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Le triomphe de la vérité

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Editorial: Pour un nouveau départ


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Nous voilà à l’heure du bilan. Cinq décennies après l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, nous en sommes à nous demander ce que demain sera, ce que nous réserve cet avenir assombri par la grisaille politique qui  ne nous offre pas vraiment des perspectives alléchantes. Et pourtant des évolutions remarquables ont été enregistrées. Au plan de la construction de l’unité nationale, 2010 est bien loin de 1960. Il y a cinquante ans, les chapelles politiques se construisaient surtout autour de l’identité ethnique revendiquée à cor et à cri. Un Aboméen  pouvait être assassiné et ses biens saccagé en période électorale, lorsqu’il réside dans une région d’obédience PRD comme Adjarra ou à Parakou, en pleine région MDD. En Octobre 1963, lors de la fameuse révolution, de violents pogroms ont eu lieu à Cotonou, avec un début de guerre civile. En mars 1970, la rupture a presque eu lieu, suite aux élections tournantes organisées par les militaires et qui ont tourné au chaos. La sécession entre Nord et Sud a été évitée de justesse. En mars 1991, aux premières élections présidentielles de l’ère démocratique, les émeutes de Parakou ont montré la résurgence des vieux démons qui reviennent presque toujours au galop en période électorale. C’est durant ces périodes que le personnel politique fait recourt à la variable identitaire comme argument de mobilisation de la clientèle électorale. Depuis 1991, le règne de l’argent dans les stratégies de mobilisation électorale vient complexifier davantage l’arène politique  en la transformant en un espace marchand. La préoccupation prioritaire ne semble plus être le développement (l’a-t-elle jamais été ?), mais le maintien d’une caste d’hommes et de femmes politiques ressortissants des grands pôles électoraux du pays.

        Le bilan de notre unité se ramène ainsi à une quête de pouvoir régionalisée à l’extrême, sans une vision stratégique nationale et intégratrice. Le repli identitaire est encore une menace, mais beaucoup moins qu’en 1960. Aujourd’hui moins qu’hier, il s’analyse comme la domination d’oligarchies embourgeoisées cherchant avant tout à maintenir leurs avantages. Et je continue de penser que les classes politiques qui se battent dans l’arène, s’y affrontent surtout pour le contrôle des rentes du pouvoir d’Etat, si abondantes sous nos cieux. Et le pire, c’est que les acteurs eux-mêmes en sont conscients et le clament ouvertement. Le discours dominant est plus lié à la distribution    de ces rentes politiques qu’au développement réel du pays. La variable identitaire est donc manipulée pour qu’une région contrôle la distribution du pouvoir et donc les avantages qui y sont liés au profit des oligarchies dominantes. La maturité démocratique étant encore balbutiante, même au sein des cadres, l’unité nationale n’est malheureusement pas encore pour demain.

        Quid du bilan économique ? Le tableau économique n’est pas plus reluisant. Nous sommes encore dans une économie d’endettement dans laquelle les rares initiatives de construction stratégique sont vouées à l’échec. Du fait de la spirale électorale instaurée par le cycle démocratique actuel, les réformes profondes que nécessite une économie de développement hésitent à se mettre en place. Les recettes budgétaires sont essentiellement  fiscales, d’autant que les produits primaires qui génèrent des rentrées de devises sont encore frappés par les fluctuations inhérentes au marché international. Rien qu’un classique. Depuis quelque temps, la CNUCED et les institutions de Bretton Woods viennent rappeler à nos pays, la nécessité de changer de cap en transformant sur place les produits de rente exportés vers l’extérieur. Le paradigme du développement  est ainsi reposé. Il  exige désormais une réconciliation du Béninois avec ses propres produits et ses propres valeurs. Le discours intellectuel préconise la consommation de nos propres produits. Mais au moment de passer à l’acte, peu de Béninois priorisent les produits nationaux, différant dès lors des Chinois par exemple qui développent à l’excès un patriotisme de consommation dont les fruits se répercutent depuis deux décennies sur la croissance économique de leur pays. Qui a dit que l’économie elle-même est d’abord culturelle ?

        Au seuil du cinquantenaire, c’est vers l’avenir qu’il convient de tourner nos regards, notamment vers les jeunes dont l’avenir est encore à écrire. Cet avenir se confond tragiquement avec celui de notre nation. De sorte qu’on ne peut continuer à tolérer plus longtemps notre système éducatif encore chaotique. Il ne prépare pas l’avenir, mais le détruit.

Olivier ALLOCHEME

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