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Le triomphe de la vérité

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Editorial: Au carrefour de Dassa


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Olivier ALLOCHEME, Editorialiste-Secrétaire de Rédaction

Un paradoxe saisissant au carrefour de Dassa lundi dernier peut nous faire réfléchir sur les temps qui passent. Au lancement des travaux de réhabilitation de cet important giratoire, on a pu apercevoir l’ancien ministre des travaux publics devenu député, Nicaise Fagnon, celui-là même qui a ferraillé dur pour que le projet voie le jour.

Le lundi 1er novembre 2010 effectivement, le Chef de l’Etat a posé la première pierre de l’infrastructure, sans que le Bénin n’ait ratifié l’accord de prêt devant consacrer son financement. L’Assemblée nationale n’avait même pas encore donné son quitus. Les députés s’emballent et crient à la manipulation. C’est André Dassoundo, alors premier vice-président de l’Assemblée et natif de Dassa, qui en donne le ton : « C’est une pierre blanche, une pierre pour tromper les populations, sinon ils vont voler de l’argent quelque part et le faire, » a-t-il fulminé à longueur de meetings. Le ton est virulent, proche de la diatribe.

La réaction du camp présidentiel représenté en l’occurrence à l’époque par un certain Nicaise Kotchami Fagnon, ministre des travaux publics et natif de la commune, n’avait pas tardé. André Dassoundo a été accusé d’avoir usé de son poste et de la majorité que détenait l’opposition pour bloquer le dossier au Parlement. Et la polémique s’est enflée dans les cercles politiques de Dassa où la perspective des deux élections (présidentielle et législative) excite toutes les passions.

 Finalement, c’est le 28 juin 2011, c’est-à-dire huit mois après la pose de la première pierre de cette infrastructure, que les députés ont adopté le projet de loi portant autorisation de ratification de l’accord de prêt relatif à la réhabilitation de ce giratoire. Ce n’est pas le plus étonnant. Ce jour-là, personne n’a trouvé à redire sur la pose de la première pierre qui a eu lieu huit mois plus tôt.

Au contraire, c’est le coût de la construction du centre universitaire de Kétou (7,8 milliards de FCFA) financée par la BIDC, qui a préoccupé Idji Kolawolé et d’autres députés de l’opposition. Le giratoire de Dassa passa comme une lettre à la poste. Et c’est le lundi 11 juillet dernier, pratiquement neuf mois après la pose de la première pierre, que le lancement effectif des travaux a eu lieu.

Signe des temps, c’est un ancien opposant, Blaise Ahanhanzo, assurant l’intérim de son collègue des travaux publics, qui a donné les caractéristiques techniques de l’ouvrage. Pendant ce temps, le fougueux Nicaise Fagnon, artisan s’il en est de ce projet, avait été presque oublié dans les fauteuils où il suivait en spectateur la cérémonie de lancement.

Chantant les hauts mérites du projet et rendant ses hommages les plus sincères au Chef de l’Etat et à sa « vision », le ministre Ahanhanzo faisait exactement le contraire de ce que l’opposition avait fait sur le même projet quelques mois seulement avant. Quel paradoxe ! Et Dassoundo ? Il y a longtemps qu’il a troqué ses attributs de député contre ceux de simple citoyen. Il n’a plus jamais évoqué le fameux giratoire depuis le 30 avril dernier.

Tout ceci donne une certaine idée de l’opposition au Bénin. Elle est désormais réduite à des contradictions gigantesques qui donnent de ses leaders une très mauvaise image. Sa survie même semble être suspendue à ces louvoiements en série. De toute évidence, elle s’est construite sur du sable mouvant et l’édifice s’est effondré une fois que les victoires escomptées n’ont plus été au rendez-vous.

 L’une de ses failles les plus béantes, c’est cette absence de ligne idéologique devant structurer ses actions dans le temps. Son action s’opère sous le prisme de l’instant qui constitue le seul déterminant véritable en politique béninoise. Navigation à vue ? Oui, et pire encore cacophonie, absence presque totale d’une vision d’avenir pour le Bénin.

Si elle a pu avoir une excellente vue sur le destin individuel de ses leaders, sur leur ascension ou leur promotion, elle manque de penser aux humbles, aux élèves et aux étudiants, aux commerçants et aux producteurs et à tout ce qui fait le cœur d’une bonne politique de développement. Elle n’a pas encore su ni pu asseoir une réflexion globale sur le Bénin d’aujourd’hui et de demain. Le fera-t-elle un jour ? Il le lui faudra forcément.

Olivier ALLOCHEME

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