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Le triomphe de la vérité

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Réalisation de la Liste électorale permanente informatisée et joutes électorales: La Société civile ébauche des pistes pour une sortie de crise


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L’inertie dans laquelle se trouve plongée le processus de réalisation de la Liste électorale permanente informatisée (Lepi) depuis plusieurs semaines ne laisse pas la Société civile béninoise indifférente. Ainsi, à la faveur d’une rencontre intervenue le samedi 31 juillet dernier, les organisations de la Société civile réunies au sein du Front des organisations de la société civile pour des élections libres, transparentes et pacifiques, Fors-Elections, passent au crible le processus avant d’ébaucher des pistes en vue de réaliser un instrument susceptible de contribuer à la consolidation de la démocratie béninoise voire du développement du pays. Ainsi, à travers un document d’analyses et de propositions, les acteurs de la Société civile mettent en relief des mécanismes susceptibles de soustraire le processus des suspicions et autres méfiances que suscitent la réalisation de la Lepi avant d’inviter les acteurs à œuvrer pour la tenue à bonne date des élections de 2011.

 AVANT PROPOS

Le Bénin célèbre aujourd’hui le cinquantième anniversaire de son indépendance.

20 ans de démocratie et 50 ans d’existence en tant que nation libre et indépendante sont des repères pour chacun et pour tous et, pourtant, tout n’est pas rose, surtout par rapport à notre démocratie enviée et respectée. Et, c’est là le paradoxe !

Le Bénin se cherche encore en matière électorale, le dialogue politique est difficile et l’outil de la Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI) retenu et largement accepté au départ a désormais du mal à faire l’unanimité dans sa mise en œuvre alors que chaque jour qui passe nous rapproche des échéances électorales de 2011. 

Conscientes de la gravité de la situation et du péril qu’elle projette sur les élections prévues pour le premier trimestre de 2011 (présidentielles et législatives) et par suite, sur le processus démocratique et la paix, les organisations membres de FORS LEPI et de FORS ELECTIONS ont entrepris une nouvelle démarche d’écoute et de discussion avec les acteurs chargés de la mise en œuvre de la LEPI et la classe politique dans le but de suggérer des approches de solutions que leur inspire la situation.

La méthodologie suivie dans le cadre de la présente initiative  n’est pas sans rappeler celle déjà éprouvée à l’occasion des précédentes. Elle est faite de rencontres, d’écoute, de recherches et d’analyses prospectives en vue de propositions à l’endroit des acteurs de la vie politique et des partenaires techniques et financiers.

 Ainsi,  les délégations de FORS LEPI et de FORS ELECTIONS ont-elles rencontré  courant juillet 2010 :

• le Superviseur général de la CPS/LEPI

• la MIRENA  au grand complet de ses membres

• l’alliance de partis politique l’Union fait la Nation (UN)

• le Groupe G13 

• la coalition  ABT 

• l’alliance des Forces cauri pour un Bénin Emergent (FCBE).

 Les organes, institutions ou groupes rencontrés ont offert une représentation et une écoute de qualité. Les discussions furent ouvertes, franches c’est-à-dire sans langue de bois. 

La restitution, le  traitement et l’analyse des informations recueillies lors de toutes ces audiences ont été effectuées à l’occasion d’une retraite citoyenne qui a regroupé _les samedi 31 juillet et dimanche 1er Août 2010 à l’hôtel Village Ahémé de Possotomè_ des membres  de FORS LEPI ET DE FORS ELECTIONS.

 I- LE CONTEXTE

A environ sept (07) mois des échéances électorales de 2011, le processus de la réalisation de la LEPI évolue dans un contexte délicat.  Quelques éléments majeurs caractérisent ce contexte.

– La réduction aux 3/5 des membres de la CPS/LEPI.

La loi 2009-10  du 13 mai 2009 prévoit une Commission Politique de Supervision (CPS/LEPI) de 15 membres (art 37 et 39). Depuis le début du mois d’avril 2010, soit depuis quatre mois, la CPS est réduite à  onze (11) membres après la démission collective des honorables Léon Basile AHOSSI,  Timothée GBEDIGA, Epiphane QUENUM et Gabriel TCHOCODO, soit quasiment la moitié des membres désignés par l’Assemblée nationale au sein de la CPS.

