi des obligés de l’Exécutif. Tous en tout cas, sont nommés par décret pris en Conseil des ministres. Les pouvoirs publics n’auraient-ils pas intérêt à les tenir en laisse ?

Deuxième problème, l’OLC. L’organe de lutte contre la corruption dirigé par Jean-Baptiste Elias est carrément promis à la disparition. Après plus d’une décennie de lutte, l’OLC va donc mourir de sa plus belle mort. Compte tenu des profils déterminés dans la composition de l’ANLC, il est presque certain que Jean Baptiste Elias ne remplira pas les conditions pour y être éligible.

Dans la réalité, le texte adopté par les députés a tous les caractères d’une loi exemplaire. Elle fait obligation à presque toutes les personnes détentrices d’une autorité publique de faire sur l’honneur la déclaration de leurs biens avant et après leur prise de fonction. Il s’agit des directeurs des régies financières décentralisées et déconcentrées, les membres des états majors des armées, les directeurs des douanes, de la police, de la gendarmerie, des eaux et forêts,

 tout commandant ou commissaire de police, les Présidents de tribunaux, juges, procureurs et greffiers et plus généralement tout ordonnateur de dépense de tout organisme public et de toute personne morale de droit public, les administrateurs, directeurs, comptables et contrôleurs des entreprises publiques et sociétés de droit privé dont le capital est détenu par l’Etat, les ambassadeurs et les membres de l’Autorité Nationale de Lutte contre la Corruption.

Les délits courants comme le délit d’initié, le trafic d’influence, les libéralités en tout genre qui se font au sein de l’administration publique, la corruption électorale, les surfacturations ainsi que l’usage de prête-noms ont été sévèrement sanctionnés. Au cœur de tout ceci se trouvent les marchés publics qui constituent un nid de corruption.

Selon la loi, « sera puni de la réclusion criminelle à temps de cinq à dix ans et d’une amende égale au triple de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées, sans que ladite amende puisse être inférieure à 200 000 francs, tout agent public qui aura directement ou indirectement sollicité des offres ou reçu des dons indus pour lui-même, pour faire ou s’abstenir de faire un acte de ses fonctions ou de son emploi, juste ou non, mais non sujet à rémunération ».

C’est une avancée remarquable. Désormais, le Béninois lambda dispose d’un instrument juridique qu’il peut brandir auprès des tribunaux face aux actes de prévarication auxquelles l’administration publique le soumet. En plus, l’Etat a les moyens désormais de suivre et de sanctionner ses brebis galeuses.

Mais, ne nous leurrons pas. Peu de Béninois croient en ces dispositions légales, aussi sévères et vertueuses qu’elles puissent paraître. Tant la société elle-même est gangrénée par le fléau, les lois ne valant en définitive que ce que valent les personnes chargées de les appliquer. Et la problématique de se poser à nouveau comme une quadrature du cercle. Et la problématique de la volonté politique émanant du Chef de l’Etat de se présenter comme la seule garantie pour que la loi contre la corruption ne soit pas lettre morte.

Olivier ALLOCHEME

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