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Le triomphe de la vérité

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EDITORIAL: Les mains sales de la précarité


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Le choléra a repris du service à Cotonou. Environ 150 malades ont déjà été recensés dans les premier, deuxième, troisième et quatrième arrondissements de la ville. La maladie de la main sale revient donc hanter la ville qui craint partout les mouches, le vent et bientôt le soleil€¦Ce qui arrive à Cotonou n’est simplement que la résultante de tant de malpropreté dans certains de ses quartiers les plus sales : Ladji, Enagnon, Hlacomè, Agbato, Zogbo, Sainte-Cécile, Donatin, Placodji€¦L’évocation de ces quartiers est un appel au dégoût, tant est qu’ils charrient une image de tas d’ordures, d’enfants et d’adultes faisant leurs besoins à l’air libre, de maisons entourées d’immondices, de mouches et de moustiques prenant d’assaut les hommes et les aliments. Repoussant spectacle devant lequel on se demande ce qui peut bien pousser des êtres humains à habiter de tels amoncellements de saleté. S’il y a pauvreté, il y a quelque part aussi l’impuissance des pouvoirs publics à réguler l’habitat urbain.

La poussée du choléra qui se manifeste chaque année en période de pluie et de fraîcheur provient de cette installation anarchique des gens dans des zones insalubres laissées en marge de la République. Il y a bien entendu tout ce flux de ruraux qui viennent chercher en ville leur pitance journalière. La poussée de ces quartiers périphériques est d’abord un échec de la campagne à retenir ses jeunes dans les champs et surtout à leur offrir des conditions de vie meilleures. C’est un procès de tous ces plans de développement qui croissent en btiments cossus et flambant neufs à Cotonou, Porto-novo et Parakou, en véhicules 4×4 de luxe qui arpentent les pistes rurales sans jamais accoucher de résultats tangibles auprès des jeunes, des femmes et des personnes gées ployant chaque jour sous le poids de la misère. Ces personnes n’ont généralement d’autre choix que de se déverser dans les centres urbains où ils croient trouver un travail décent et une vie meilleure. Ce sont eux qui deviennent zémidjan, colporteurs, vigiles, racoleurs, ou pire encore de redoutables bandits qui écrèment les villes. Leur refuge est d’abord ces quartiers de misère faits de bric et de broc.

La mise en place de ces zones de saleté est un défi à l’autorité urbaine, l’urbanisation de Cotonou s’étant faite dans l’anarchie la plus totale. A la différence de certaines villes de la sous région ouest africaine où les plans d’urbanisation ont précédé l’installation humaine, Cotonou s’est construit et agrandi sans plan d’urbanisation bien pensé, entraînant la mise en place de quartiers sauvages. D’où la difficulté de déguerpir les populations de la berge lagunaire d’Akpakpa par exemple, véritable nid d’immondices, qui résiste depuis des années à tous les efforts du gouvernement pour assainir les lieux. Il ne pouvait en être autrement, les populations ne pouvant disposer d’autres abris que précaires. En délogeant un quartier lacustre et insalubre comme Ladji par exemple sans créer une autre zone d’accueil pour les sinistrés, on crée irrémédiablement un autre quartier de misère aussi misérable que les autres, parce que les populations doivent bien rester quelque part. C’est une véritable quadrature du cercle où l’autorité de l’Etat qui n’a pas su anticiper est constamment remise en cause. L’usage de la force est-il ici la solution ? Il n’est malheureusement qu’une solution précaire face à des quartiers tout aussi précaires qui savent bien se reconstituer n’importe où. Les nids de choléra n’en sont jamais loin.
Olivier Djidénou

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