Au surplus, on note que Monsieur Bernard LANI DAVO, précédemment ministre de l’enseignement secondaire et de la formation technique et professionnelle, l’un des représentant du gouvernement au sein de la CPS continue d’y siéger en violation de l’article 37 de la loi précitée qui stipule que la CPS « est un organe administratif  comprenant des membres du gouvernement, de l’Assemblée nationale, etc.» Quant au représentant de la société civile, dont la désignation avait été invalidée par la Cour constitutionnelle, sa participation aux délibérations de ladite structure sans la reprise en bonnes et dues forme de sa désignation et de son serment est illégale. 

Ainsi,  amputée, en réalité de 6 membres sur 15, la CPS poursuit-elle sa mission…

 – La polémique persistante autour des résultats de la cartographie censitaire et du Recensement Porte à Porte.

 Les activités de terrain concernant les deux premières phases du RENA à savoir la cartographie censitaire et le recensement porte à porte sont achevées. Malgré l’espoir suscité par le plan d’action suggéré par le « Groupe de travail », le consensus peine à se réaliser sur les corrections réellement apportées afin de réduire les griefs formulés contre ces deux étapes. Cette situation a empiré avec la guerre des chiffres suscitée par les résultats proclamés par le Superviseur Général de la CPS ou par les coordinations de la MIRENA et contestés par une frange importante de la classe politique.

 – La préparation fébrile des phases à venir du processus

Depuis la fin du Recensement porte à porte (RPP), les organes chargés de la réalisation de la LEPI ont entrepris, avec des fortunes diverses, des tâches préparatoires aux différentes phases à venir. Ainsi, le Centre National de Traitement (CNT), organe important dans la gestion des données est opérationnel avec le lancement officiel, le  19 juillet 2010, de la saisie des données issues de la cartographie censitaire et du Recensement porte à porte.  

Une course contre la montre semble être engagée et des dates probables de démarrage de la phase d’enregistrement circulent en dépit des griefs persistants d’une partie de la classe politique. C’est dans ce contexte que le Superviseur général de la CPS/LEPI multiplie les rencontres avec les acteurs politiques ainsi que les Présidents des institutions de la République pour avoir leur appui indispensable pour la phase d’enregistrement.  

 – L’impasse des délais

Les échéances électorales au Bénin sont constitutionnelles. De plus, au regard de l’article 2 du protocole  – A/SP1/12/01- de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au Protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité, le Bénin ne pourrait procéder à des réformes électorales, sans consensus, au delà du 15 septembre 2010. Au-delà de cette limite, il faudra un consensus pour ne pas enfreindre à cette disposition régionale. L’impasse pourrait provenir d’éventuelles manœuvres dilatoires exercées lors du processus du vote des lois électorales en étude à l’Assemblée nationale. Par ailleurs, aux termes de l’art 31 de la loi 2009-10 du 13 mai 2009, la LEPI devra être établie 60 jours, au plus tard, avant la date du scrutin ; soit d’ici la première semaine du mois de janvier 2011. On se retrouverait fatalement dans les dispositions de l’article 141.1 de la loi 2005-6  qui préconise la LEPI pour les élections avec un recours à la liste manuelle au cas où la liste électorale ne serait pas réalisée. La course contre la montre actuelle et les réajustements dans les différents chronogrammes démontrent, qu’à coup sûr, nous nous retrouverons dans une situation des plus indésirables si un consensus n’est pas obtenu aujourd’hui autour de la liste devant régir les élections de 2011.

– La gestion du CNT

Le Centre National de Traitement (CNT) véritable clef de voûte du système est aujourd’hui géré par un personnel dont la supervision et le contrôle échappent à la MIRENA, organe technique de réalisation du RENA et de la LEPI. Il y a visiblement un risque de soupçon de manipulations et de contestations si le contrôle de la gestion du CNT n’est pas assuré de façon inclusive, permettant de rassurer tous les acteurs.

– Des disparités des primes et autres traitements entre la CPS et la MIRENA

L’analyse du budget, récemment validé par le gouvernement et mis en vigueur par la CPS sans l’association de la MIRENA, malgré les décisions initiales, prévoit des primes et émoluments, hors mesure, car répétés sous d’autres désignations, notamment, au profit des membres de la CPS ou des responsables du. CNT.

