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Le triomphe de la vérité

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Editorial: Quand le Nigeria s’enrhume…


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Le gouvernement nigérian a donné l’alerte le mois dernier. Il y a un mois environ, Abuja a interdit les réexportations de riz thaïlandais en direction du Nigeria. Ce coup d’arrêt brutal  a remis en cause tous les accords commerciaux établis non seulement avec notre grand voisin de l’Est mais aussi tous les protocoles signés dans le cadre du libre échange au sein de la zone CEDEAO. Le principe cardinal de la libre circulation des personnes et des biens a été violé, sans que les autorités béninoises en aient été avisées. Elles ont constaté comme tout le monde, comme la commerçante lambda, que le Nigeria a adopté de nouvelles mesures. L’absence de toute courtoisie diplomatique malgré l’excellence des relations entre nos deux Etats, devrait nous faire réfléchir. Et je me demande si ce forcing d’Abuja a eu l’effet nécessaire sur le gouvernement, et notamment le ministre du commerce. Ce fut un joli chantage auquel Boni Yayi a cédé tranquillement. En position de force, les autorités d’Abuja savent que le Bénin ne pourra pas réagir à cette provocation. Tout au plus, Boni Yayi a pu faire un bilan sommaire des cas querellés pour ensuite demander un moratoire. Désormais, la réexportation du riz est en sursis. Et le Bénin n’est plus à l’abri des coups de semonce de la partie nigériane qui se fout bien (et ce n’est qu’un euphémisme) de ce que pense son voisin.

Il est vrai que depuis mars dernier, le pays a mis en place un programme décennal visant à tripler la production de riz actuel. Il s’agit à terme pour notre voisin de l’Etat de résorber l’énorme déficit qu’il accuse en matière de production de riz (environ 56%). Ce gap est fourni par les réexportations béninoises qui forment une part importante des échanges entre Cotonou et Abuja. Comme d’ailleurs dans le secteur des véhicules d’occasion dont près de 90% sont acheminés  vers ce pays. Sans compter que la plupart des grandes commerçantes de Dantokpa ne peuvent survivre sans la cohorte des commerçants nigérians qui débarquent régulièrement pour profiter de la faiblesse du Naïra. Sans compter non plus les trafics informels qui sont encore plus importants que ceux formels. Le secteur des véhicules d’occasion doit son expansion dans les années 1990 à la grande capacité de consommation du Nigeria. C’est pourquoi, le Nigeria est notre premier partenaire commercial et tend même à dépasser nos liens commerciaux pour embrasser le domaine énergétique. Qu’est-ce que finalement le Bénin sans le Nigeria ? Un pays misérable, sans nul doute.

En examinant cette dépendance structurelle dont les conséquences négatives peuvent être incalculables, on voit d’abord les dérives du Nigeria qui connait bien l’état de sujétion où nous sommes. C’est certainement pour déroger à cette évidence que la première visite à l’extérieur du Bénin du président Boni Yayi fraîchement élu en 2006, a été consacrée au Nigeria. Rien n’est trop bon ni trop beau pour cajoler Abuja dans le sens des poils et donner à ses dirigeants le sentiment que le “petit Bénin” est un de ses alliés les plus sûres.

     A contrario, l’Etat nigérian se montre finalement d’une grande arrogance vis-à-vis de notre pays et rien ne saurait l’arrêter dans cet élan. La question se pose alors de savoir comment juguler cette situation sans passer  pour un Etat rebelle au grand Etat ni pour un pays fantoche, sorte de 37è Etat de la fédération nigériane qui se plie docilement à toutes les fureurs d’Abuja. Comment finalement sauvegarder des relations de bon voisinage qui sont vitales lorsque l’autre partie vous tient en laisse, prête à vous marcher sur les pieds ? Voilà une question à laquelle la classe politique devrait répondre. D’ores et déjà, l’observatoire des opportunités nigérianes  préconisées par le Professeur John Igué semble être une excellente idée. Elle devrait mettre un terme à  l’hypocrisie actuelle consistant à faire comme si le Nigeria n’était pas bien un Etat dont les politiques internes ont des répercussions directes sur le Bénin.  L’alerte du riz est sans doute la première d’une série. Il s’agit maintenant d’y réfléchir pour y parer.

 Olivier ALLOCHEME

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1 thoughts on “Editorial: Quand le Nigeria s’enrhume…

  1. Papa F

    Peut-on réellement penser que nous sommes indispensable pour l’approvisionnement du Nigeria ? Lorsqu’un puissant commerçant béninois achète deux navires de riz, un puissant commerçant nigerian peut en acheter dix. Ceci démontre bien que le Nigeria n’a pas besoin de nous pour son approvisionnement. Il s’agit d’une activité commerciale totalement nuisible à notre développement car la plus value que nous en tirons, aussi bien en termes fiscales qu’en termes sociales, est extrèmement faible. C’est bien la même chose pour le négoce de l’huile et ces commerçants qui commencent à gesticuler au profit de leurs seuls intérêts mercantiles, au détriment de la nation béninoise et de son développement socioéconomique. Il faut que ça change et ça va changer. Au lieu de pleurnicher, ces gens feraient mieux de voir plus loin que le bout de leur nez.

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