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Le triomphe de la vérité

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Pleins feux sur les 58 ans de vie du créateur de ‘’Agbadja moderne’’ Albert Coffi Bessanvi : Du couturier au magasinier, Gbessi se bâtit son avenir dans la douleur


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Pour ce cinquantenaire de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, nous avons jugé utile de vous faire découvrir un artiste qui a survécu au temps. Il s’agit de l’icône de la musique traditionnelle béninoise, Gbessi Zolawadji. Durant ses 58 ans de vie, l’artiste a traversé le chaud et le froid avant d’avoir cette aura qu’on lui connaît aujourd’hui. Issu de parents très humbles, Gbessi touchera à tout pour réaliser son avenir. Du couturier, au docker au port et maintenant magasinier, l’artiste  a  une histoire bien épatante, édifiante, mais aussi pathétique. Qui est donc cet homme aux talents internationalement reconnus ? Comment a-t-il réussi à s’imposer comme artiste aux Béninois et aux Africains d’une manière générale ? Découvrez donc l’homme dans toutes ses dimensions.

 Né vers 1952 à Cotonou au quartier Placodji de ses  feux parents M. Bessanvi Dossou, menuisier de profession et Mme Adjouavi Adangnitonon, ménagère, Gbessi Zolawadji est titulaire d’un certificat d’étude primaire (Cep). Il l’a acquis en 1964  à l’école primaire  catholique de Zoungbodji, un petit village sis dans la commune de Ouidah où il mit pied pour la première fois en 1958. Son nom à l’état civil est  Albert Coffi Bessanvi. Gbessi Zolawadji a une histoire que vous découvrirez par la suite. Pour l’instant, contentons-nous de le désigner par son vrai nom. En effet, après le Cep, pour faute de moyens, Albert Coffi  Bessanvi  était contraint de mettre fin à ses études. Ses parents, toujours préoccupés par son avenir, l’envoyèrent apprendre la Couture  chez son oncle à Cotonou. C’était un an après son Certificat d’étude primaire, c’est-à-dire en 1965. Le jeune Albert Coffi Bessanvi suivra rigoureusement  les consignes de ses parents  en apprenant pendant 4 années bien accomplies ce métier,  après quoi il obtiendra  son diplôme de fin d’apprentissage des mains de son patron Clément Tolété à Cotonou. Aidé par ses parents maternels, Albert Bessanvi ouvrira vers fin 1969, son propre atelier. Il exercera en effet ce métier jusqu’en 1974, l’année au cours de laquelle, il tentera une autre aventure, laissant derrière lui  sa profession de couturier.

 Albert Coffi Bessanvi, Docker à la Sodamap

A la suite d’un communiqué radiodiffusé lancé par la Société dahoméenne de manutention portuaire (Sodamap), l’actuelle Sobemap,  pour le recrutement des Dockers occasionnels, Albert Coffi  Bessanvi se précipitera pour tenter sa chance. Il dépose en effet son dossier qui fut accepté, ce qui lui ouvre les portes du Port en 1974. Il fermera alors son atelier de couture qui en réalité ne lui faisait pas bonne fortune. Déterminé à franchir les échelons dans ce secteur pour améliorer sa situation financière et professionnelle, Albert Bessanvi passera un test professionnel quelques années plus tard, auquel il réussira.  Par coup de promotion, il deviendra en 1994, magasinier au Port autonome de Cotonou, poste qu’il occupe jusqu’à ce jour.