Par ailleurs, les députés et les ministres, membres de la CPS, cumulent avec une certaine indécence, au regard du difficile contexte économique que vit le Bénin, ces avantages avec leurs traitements de députés et de ministres.

L’écart criard entre ces avantages et les indemnités accordées aux experts de la MIRENA, chargés de la mise en œuvre technique du processus, et ayant sous leurs ordres les coordinations techniques comme le CNT, sont sources de frustrations pour ces derniers.

– L’inflation des propositions de lois

Au fur et à meure que l’on s’approche des élections, l’idée de réforme du système électoral gagne les acteurs politiques. Des propositions concurrentes de la part de certains députés sont en discussion. Il s’agit en particulier des propositions conjointes UN- G13, de la proposition du député FCBE Karimou CHABI SIKA et de la proposition du député André DASSOUNDO. L’ensemble de ces propositions est, en soi, la quête d’une liste alternative à la LEPI. Elles s’attardent également sur la composition de la CENA et sur les règles de transparence des scrutins.

Parmi ces propositions, certaines concernent les règles générales, relatives à toutes les élections, d’autres portent sur les règles particulières aux élections législatives. Il faut regretter le réveil tardif de la réflexion parlementaire sur le sujet et souhaiter une mise en commun des propositions en vue d’une synthèse harmonieuse et pertinente.

Toutefois, le délai trop court face à ce nombre de propositions pourrait retarder le vote d’une loi électorale d’ici le 15 septembre 2010.

 II- POSITION DES PROTAGONISTES.

Les membres de la MIRENA/ Globalement, les membres de la MIRENA déplorent l’état de leurs relations actuelles avec la CPS/LEPI qui tend à s’attribuer toutes les prérogatives dévolues à la MIRENA par la loi, tout en faisant d’elle le bouc émissaire en cas de difficultés.  Ainsi, la CPS travaille-t-elle directement  avec les coordinations techniques sans passer par la MIRENA, qui est la structure technique principale de mise en œuvre. C’est le cas du CNT dont le contrôle de la gestion échappe pratiquement à la MIRENA au profit de la CPS. Quant au PAREL, structure d’appui technique à la MIRENA, il lui est reproché de sortir par moments, de son rôle pour intervenir directement sur le processus aux côtés de la CPS, contournant ainsi la MIRENA. Au surplus, l’emballement dans lequel semble désormais engagé le processus ne rassure guère les experts de la MIRENA qui ne sont plus maîtres, ni du chronogramme ni de l’issue du processus.

Les aménagements budgétaires réclamés par les membres de la MIRENA ne sont fondamentalement réalisés qu’au profit de la CPS dont les émoluments ont connu une nette amélioration au détriment des membres de la MIRENA. Par ailleurs, le budget de communication continue d’être la chasse gardée de la CPS privant ainsi la MIRENA de toute initiative d’informations techniques utiles au profit des populations.   

La composition actuelle de la CPS, où ne figure quasi exclusivement que les tendances proches du pouvoir préoccupe manifestement les membres de la MIRENA en ce qui concerne les risques de contestations politiques qu’elle pourrait induire sur les résultats de leurs travaux.

 Les partis politiques/ L’ensemble des partis politiques rencontrés restent peu informés de l’évolution actuelle du processus.  Mais si presque tous, sont peu portés à l’utilisation de la liste manuelle pour les élections de 2011, ils sont très inquiets de l’engagement de la phase d’enregistrement sans le règlement des appréhensions nées des résultats des deux premières phases. Ainsi,  toute initiative visant à la discussion des résultats de ces deux premières phases et à un accord de la classe politique sous certaines conditions est admise et souhaitée de tous les groupes politiques rencontrés.

Un accord sur la vérification ou la validation des résultats des phases terminées serait une bonne solution de sortie de crise pour les partis, pour autant que les résultats de la concertation ne soient plus modifiés par la CPS.

Sur le couplage ou non des deux élections de 2011, les positions sont partagées. La FCBE préférerait des élections séparées avec la présidentielle en premier lieu même avec quelques jours de décalage. Pour les autres groupes politiques, le couplage des deux élections permettrait de faire l’économie des coûts et des risques.

III- QUESTIONS ESSENTIELLES.

 1- Issues possibles du processus.

Le processus de réalisation de la LEPI est autant marqué par des polémiques récurrentes que par des silences éloquents de l’ensemble des parties prenantes sur son issue possible. Au demeurant, et à la lumière des débats politiques en cours et de l’état de réalisation technique du processus, il y a lieu de considérer que l’objectif initial de disponibilité de la LEPI à 60 jours des élections de mars 2011 sera difficilement tenu. Ce qui conduit à distinguer, sur l’issue du processus, trois cas de figures plausibles en considération du type de liste utilisable lors des échéances électorales de 2011 et des lois électorales appelées à les gouverner.     

a) Processus inachevé ou interrompu.

Les incessantes difficultés pour conduire dans la sérénité les opérations techniques du RENA, l’absence d’un minimum d’accord explicite dans l’ensemble de la classe politique sur sa mise en œuvre, le désengagement des partenaires techniques pourraient achever de mettre au rencart le processus qui malgré tout a permis quelques avancés.

 b) Processus achevé à n’importe quel prix (insuffisance du dialogue politique)

Dans ce cas de figure, il va sans dire qu’une frange importante de la classe politique est marginalisée ou se désolidarise très nettement de la conduite et du suivi du processus. Celui-ci aboutit cahin-caha à la disponibilité d’une liste qui s’apparenterait à la LEPI projetée, du moins selon ceux qui auraient pu la finaliser, dans les délais fixés par la loi.  Ici, la volonté de tenir coûte que coûte dans un chronogramme lié aux échéances électorales de 2011 conduit à escamoter nombre de fondamentaux et à aliéner l’adhésion de tous au processus.

 c) Processus achevé consensuellement

 Un compromis est trouvé entre les acteurs politiques pour ne plus lier absolument la disponibilité de la LEPI aux prochaines échéances de 2011, mais de l’inscrire dans la reforme du système électoral au Bénin.   L’effort est porté dans ce cas sur le type de liste alternative à retenir pour les élections présidentielles et législatives de 2011 sans hypothéquer la poursuite des opérations de réalisation de la LEPI.

Le consensus autour d’une liste électorale provisoire pour les élections de 2011 ramènera la sérénité dans le déroulement du  processus de la LEPI.

 2- Le coût d’une mauvaise gestion politique de la LEPI

 La situation économique difficile dans laquelle est plongé le pays actuellement, aggravée par l’évasion financière induite par le phénomène des sociétés illégales de placement d’argent  nous impose, à bien des égards, une gestion efficiente des maigres ressources de l’Etat ainsi que des apports des partenaires techniques et financiers. Il est à saluer que les partenaires techniques et financiers aient acceptés la multiplication à l’infinie du coût de réalisation de la LEPI, ce qui nous évite que le processus ne soit abandonné en rade pour son coût prohibitif. Par contre, nos populations paieraient   un coût inadmissible à un dialogue manqué comme ce fut le cas pour la cartographie censitaire dont la reprise est encore en cours et du recensement porte à porte qui se poursuit à l’infini. Les importants surcoûts  financiers supportés dans le processus découlent moins de mauvaises estimations que d’un processus bâclé au départ, mal organisé et non inclusif.  Le temps qu’il faut rattraper à tout prix, ne peut pas continuer d’être le beau prétexte à une gestion inefficiente des ressources humaines et financières.

Au fur et à mesure que l’on s’approche des élections, les passions et les tensions vont s’accentuer, faisant le lit à un éclatement préjudiciable pour les vies humaines et le développement. Le non règlement ou le mauvais règlement des difficultés de la LEPI ne fera qu’augmenter les risques de conflits propices à un éclatement dont les coûts risquent d’être incommensurables aussi bien pour le pays que pour la sous région. Le Bénin doit faire l’économie d’une guerre civile ou d’une remise en cause de son  processus démocratique dont l’impact sur la sous région serait catastrophique.

La poursuite de la défiance entre les parties en présence, sur fond de contrôle de majorité dans certaines institutions (CPS pour les uns, Parlement pour les autres) est susceptible de conduire à un blocage total de l’organisation des élections et à une rupture du processus démocratique. Un processus chaotique et pénible  peut déboucher au mieux sur une mauvaise organisation des élections ouvrant ainsi la voie à des contestations aux conséquences non maîtrisées avec un  affaiblissement certain du pouvoir sorti des urnes ; au pire, à la non organisation des élections conduisant le pays dans un vide juridique dont l’une des conséquences les plus à craindre reste la situation à l’ivoirienne. Les élections sont constitutionnelles au Bénin et le resteront pour autant que les acteurs jouent avec responsabilité leurs partitions dans le sens de l’intérêt général.