 Albert Bessanvi sur les pas de son feu père chanteur

Avez-vous envie de savoir quand Albert Coffi Bessanvi a commencé ses premiers pas dans la chanson ? Vous ne le saurez jamais puisque lui-même l’ignore. Mais seulement, il se souvient vaguement qu’à l’âge de 6 ans déjà, il interprétait les belles chansons de son feu père, le chanteur principal du village. S’il prend cette option, c’est justement pour se faire quelques pièces d’argent (1F, 2 ou parfois 5 F quand la moisson est  très bonne) et surtout relayer les belles chansons de son père  Dossou Bessanvi, alias Atchaba, très aimé des villageois. « Il n’avait aucun moyen pour que mon père puisse être enregistré pour mieux partager ses chansons avec les siens et le public », a souligné l’homme. Après le décès de son père, grand chanteur de son village, Albert Coffi Bessanvi se retire à Cotonou où il formera son premier  groupe mixte baptisé « Groupe du jeudi des enfants. En fait, jeudi des enfants» était une émission de la radio nationale animée par Cousine Angèle, une animatrice de l’ORTB aujourd’hui à la retraite. Albert Bessanvi faisait donc partie des invités  de cette émission de grande écoute, une émission qu’il avoue l’avoir propulsée au devant de la scène musicale. Nous étions en 1971.

 Le coup d’Etat du 26 octobre  1972 emporte l’émission « jeudi des enfants »

L’émission jeudi des enfants qui consacre le premier groupe de Albert Bessanvi a connu une fin tragique. En effet, après un enregistrement, l’homme et ses amis du groupe se réunissaient le lendemain pour vivre ensemble sa diffusion aux environs de 14 heures. Comme d’habitude donc,  le jeudi 26 octobre 1972, le groupe de Albert Coffi Bessanvi s’était apprêté pour écouter à la radio nationale, leurs prestations de la veille. Un peu avant 14 heures de l’après-midi de ce jeudi, le générique qui annonce l’émission devrait passer. Mais à la grande surprise des auditeurs, c’est plutôt la musique militaire qui tonne en lieu et place du générique du Jeudi des enfants. A 14 heures piles, l’émission cède sa place au discours des pushistes qui viennent mettre définitivement fin au régime présidentiel dirigé par feu Justin Ahomadégbé. L’émission Jeudi des enfants est alors morte et enterrée au grand regret du jeune Albert Coffi Bessanvi, ses amis du groupe et des auditeurs d’une manière générale. « Depuis ce jour, cette émission ne reviendra plus jamais. Mon  tout premier groupe est alors définitivement mort aussi », regrette l’artiste. Mais sa détermination de se donner une identité artistique ne s’émoussera pas. Ainsi, Albert Coffi Bessanvi forme à nouveau son propre groupe qu’il baptise « Nonvisi » qui signifie littéralement « Main dans la main ».

 L’histoire du pseudonyme « Gbessi Zolawadji »

Telle une étoile, Albert Coffi Bessanvi brillera  fortement avec ce nouveau groupe. Il attirera beaucoup d’admirateurs et de sympathisants. Même les plus anciens dans la musique à l’époque lui reconnaissaient des talents incommensurables. Mais le rythme originel de Albert Bessanvi n’était pas du « Agbadja ». Il faisait du Toba, un rythme provenant du département des Collines. Et il le faisait donc si bien qu’à la suite d’une rencontre de causerie entre les Sages, doyens de la musique de Placodji, ceux-ci ont décidé de faire porter à leur jeune frère, le pseudonyme de Gbessi, ce qu’il ne refusera pas, parce que très respectueux de la décision de ses aînés. « Quand j’ai cherché à savoir les raisons pour lesquelles les sages m’ont donné ce pseudonyme, ils m’ont répondu que c’était à cause de ma belle voix, une qualité que personnellement j’ignorais mais dont j’ai fini par prendre conscience après les explications des sages », témoigne  l’artiste. Mais jusque-là, le second pseudonyme  « Zolawadji » n’existe pas encore. Avant d’en arriver là, tenons-nous-en d’abord à l’évolution de celui que nous pouvons à l’étape actuelle, nous permettre d’appeler Gbessi. En effet, une fois le groupe de Gbessi solidement implanté, il sort son tout premier album baptisé « Gan lo dié » dédié aux bienfaits de la Révolution naissante. « A l’époque, on était contraint à ne chanter que pour louer la Révolution », témoigne l’artiste. Comme précédemment mentionné, Gbessi ne faisait que du Toba. Mais l’âge avançant, l’artiste réalise qu’il n’était pas bien à l’aise dans ce rythme qui n’est d’ailleurs pas de sa région. Il change alors de cap et créera alors le « Agbadja modernisé », un rythme typiquement de chez lui. Ainsi, animé d’une folle rage de promouvoir la culture de ses ancêtres, Gbessi sort son 7ème album en 1994, le premier entièrement consacré au rythme « Agbadja ». Cet album qui connu un succès inexplicable était intitulé « Zolawadji », le titre phare qui passera sur beaucoup de lèvres. Partout, on l’appellera plutôt Gbessi Zolawadji et non seulement par son pseudonyme à lui donné par les sages « Gbessi ». Jusqu’à ce jour, ceci restera collé à l’artiste et il ne pourra plus rien faire pour s’en débarrasser. Il faut dire que Gbessi  Zolawadji compte aujourd’hui à son compteur discographique, 15 albums au total.