3- Quelle liste pour les élections de 2011 ?

De nos différentes séances d’écoute et de la collecte des différentes propositions de loi en circulation au moment de la présente analyse, deux  possibilités s’offrent pour aborder les échéances de 2011 :

– l’une pourrait  ramener au système traditionnel,  soit la liste électorale manuelle ;

– l’autre, fondée sur les résultats des travaux de la CPS LEPI, permettrait d’obtenir  une Liste Electorale Informatisée (LEI) ou Transitoire (LEIT) ou provisoire ….

Face à ce constat, FORS ELECTIONS tient à marquer fermement son opposition au retour à une liste manuelle qui nous renvoie à l’archaïsme d’une autre époque.

FORS ELECTIONS  suggère que la classe politique et l’organe en charge des élections, la CENA (qu’il faudra installer dans les meilleurs délais), trouvent le moyen d’exploiter la liste issue du recensement porte à porte qui constitue une avancée par rapport à une liste manuelle. Ce qui induit un dialogue inclusif qui prenne en compte les réserves et observations de tous les acteurs et qui donne la possibilité à des vérifications et corrections nécessaires.

 4- Couplage ou non des élections de 2011

L’évolution normale du processus démocratique en général et électoral en particulier de notre pays conduit à organiser en 2011 les élections à la fois présidentielles et législatives. Si le délai prévu pour l’organisation des élections présidentielles est inscrit dans la constitution (article 47) ,  le délai d’organisation des élections législatives relève du pouvoir législatif. Il s’ensuit donc que la décision du couplage ou non des élections relève du législateur. Alors, il se pose la question de savoir si le Bénin fera l’option d’organiser ces élections le même jour ou, de les décaler. En cas de non couplage, quelles en seront les modalités, les présidentielles avant ou après les législatives et avec quelle marge de temps ?

Face à ces interrogations deux tendances se dégagent.  L’une voudrait que les élections présidentielles et législatives de 2011 soient couplées en respectant l’échéance du mandat du Président de la République, l’autre souhaite qu’elles ne le soient pas  et que les présidentielles se tiennent avant les législatives, même si la marge entre les deux élections devait être, de toute évidence,  très infime.

A l’analyse et de notre point de vue, plusieurs raisons militent en faveur du couplage.

D’abord, l’échéance des présidentielles n’est pas négociable, à moins de remettre en cause les dispositions constitutionnelles et l’expérience démocratique au Bénin.  C’est dire qu’au plus tôt, le 25 février 2011 et au plus tard le 6 mars 2011, soit dans la période impérative de 40 à 30 jours avant le terme du mandat présidentiel en cours qui s’achève le 5 avril 2011 à minuit, les élections couplées (présidentielles et législatives) devront se tenir.

Ensuite, le couplage réduira sans doute le coût et les charges en termes de financement, de mobilisation de l’administration, de stress, de tension politique et sociale….

Enfin, le couplage de ces élections majeures renforcera le processus démocratique après l’expérience, certes mal conduite, des communales et locales et surtout que le couplage  était attendue depuis fort longtemps.

 IV- HYPOTHESES.

 a) Réformes concertées (scénario « alafia »)

C’est l’hypothèse la plus optimiste . Elle suppose qu’à l’issue des discussions menées lors du forum projeté par la CPS, les acteurs s’entendent sur le minimum qui consiste à apporter dans les conditions de transparence et de participation requises, les corrections nécessaires à la cartographie censitaire et au recensement porte à porte avant de lancer la phase de l’enregistrement.

Dans cette hypothèse, la saisie des données déjà recueillies lors du recensement porte à porte se déroulerait concomitamment avec les discussions et corrections de sorte qu’un temps précieux soit gagné. Il faudrait également faire en sorte que les corrections à apporter aux phases réalisées, la saisie des données et la validation des résultats de la cartographie et du recensement soient achevées avant septembre 2010.

C’est avec cette hypothèse qu’on pourrait capitaliser pour 2011 les acquis des étapes déjà réalisées et espérer aboutir à un résultat satisfaisant en utilisant les kits biométriques. Le consensus réalisé et l’approche méthodologique concertée permettant alors un enregistrement de qualité des électeurs pour une liste électorale fiable et sécurisée en 2011. Une approche adéquate devrait aussi être envisagée concernant les béninois de l’extérieur ».

b) Passage en force (scénario de’’ la tortue sur le dos’’)

Ici, nous nous retrouvons dans le cas où le débat inclusif n’a pas lieu ou se déroule tardivement ou encore le débat a lieu mais le consensus n’est pas réalisé.

Dans cette hypothèse, une LEPI est réalisée unilatéralement et à n’importe quel prix, sans la participation d’une frange importante de la classe politique, accroissant ainsi les suspicions et les tensions permanentes. Il s’en suit un processus électoral à l’issue incertaine avec de grands risques de dérives à chaque étape. L’exercice des mandats sortis de ces élections sera inévitablement aussi bien pénible, pour les titulaires que pour les populations qui en paieront le prix fort en termes d’obsession sécuritaire pour les dirigeants, de rêves putschistes au sein des forces armées et de frustrations permanentes pour des populations convaincues d’être dirigées par des gouvernants illégitimes. L’image de pays démocratique du Bénin serait ainsi ternie à la grande déception des peuples africains et des partisans de la Démocratie dans le monde.

C- Impasses et blocages (scénario « wahala »)

Ici, nous nous retrouvons dans le cas où il n’y a ni accord politique, ni perspectives d’amélioration technique au niveau de la cartographie, du RPP, du système de traitement informatique, etc. De plus, le bouclage du financement est durablement compromis avec des possibilités de désengagements ou des réserves plus marquées de la part de la Communauté internationale des Partenaires Techniques et Financiers (PTF). Enfin, dans ce cas de figure, l’absence d’une loi explicite pour faire face aux prochaines élections conduirait à une impasse débouchant sur la non organisation des élections (situation ivoirienne) ou à une intervention des forces armées. 

VI – QUELQUES PROPOSITIONS POUR CONCLURE.

A l’analyse, la recherche du compromis politique à partir d’un consensus (A) en vue d’un résultat précis (B) qui assure la transparence du processus et la paix sociale apparait encore comme le moyen le plus pertinent de résolution des difficultés.

A – Le consensus 

Les difficultés que traverse le processus de mise en œuvre de la LEPI ont, à notre sens, pour cause, la mise en berne du dialogue politique dans le débat électoral. Chaque camp ou groupe politique se retrouve dans une posture de confrontation et d’affrontement qui met en péril, au-delà du processus LEPI et les élections, le consensus nécessaire, dans le contexte hérité de la conférence nationale de février 1990, à la survie de l’expérience démocratique au Bénin. Il est à craindre, si une solution urgente n’est apportée à cette rupture de dialogue, une rupture plus grave de l’ordre constitutionnel démocratique consécutivement à un coup de force. L’exacerbation du débat politique, la ruine des valeurs morales, la paupérisation des ménages aggravée par l’affaire des placements frauduleux de fonds, offrent malheureusement le cadre à épanouissement d’aventures putschistes.  Il importe donc que les acteurs politiques épris de paix et de justice, prennent leurs responsabilités et réinstallent le consensus comme une valeur cardinale du débat autour de l’organisation des élections et, en particulier, de la confection de la liste électorale devant régir les élections de 2O11.

Le consensus suppose que soit évitée la guerre ruineuse des majorités et celle, non moins vile et pernicieuses, des procédures et que soit promu le règlement politique des réformes électorales à travers, entre autres, la validation des phases déjà accomplies.

1 – Eviter la guerre des majorités

La classe politique, notamment celle qui s’est organisée en groupes concurrents, présente l’image d’une guerre des tranchées au moyen des majorités institutionnelles.  On observe que s’est constituée à l’Assemblée nationale une majorité opposée à l’action du gouvernement. Cette majorité regroupe les députés de la coalition « Union Fait la Nation », certains du groupe « G 13 » ainsi que les dissidents de la mouvance présidentielle. Un rapport de force favorable à cette opposition de fait semble se dégager au sein du parlement.