 Quelques distinctions honorifiques parmi les dizaines reçues

Gbessi Zolawadji, de par son talent jusque-là inégalable recevra  plusieurs distinctions, de quoi enrichir sa carrière artistique. C’est ainsi que le 28 septembre 1988, Gbessi Zolawadji sera lauréat du prix de l’Unesco suite à un concours qui l’a opposé à plusieurs de ses pairs. C’était à Porto-Novo au siège de l’Institution. Le 23 décembre 1991, l’artiste sera consacré lauréat du concours artistique organisé par le Bureau béninois du droit d’auteurs et des droits voisins dans la catégorie « Meilleure musique traditionnelle ». Le 6 décembre 1994 à Cotonou, il sera consacré meilleur artiste de la musique traditionnelle au Bénin Golden Awards « Bga ». Le 21 janvier 2000, Gbessi Zolawadji recevra une fois de plus, le premier prix du concours Fac-Opt. C’était à l’hôtel Shératon. Mais avant, le 3 décembre 1999, il sera nominé aux trophées Kora, un concours international qui s’organise en Afrique du Sud. C’était dans la catégorie « Meilleur artiste de la musique traditionnelle africaine ». Il réalisera le même exploit en 2000 avant d’obtenir finalement le trophée en 2001.  Le 27 août 2003, toute la nation béninoise lui reconnaîtra ses mérites. Ainsi, Gbessi Zolawadji est élevé au rang du Chevalier de l’Ordre national. Il faut dire que par la suite, il recevra plusieurs autres prix qu’il sera difficile d’énumérer de façon exhaustive.

 Gbessi et la vie de famille

Après la naissance de ses 4 enfants du même lit, 2 filles et deux garçons, Gbessi Zolawadji se décide de légaliser ses relations avec  la mère de ses enfants, Bernadette Tingbo à qui il rend hommage. C’était en 1989 à l’église Notre Dame de Cotonou pour ce qui concerne le mariage religieux et à la mairie de Cotonou pour ce qui est du mariage légal. Bien qu’étant artiste, Gbessi Zolawadji déteste la  polygamie. Dans le  cercle restreint de ses meilleurs amis, comme Alèkpéhanhou ,  Anice Pépé et consorts, il est taxé d’artiste « yéyé » pour son option monogamique. Et c’est pourquoi il restera jusqu’à ce jour avec l’unique mère de ses 4 enfants. « La polygamie crée assez de bouleversements dans la famille pendant et après sa vie. Il vaut alors mieux se contenter d’une seule femme. Et pour cela, il faut prendre le temps nécessaire pour se trouver la bonne épouse afin d’éviter les problèmes », conseille l’artiste. Il faut dire qu’à quelques mois de sa retraite,  Gbessi Zolawadji est déjà Pépé, puisque son fils aîné, Péroz Bessanvi lui a déjà donné deux petits fils qu’il dit adorer. Et pour cela, il rend grâce à Dieu. Il faut rappeler que Gbessi, même à la retraite ne compte pas raccrocher la musique. « A ma retraite, je me consacrerai davantage à la musique », affirme-t-il.

 Réalisé par  Donatien GBAGUIDI

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