De l’autre côté, c’est-à-dire à la Commission politique de supervision, les rapports de force sont au profit de la mouvance présidentielle. La démission des représentants des partis politiques de l’opposition a achevé d’assurer aux représentants des partis présidentiels et du gouvernement au sein de la CPS, une majorité qualifiée. L’une des conséquences de cette situation est la conduite unilatérale du processus LEPI. 

Ainsi que nous l’avions déjà relevé : « Cette bipolarisation est une situation inédite dans l’espace et l’histoire politique récente du Bénin. […] La bipolarisation augmente les risques de déviance en braquant les différents acteurs opposés, sans qu’il soit possible d’offrir une alternative médiane aux électeurs. La rigidité des positions est la règle. Les crises sociales et politiques aussi. C’est la situation actuelle ».

On observe ainsi que sur la question de la liste électorale, ces deux majorités, concurrentes, s’installent dans l’affrontement, au moyen de l’institution que chacune contrôle. Ce que la majorité parlementaire n’arrive pas à obtenir à la CPS LEPI, elle tente de l’imposer au parlement et ce que la majorité présidentielle n’arrive pas à établir au parlement est assuré à la CPS.

Or, cette guerre des majorités est fatale au processus, aucun groupe politique ne pouvant, sans l’autre, asseoir un véritable contrôle du processus et le conduire à son terme. Il convient donc d’éviter cette guerre des majorités sans vainqueurs durables.

Le consensus autour de la question de la liste électorale suppose, d’une part, que toutes les tendances politiques observables au sein de la représentation nationale  se retrouvent à nouveau au sein de la CPS LEPI. Les questions liées à la gouvernance de l’institution et du processus devront être réglées. L’absence des représentants d’une majeure partie de la classe politique accentue la rupture du dialogue politique.

Le consensus suppose, d’autre part, que les réformes électorales soient réglées politiquement, autour d’axes essentiels convenus par les acteurs politiques et sociaux. Cette méthode permettrait d’éviter un affrontement judiciaire devant la cour constitutionnelle qui aurait pour effet, quelle que soit la pertinence de la décision, d’aggraver la fracture politique déjà déplorable. Au fond, le consensus recherché passerait par une étape de validation du processus de la LEPI.

 2  – Validation des étapes du processus et nécessité d’un forum

FORS ELECTIONS confirme son attachement à l’idée de l’organisation d’un cadre qui permettrait, notamment, de lever les malentendus et les sources de divergences entre les acteurs politiques de mise en œuvre de la LEPI. La validation du processus devrait, en particulier, conduire à :

• la validation des résultats de la cartographie censitaire (restitution des corrections et validation de la liste des villages, quartiers de villes, hameaux, centres d’enregistrement) ;

• la validation des résultats du recensement porte à porte sur les aspects suivants :

– correction des chiffres issus du recensement

– prise en compte des omis et de ceux qui pour une raison ou une autre n’ont pas pu être recensé et qui désirent l’être encore.

– discussion sur tous autres aspects soulevés par les partis politiques

• l’aménagement des étapes à venir en tenant compte des résultats validés

– définition explicite des procédures et contrôle des opérations du CNT

– personnes à enregistrer pour rester dans les délais et favoriser un meilleur suivi et contrôle de tous (par exemple se concentrer sur l’enregistrement des personnes devant avoir 18 ans le jour du scrutin) ;

– contrôle des kits et méthode d’enregistrement ;

– organisation du contrôle  des opérations d’enregistrement (recrutement des agents, déploiement d’observateurs, financement de l’observation) ;

– définition, pour le dédoublonnage (AFIS), des critères de recrutement d’un opérateur technologique distinct de celui retenu pour les kits biométriques ; 

– organisation de la centralisation et du dédoublonnage des données (réalisation, contrôle, affichage, recours, apurement des listes…)

– organisation  de la délivrance des cartes d’électeurs

– adoption et amendements éventuels du plan d’action proposé par le Groupe de travail pour la suite du processus.

 B –  Les résultats attendus

Les fins recherchées sont, d’une part l’organisation à bonne date des élections couplées et, d’autre part, leur organisation au moyen d’une liste électorale de qualité.

Il est vrai que l’organisation à bonne date des élections ne fait pas l’objet de controverse au sein de la classe politique, même si l’on s’interroge encore sur les modalités.

Mais il est évident que la liste électorale devra gagner en qualité. Les auteurs du présent document s’opposent avec force au retour à une liste manuelle et archaïque. Les risques y sont plus marqués encore que son établissement appellera encore, de la part des contribuables, des ressources additionnelles autant financières qu’humaines.

Les acteurs politiques doivent trouver le mécanisme approprié qui permette, à défaut d’organiser les élections avec la LEPI, de puiser dans les phases achevées ou en cours, une liste électorale de qualité renforcée.

Mais ces solutions suggérées ne peuvent être mises en application qu’au moyen d’une discussion entre les acteurs du processus sans exclusive. Le compromis pourrait être recherché au-delà des institutions formelles du processus. Cela permettrait d’atténuer les rapports de force, d’éviter le bras de fer et de fixer les objectifs minima à atteindre à court et à moyen terme.

Peu importe la dénomination, l’enjeu, c’est la discussion des phases accomplies du processus, l’accord sur les éléments de sa correction, la validation desdites phases, la validation de la méthodologie des étapes à venir si elle devrait se faire autrement que prévu par la loi, l’accord sur le type de liste électorale à utiliser dans le cadre des prochaines élections ainsi que les réformes subséquentes à proposer au parlement.

Il faut convenir que l’efficacité de l’exercice conduit à restreindre le nombre des participants et à asseoir une méthodologie pertinente.

En ce qui concerne les participants à ce forum, on pourrait retenir le principe de réunir les principaux acteurs politiques impliqués. Il s’agit des groupes politiques organisés et suffisamment visibles sur le terrain du débat électoral. Nous suggérons, à ce titre :

– Groupe FCBE

– Groupe ABT

– Groupe UN

– Groupe G13

Il faudra également inviter à ces échanges les organes de mise en œuvre de la LEPI et le groupe d’experts d’appui. Il s’agit de :

– CPS

– MIRENA

– PAREL

Le Groupe de travail sur la réalisation de la LEPI,  initié face aux difficultés de conduite consensuelle du processus, avec l’accord de toutes les parties prenantes et sous les auspices du Chef de l’Etat, devrait également y être invité, d’autant qu’en son sein, sont représentées les forces vives intéressées par la LEPI.

Enfin, les représentants des PTF pourraient être invités à prendre part à ces échanges, en qualité d’observateurs, à l’image de FORS LEPI qui pourrait, en outre, assurer en lien avec le Haut Commissariat à la Gouvernance Concertée et l’INSAE la discussion des rapports que présenteraient la CPS et la MIRENA.

Les travaux démarreront, avec intérêt, par la présentation d’un rapport du Superviseur établissant les étapes accomplies du processus, les difficultés rencontrées et les perspectives. Ce rapport pourrait être suivi de celui de la Présidente de la MIRENA sur les corrections intervenues et les perspectives. Les débats généraux vont suivre et permettront de dégager les questions essentielles autour desquelles un accord devra être recherché en vue de la validation des phases du processus.

Il importe de souligner qu’il est fortement souhaité que les résultats de cette rencontre soient validés sans une remise en cause majeure par les organes du processus LEPI. 

Enfin, FORS LEPI et FORS ELECTIONS tiennent à remercier chacun de leurs interlocuteurs de l’accueil citoyen qu’ils ont toujours réservé à leurs entreprises. Ils en profitent pour demander aux députés à l’Assemblée nationale, aux autres institutions de  la république, aux  partenaires  techniques et  financiers, aux groupes organisés de la nation ainsi qu’à nos concitoyens résidant, aussi bien au Bénin qu’à l’extérieur, d’accorder à la présente contribution citoyenne portée par ce  document toute l’attention requise pour la réalisation d’une liste électorale de qualité  devant aider à aboutir une issue heureuse des élections présidentielles et législatives attendues pour mars 201 au Bénin.

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1 thoughts on “Réalisation de la Liste électorale permanente informatisée et joutes électorales: La Société civile ébauche des pistes pour une sortie de crise

  1. moustapha razack

    Nous, association des jeunes leaders pour la releve d’un Benin emergeant marcheront le samedi 6 novembre 2010 pour la lepi car nous jugeons que c’est un élement susceptible de contribuer à la consolidation de la democratie beninoise voire developpement de notre chère pays

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